L'itinérance GPRS
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Avertissement L'Autorité a commandé une étude au BIPE afin d'être éclairée sur les enjeux sous- jacents à l'itinérance GPRS. Dans un souci de transparence et d'information ouverte elle a décidé de rendre publique cette étude. La méthodologie utilisée et les résultats obtenus sont de la seule responsabilité du BIPE et n'engagent pas l'Autorité. Les parties intéressées sont invitées, le cas échéant à faire part de leurs commentaires à l'ART. |
Le GPRS et l’itinérance
La norme commune européenne GSM a permis de promouvoir l’itinérance entre les pays européens puis dans le monde entier. Pour la transmission de données, la norme GPRS(1), en proposant une transmission en connexion permanente, autorise un accroissement important des débits. Jusqu’à l’apparition du GPRS, les opérateurs mobiles n’avaient que partiellement mis en place des ponts entre leurs réseaux commutés et les réseaux de données. L’objet de cette étude est de montrer quelles sont les nouvelles architectures nécessaires à l’itinérance GPRS et les implications économiques qui en résultent.
Les opérateurs mobiles et l’itinérance GPRS
Avec l’apparition de l’Internet mobile, les opérateurs mobiles, en mesure de proposer un accès Internet à leurs abonnés, doivent entrer en relation avec les opérateurs du monde de la donnée. Les opérateurs mobiles se greffent parfois aux architectures existantes de l’Internet. Mais ils privilégient généralement des infrastructures propres et dédiées n’ouvrant l’accès vers l’Internet public que lorsque cela est vraiment nécessaire, afin de limiter les risques sur la qualité et la sécurité des communications.
Ainsi, pour écouler le flux d’itinérance, les opérateurs mobiles doivent constituer des liens entre les réseaux mobiles de chacun des pays. Plusieurs options de raccordement s’offraient à eux. Les opérateurs mobiles ont privilégié le recours à une solution proposée par les opérateurs de backbone IP : les GRX.
Pour établir le lien entre les réseaux GPRS/IP des différents opérateurs mo-biles, plusieurs solutions existent : la connexion directe entre opérateurs mobiles ; la connexion indirecte par l’intermé-diaire de l’Internet et la connexion indirecte par raccordement aux GRX (GPRS Roaming eXchange) (Voir figure ci-dessus).
La connexion directe entre opérateurs offre la meilleure sécurité et la meilleure qualité de service mais aussi le coût le plus élevé. La connexion indirecte par l’intermédiaire d’Internet, en revanche offre le meilleur coût de mise en place mais une sécurité et une qualité de service médiocres.
Des arbitrages furent donc réalisés entre la qualité/sécurité et les coûts de mise en place conduisant à privilégier la solution GRX qui présente le meilleur rapport entre la qualité et le coût pour l’ensemble des solutions disponibles.
Les opérateurs de GRX : l’infrastructure internationale du GPRS
Les fournisseurs de GRX représentent une nouvelle
classe d’acteurs. D’origines diverses, ils sont apparus au grand jour
suite à l’action de la GSM Association dans le courant de l’année
2000. Cette " officialisation " qui est venue consacrer
une relation étroite avec les opérateurs mobiles a été
rendue nécessaire pour faciliter le déploiement de l’itinérance
GPRS dans le monde entier. Les opérateurs de GRX qui, pour la plupart,
disposent d’infrastructures IP internationales, ont dû résoudre
des problèmes techniques complexes leur permettant de proposer
un Internet privatif fortement différentié de l’Internet
public.
La nouvelle structuration des relations entre les GRX et leurs clients opérateurs mobiles bénéficie largement aux opérateurs mobiles pan-européens. En effet, pour ces derniers, même si la sélection du GRX est réalisée de façon autonome par chacune des filiales étrangères, c’est le plus souvent l’opérateur GRX commun au groupe qui est sélectionné.
L’opérateur GRX commun au groupe, par cette " sélection " augmente alors la valeur propre de son réseau au détriment des autres GRX.
Points d’échanges entre GRX : un nombre limité qui reflète l’immaturité des marchés
Pour contourner les limitations intrinsèques du modèle, les GRX ont mis en place le principe de points d’échanges sur le modèle de celui existant sur Internet (avec des spécificités propres aux GRX). Il n’existe pour le moment qu’un seul point d’échanges. Situé à Amsterdam et baptisé AMSIX, il compte 15 opérateurs de GRX qui s’interconnectent : Belgacom, BT, Deutsche Telekom, France Télécom, Sonera (avec Equant), Telecom Italia, Telefonica Data, Telenor, Telia International Carrier, Cable & Wireless, UUNet, Equant (avec Sonera), Aicent, Comfone et TSI. Ce point d’échanges (qui repose sur un peering gratuit) permet de résoudre partiellement le déséquilibre inhérent à l’architecture.
Ce point encore unique en Europe devrait prochainement être complété par au moins un point supplémentaire en Asie. Toutefois, ce nombre restreint de points en regard de la multitude de points d’échanges existants actuellement sur l’Internet public est une conséquence de l’immaturité des marchés GPRS nationaux.
La problématique du DNS central
Un problème reste néanmoins en suspens : celui du DNS central pour la résolution des adresses par les DNS des opérateurs de GRX. L’ensemble des acteurs réfléchit actuellement à l’opportunité de mettre en place un DNS centralisé (" master root DNS ") qui soit capable de gérer l’ensemble des résolutions d’adresses entre opérateurs de GRX et les opérateurs mobiles. Toutefois, si la méthode est connue, les discussions sont toujours en cours car l’intérêt d’un serveur DNS centralisé n’apparaît pas clairement à tous les acteurs : les GRX fédérant un nombre important d’opérateurs mobiles sont moins incités à mettre en place cette structure que leurs homologues de taille réduite.
Enfin, l’itinérance des contenus n’est pas résolue : actuellement, un utilisateur en itinérance a accès au même contenu que s’il était sur son réseau domestique. Cette caractéristique limite potentiellement la nature des services offerts en itinérance.
Les GRX : des infrastructures sans flux mais prêtes pour l’UMTS
Le problème le plus important rencontré par l’ensemble des acteurs du GRX pour le moment est l’insuffisance des flux d’itinérance GPRS permettant de remplir au mieux les infrastructures internationales déployées. Les prévisionnistes estiment que l’année 2003 devrait être celle du décollage du service GPRS. A ce titre, les opérateurs mobiles conservent la place centrale dont ils disposaient sur le marché du GSM.
Pour le passage à l’UMTS, les modifications seront certainement moins essentielles pour le cœur de réseau que celles survenant dans la partie radio du réseau. Selon les choix technologiques opérés (migration de réseaux IP actuellement exploité ou construction de réseaux IP ad hoc pour le flux Internet mobile), les GRX sont prêts pour cette évolution.
Les flux de facturation de l’itinérance GPRS : un modèle nouveau qui évoluera
De nouveaux acteurs et de nouveaux processus et clés de facturation ont été introduits avec le GPRS. De cette façon, en passant de la facturation à la durée à une facturation au volume (le kilo octet devient la valeur de référence), les opérateurs ont dû substantiellement modifier leur système de facturation et les processus associés. Pour l’itinérance, les opérateurs mobiles au centre de la problématique, de par leurs relations privilégiées avec les clients finaux, déploient des méthodes de facturation innovantes. Mais les tarifs restent pour le moment encore très dissuasifs en contexte d’itinérance. Il reste aux opérateurs à traiter la problématique de la mise à disposition de contenu attractif et de leurs tarifications.
Les flux financiers sont séparés selon qu’il s’agisse des flux entre opérateurs de GRX (basés pour le moment sur un échange gratuit) ou des flux entre opérateurs mobiles (basés sur les accords d’itinérance conclus entre eux et qui contiennent en leur cœur entre autres les IOT(2)). Les tarifs de détail de l’itinérance, encore prohibitifs pour le moment, pourraient se réduire avec le développement du service. Enfin, les flux financiers à destination des fournisseurs de contenu et des agrégateurs de contenu employant le GPRS ne sont pas encore parfaitement clarifiés. L’ensemble de ces flux entre opérateurs mobiles et GRX est représenté dans le schéma suivant :
Ces flux financiers correspondent uniquement au segment transport et ne présagent pas des flux financiers vers les fournisseurs de services
Enfin, les tarifs d’itinérance sont élevés et variables selon les différents pays européens sélectionnés. Ceci contribue donc à rendre complexe la perception du tarif facturé aux clients itinérants. Ces clients souhaiteront certainement à très court terme disposer de tarifs plus homogènes ne variant pas de 12 à 32 € selon le pays d’itinérance.
Les opérateurs mobiles paneuropéens au centre de l’itinérance GPRS
Dans ce nouveau monde créé par l’introduction du GPRS, les opérateurs mobiles pan- européens vont détenir une place centrale. Ce sont en effet des clients capitaux pour les opérateurs de GRX qui leur permettent d’acquérir une position essentielle sur le marché. Ainsi, la sélection d’un opérateur de GRX par tout ou partie des entités nationales d’un opérateur paneuropéen donne un avantage concurrentiel très structurant à ce GRX. En ajoutant à cet avantage concurrentiel les dissymétries inhérentes aux flux d’itinérance, les opérateurs mobiles paneuropéens représentent bel et bien des acteurs capitaux pour l’activité des opérateurs de GRX.
Pour le moment, les flux GPRS sont faibles et ne génèrent pas de tensions fortes entre les différents acteurs. En effet, les clients n’utilisent encore que marginalement la fonction d’itinérance notamment à cause du sous développement national de l’utilisation des services GPRS mais aussi certainement à cause des fortes variations de tarifs d’un pays à l’autre. Dans ce contexte, les opérateurs paneuropéens seront à même d’influencer les tarifs proposés.
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1) General Packet Radio Service
2) IOT : Inter Operator Tarifs