Edito
Étude d’impact du numérique : une étape majeure pour la régulation
Par Serge Abiteboul, membre du collège de l’Arcep
Réduction des émissions de gaz à effet de serre, de la consommation de matières premières, d’eau, de la production de déchets, etc., les défis en termes de sobriété numérique sont considérables. L’Arcep s’est emparée du sujet en 2019 et en a fait un nouveau chapitre de sa régulation. L’Autorité rassemble de plus en plus de données essentielles pour les analyses en cycle de vie* et coanime avec ses partenaires des travaux sur la sobriété du numérique. Le changement de culture et le chemin parcouru depuis sont impressionnants.
Une étape importante : en mars 2023, l’ADEME et l’Arcep ont rendu le troisième et dernier volume de leur étude prospective sur l’empreinte environnementale du numérique en France à l’horizon 2030 et 2050. Cette étude montre, entre autres, que si rien n’est fait, l’empreinte carbone du numérique pourrait tripler d’ici 2050. Même si le numérique est un levier important pour améliorer la sobriété dans d’autres domaines, un tel accroissement semble peu compatible avec les objectifs de l’Accord de Paris en 2050.
Alors comment limiter cette empreinte ? Le rapport ouvre des pistes d’actions essentielles pour un développement des usages numériques plus sobre en carbone et en ressources. Si l’on veut réussir, nous devons tous nous y mettre, dès aujourd’hui ! Tous, aussi bien les utilisateurs que les entreprises du numériques et les opérateurs de réseaux et de centres de données.
* l’analyses en cycle de vie est une méthode normalisée qui permet de quantifier de la même façon tous les impacts de produits ou de services sur l’environnement et ce tout au long de leur vie (de leur fabrication à leur fin de vie, en passant par leur utilisation).
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La régulation en action
Anne Yvrande-Billon, directrice « Economie, marchés et numérique » (DEN) à l’Arcep, a présenté les scénarios 2030 aux ministres et à la presse.
L’évaluation prospective de l’ADEME et l’Arcep sur l’impact environnemental du numérique en 2030 et 2050 remise au gouvernement
L’ADEME et l’Arcep ont remis le 6 mars à Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, et Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, les résultats de leur étude prospective sur l’empreinte environnementale du numérique en France à l’horizon 2030 et 2050.
L’étude montre que sans action pour limiter leur croissance, l’empreinte carbone du numérique augmenterait de près de 45% en dix ans.
A horizon 2030, le trafic de données serait multiplié par 6 et le nombre d’équipements (smartphones, ordinateurs, téléviseurs, etc.) serait supérieur de près de 65 % en 2030 par rapport à 2020, notamment du fait de l’essor des objets connectés. Il en résulterait des augmentations des émissions de gaz à effet de serre (environ +45% pour atteindre 25 Mt CO2éq), de la consommation de métaux et minéraux (environ +14%) et de la consommation électrique finale en phase d’usage (+ 5% pour atteindre 54 TWh par an).
L’étude produit aussi des scénarios alternatifs pour 2030 imaginant l’effet que pourrait avoir la mise en place de mesures concrètes d’éco-conception des équipements et de sobriété. Par ce biais, elle identifie les leviers d’action à engager et amplifier dès aujourd’hui pour un développement des usages numériques plus sobre en carbone et en ressources.
La mise en œuvre de l’ensemble de ces leviers (comprenant par exemple l’allongement de la durée de vie des terminaux et la stabilisation du nombre d’équipements) permettrait de réduire l’empreinte carbone du numérique dès 2030 (-16%).
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#Datarcep
Le Baromètre du numérique, dont les derniers résultats ont été publiés le 30 janvier dernier, s’est attardé sur l’usage qui est fait des téléviseurs par leurs utilisateurs, à cause de la part importante (près de 14%) qu’ils pèsent dans l’empreinte carbone du numérique. La marge de progression pour réduire celle-ci est grande : 45 % des Français ont conservé leur téléviseur moins de 5 ans, 47 % l’ont remplacé alors qu’il fonctionnait encore, et dans deux tiers des cas, pour bénéficier d’une montée en gamme ou d’une offre promotionnelle.
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Tout terrain
Action de sensibilisation au numérique responsable sur le territoire de l’agglomération de La Rochelle
Loi REEN : le numérique responsable se décline à l’échelon local
La loi REEN prescrit aux collectivités de plus de 50 000 habitants d’élaborer, d’ici 2025, une stratégie numérique responsable visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique sur leurs territoires. Une première échéance en ce début 2023 doit les conduire à produire un premier plan de travail. Cette stratégie numérique responsable doit comprendre : - une évaluation de l’impact environnemental du numérique de la collectivité et de son territoire ;
- la mise en place d’indicateurs de suivi de ces impacts, des objectifs de réduction ainsi que de moyens pour atteindre ces objectifs.
Les moyens mis en place peuvent, par exemple, porter sur la gestion locale et durable du matériel informatique, l’écoconception des services numériques de la commune ou encore la sensibilisation au numérique responsable auprès des élus, des agents et des citoyens…
Plusieurs acteurs de référence produisent et partagent des ressources pour guider les collectivités dans cette démarche. Parmi eux, les Interconnectés, une association qui aide à investir le sujet du numérique responsable avec l’exemple de collectivités-pionnières comme l’Agglomération de La Rochelle.
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Comment Les Interconnectés et l’Agglomération de La Rochelle se positionnent et travaillent sur le thème du numérique soutenable ?
Céline Colucci, déléguée générale des Interconnectés :
« Les collectivités ont besoin d’accompagnement et de traductions concrètes des préconisations que comportent la loi REEN. Avec l’Institut du numérique responsable (INR), nous avons produit plusieurs outils : un guide méthodologique pour aider à la mise en œuvre de la stratégie du numérique responsable et un tableur Excel qui permet de répertorier les postes principaux d’impact des collectivités et de leurs territoires. C’est un premier pas et nous mettons en relation les collectivités avec d’autres acteurs capables de les accompagner individuellement, comme l’ANCT.
Le but est d’identifier les impacts sur lesquels elles peuvent agir rapidement, le matériel étant évidemment le premier levier d’action. Beaucoup de collectivités nous disent s’intéresser aux « boucles » locales de réemploi et de recyclage car elles concilient réduction de l’empreinte environnementale et inclusion numérique. D’après notre Baromètre sur la maturité numérique des Territoires, près de 30% des collectivités sont déjà en train d’élaborer leur stratégie. »
David Berthiaud et Jérôme Valais, respectivement directeur de la transformation numérique et chargé du numérique responsable à la Communauté d’Agglomération de La Rochelle :
« L’Agglomération ambitionne la neutralité carbone dès 2040 et le numérique doit prendre sa part. Nous avons donc placé le numérique responsable à l’agenda stratégique de la collectivité dès 2018.
L’élaboration de notre stratégie se fait en plusieurs étapes : - sensibiliser tous les publics, avec notamment une charte claire pour impliquer les acteurs de notre territoire ;
- mesurer l’empreinte environnementale de la collectivité : les bilans certifiés coûtent cher aux collectivités, nous avons donc aidé l’INR à créer WeNR, le premier outil de mesure de l’empreinte du Système d’Information libre et gratuit ;
- transmettre un questionnaire aux acteurs du territoire et les impliquer dans l’élaboration de notre stratégie grâce à des ateliers.
Pour nous, le numérique responsable va plus loin que la sobriété numérique. Il a aussi des ramifications éthiques et sociales avec la gestion de la donnée, l’open-source, la cybersécurité et l’inclusion numérique. »
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En vue
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Boris Ravignon
nommé président-directeur général de l’ADEME
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Boris Ravignon, maire de Charleville-Mézières et président d’Ardenne Métropole, a pris la tête de l’Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie en janvier 2023 suite à sa désignation par le Conseil des ministres. L’ADEME est un partenaire privilégié de l’Arcep sur les travaux à l’intersection de l’environnement et du numérique. L’étude sur l’empreinte environnementale du numérique devrait être suivie d’autres initiatives conjointes pour éclairer les acteurs sur les moyens de parvenir à un numérique soutenable.
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Bruxelles, l’Arcep et vous
Mise en consultation par le Berec de son projet de rapport sur les indicateurs de mesure de l’impact environnemental des télécoms
Le 15 mars, le Berec, groupe européen des régulateurs télécoms, a mis en consultation publique son nouveau rapport sur les indicateurs environnementaux pour les réseaux et services de communications électroniques. Cette consultation publique se clôturera le 12 avril.
Ce projet de rapport a été réalisé à la suite de plusieurs mois de recherches et de dialogue avec diverses parties prenantes (académiques, entreprises, associations et autres autorités). Il établit une liste de 21 indicateurs permettant de mesurer l’empreinte environnementale du secteur des communications électroniques. Ce rapport met en avant le rôle à jouer par les régulateurs télécoms qui appellent à un mandat plus clair en matière de collecte de données environnementales, au niveau européen.
Le Berec évalue également certains des principaux défis à relever, techniques en particulier, pour accroître la transparence environnementale dans le secteur, en cohérence avec les objectifs de la Commission européenne (notamment dans le Pacte Vert européen). L’harmonisation des méthodologies entre les Etats membres, la publication de données en open data ou encore le développement d’évaluation de tous les impacts environnementaux du numérique, au-delà des seules émissions de gaz à effet de serre, sont notamment mis en avant.
Le Berec continue de travailler sur la question en coopération avec la Commission européenne qui s’investit sur le sujet. Le groupe des régulateurs européens s’intéressera dès ce printemps au rôle de ces indicateurs pour délivrer une information claire aux utilisateurs sur l’empreinte environnementale de leurs produits et services numériques.
• Le projet de rapport
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La pépite à partager
Le guide de l’Arcep pour estimer et limiter l’empreinte de ses usages du numérique
Par leurs choix technologiques et les nouveaux besoins qu’ils suscitent, les grands acteurs économiques ont les principales clés de la réduction de l’empreinte environnementale. Mais cela ne doit pas être un prétexte pour ne pas agir individuellement.
En tant qu’utilisateur d’équipements numériques, que puis-je faire pour réduire mon impact environnemental au quotidien ? Pour répondre à cette question, l’Arcep a mis en ligne un guide didactique pour estimer son empreinte environnementale et mettre en place les gestes les plus pertinents pour réduire sa consommation de données, sa consommation d’énergie liée aux équipements numériques et prolonger leur durée de vie.
• Equipements et usages numériques : comment limiter mon impact environnemental au quotidien ?
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Ailleurs dans le monde
L’environnement, une préoccupation grandissante chez les autres régulateurs européens
L’Arcep n’est pas le seul régulateur télécom à collecter et publier de la donnée sur l’empreinte environnementale des opérateurs télécoms ; plusieurs autorités européennes lui emboitent le pas.
En Belgique, l’autorité de régulation belge (IBPT) a publié en novembre 2022 une étude sur l'empreinte environnementale des réseaux de télécommunication. L’IBPT y analyse plus particulièrement l’évolution de la consommation énergétique, des émissions carbones, de la consommation en eau et de la production de déchets des opérateurs belges. Dans tous ces domaines, fort des initiatives mises en place par les opérateurs, l’IBPT constatait une baisse de l’impact environnemental de ces derniers au cours de la période 2018-2021. En Finlande, Traficom a également publié en novembre 2022 une étude pilote sur la consommation énergétique des réseaux au niveau national. L’autorité finlandaise y concluait notamment que la consommation d'énergie des réseaux de communication représente environ un quart de l'empreinte carbone globale du secteur des technologies de l’information et des communications. En Espagne enfin, le CNMC a ajouté de nouveaux indicateurs de mesure de l’impact environnemental des acteurs du secteur à son exercice annuel de collecte.
Ces nouvelles initiatives montrent l’importance croissante des sujets environnementaux dans l’agenda des régulateurs européens.
• L’étude de l’BIPT
• Létude de Traficom (anglais)
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L'Arcep raconte
Des agents de l’Arcep lors de la dernière session de formation à la transition écologique.
L’Arcep forme ses agents aux enjeux environnementaux depuis 2021
Pour appréhender les enjeux de la transition écologique et mener à bien les missions relatives à l’empreinte environnementale du numérique, l’Arcep a eu la volonté dès 2021 de délivrer une formation approfondie à ses agents.
Quatre sessions de trois jours ont été animées par deux formateurs, l’un étant ingénieur spécialiste des bilans carbone d’entreprise et l’autre consultant avec une approche sociologique de la transition.
Une soixantaine d’Arcépiens et Arcépiennes répartis au sein de toutes les directions de l’Autorité ont ainsi été formés avec une approche scientifique sur les liens entre énergie et économie, le réchauffement climatique et nos leviers d’action. Avec des retours d’expérience unanimes.
« Elle a été très appréciée de tous car ce thème est transverse à toutes les directions, concerne de plus en plus de travaux de l’Arcep et a aussi un fort impact citoyen », résume Noé Faure, chargé de mission à la Direction Mobile et Innovation et pilote concernant sa mise en œuvre à l’Arcep. De l’aveu des participants, elle a provoqué des prises de conscience qui ont nourri les réflexions dans le cadre professionnel et parfois bousculé des habitudes personnelles très ancrées, jusqu’au régime alimentaire de certains agents.
Selon Véronique Carnoli, cheffe de l’unité Ressources Humaines, « la formation contribue à développer une culture partagée au sein de l’Autorité pour répondre aux enjeux liés à l’empreinte environnementale du numérique. L’objectif est de la poursuivre et, si cela est possible, de pouvoir également bénéficier des formations organisées dans le cadre du nouveau Plan de formation des agents publics à la transition écologique lancé en octobre dernier par le Gouvernement. »
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On vous donne rendez-vous
Mercredi 5 avril
Point d’étape « Pour un numérique soutenable »
L’Arcep réunit experts de l’empreinte environnementale du numérique et journalistes le mercredi 5 avril à 14h, au siège de l’Autorité ou en ligne, pour faire un point sur les dernières avancées et les travaux en cours au sein de la plateforme de travail de l’Autorité « Pour un numérique soutenable ».
Sur invitation
Mardi 18 avril
Bilan annuel de la plateforme « J’alerte l’Arcep »
L’Arcep présentera à la presse le bilan annuel de son action au profit des utilisateurs et de sa plateforme de signalement « J'alerte l'Arcep ». Lancée fin 2017, cette plateforme permet aux particuliers, entreprises, collectivités, opérateurs, développeurs, marchands de journaux de remonter les problèmes rencontrés avec leurs opérateurs fixes ou mobiles et les acteurs postaux ou de distribution de la presse. A cette occasion, l’Arcep publiera également une mise à jour de son observatoire de la satisfaction client. La conférence se déroulera en ligne et en présentiel le 18 avril à 9h.
Sur invitation
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L’Arcep y a participé
Mercredi 15 mars 2023, Trappes (Yvelines)
Visite d’un dépôt de presse
Accompagnée par François Lions, membre du collège de l’Arcep, Laure de La Raudière s’est rendue à Trappes, au sein d’un dépôt de presse. Ils y ont rencontré Bruno Aussant, dépositaire et président du Syndicat national des dépositaires de presse (SNDP) et Philippe Charbit délégué général du SNDP.
Maillon essentiel de la distribution de la presse, les dépositaires assurent la distribution aux diffuseurs de presse situés dans leur zone géographique des quotidiens et publications qui leur sont confiés par les sociétés de messageries de presse.
Mardi 21 mars 2023, Deauville (Calvados)
Etats généraux des RIP
Olivier Corolleur, directeur « Fibre et territoires » et directeur général adjoint de l’Arcep, est intervenu aux Etats généraux des RIP, conférence annuelle dédiée aux différentes parties prenantes des réseaux d’initiative publique et du déploiement du très haut débit en France. Il a notamment pris la parole au cours d’une table-ronde consacrée à l’extinction du réseau cuivre d’Orange.
Mercredi 22 mars 2023, Paris
50e Congrès Culture presse
Le 50ème Congrès Culture Presse, grand rendez-vous des délégués locaux et représentants des marchands de presse organisé par l’Union des commerçants des loisirs et de la presse, s’est tenu les 21, 22 et 23 mars 2023. Au cours de son intervention, Laure de La Raudière est notamment revenue sur les travaux à mener en 2023 pour compléter le cadre de régulation tels que la mise en place de la comptabilité réglementaire des distributeurs, la définition d’indicateurs de qualité de services des distributeurs ou encore les conditions de rémunération des marchands de presse.
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L’Arcep y participe
Jeudi 6 avril 2023, Saint-Pierre-du-Perray (Essonne)
Suivi du plan de reprise des réseaux en fibre optique
Suite à l’engagement qu’elle avait pris devant les élus locaux réunis en mars 2022 par la députée de l’Essonne Marie Guévenoux, Laure de La Raudière se rendra à Saint-Pierre-du-Perray pour suivre l’avancée du plan de reprise du réseau en fibre optique menée par XPFibre. Elle sera accompagnée de Stéphane Sinagoga, sous-préfet d'Etampes, Marie Guévenoux et Dominique Vérots, maire de Saint-Pierre-du-Perray.
Il y a un an, Laure de La Raudière s’était rendue dans cette commune qui connaissait de nombreuses difficultés liées au déploiement de la fibre. L’occasion donc de faire un point sur la mise en œuvre du plan d’action mené par les opérateurs pour améliorer la qualité des réseaux en fibre optique.
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