Synthèse du rapport de l’Autorité de régulation des télécommunications sur l’adaptation de la régulation / Juillet 2002 "Adapter la régulation au nouveau contexte du marché des télécommunications" La synthèse du rapport en téléchargement au format word ou rtf Au terme de cinq années de régulation, et devant la mise en place prochaine d'un nouveau cadre réglementaire adopté au niveau européen, l'Autorité a engagé début 2002 une réflexion globale sur le bilan de son action, destinée à préparer les évolutions à venir. Celles-ci découlent de la transposition prochaine des directives adoptées le 7 mars 2002 et qui doivent être transposées en droit français au plus tard en juillet 2003, mais également des évolutions économiques et technologiques récentes du secteur des télécommunications dans son ensemble, qui appellent une régulation adaptée et cohérente. La nécessaire adéquation de la régulation à la situation concurrentielle des marchés, principe directeur des nouvelles directives européennes, appelle en effet un certain nombre d'adaptations sur lesquelles l'Autorité, forte de son expérience, a souhaité apporter sa propre contribution. Le présent document vise à mettre en lumière les principaux axes de cette réflexion, dont les éléments détaillés figurent dans un rapport plus complet, mis à disposition du public. I. L’opérateur historique, la concurrence et la régulation Impulsé par les directives européennes, le passage d'une situation de monopole à une situation d'ouverture effective à la concurrence, amorcé en 1996, a modifié considérablement l'environnement de l'opérateur historique. L’établissement de la concurrence, processus auquel le régulateur s’est pleinement consacré depuis cinq ans, a modifié en profondeur le paysage des télécommunications. 1. La place de l’opérateur historique Des évolutions importantes ont remis en cause le modèle antérieur d'un opérateur détenteur d'un monopole sur son marché et contrôlé entièrement par l'Etat. En premier lieu, l'intervention étatique a perdu une partie importante de sa vocation initiale une fois le retard en équipement rattrapé et les infrastructures de service public mises en place. Dès lors que l'opérateur historique était placé en situation de concurrence, la position d'actionnaire occupée par l'Etat imposait en outre la mise en place d'une régulation indépendante – afin d'éviter de placer la puissance publique en qualité à la fois de juge et de partie – et asymétrique, soumettant l'opérateur à des règles spécifiques compte tenu de sa position sur le marché ; c'est précisément ce qui a initialement justifié la création de l'ART, organisme agissant au nom de l'Etat mais sans être placée sous l'autorité du Gouvernement et auquel était assigné un certain nombre d'objectifs fondamentaux parmi lesquels la mise en place, au bénéfice des consommateurs, d'une concurrence effective et loyale sur le marché. En outre, en qualité d'entreprise, France Télécom était confrontée à un bouleversement de son environnement dès lors qu'était décidée en 1996 l'ouverture à la concurrence du service téléphonique au public, segment représentant à cette époque 90 % de son chiffre d'affaires. Ce contexte nouveau a conduit l'opérateur historique à réorienter fondamentalement sa stratégie autour de plusieurs axes : une politique dynamique de baisse des prix et de diversification des services sur son cœur d’activité, le téléphone fixe ; le développement de nouveaux usages : mobiles, Internet, services de données aux entreprises ; un développement international d'envergure, focalisé sur ces nouveaux usages, avec Equant, Orange et Wanadoo, stratégie qui conduit l’opérateur à tirer 36 % de son chiffre d'affaires hors de France. Aujourd'hui cependant, dans un contexte conjoncturel plus difficile, les acquisitions réalisées par France Télécom ont été pour une large part dépréciées, alourdissant le niveau de dette de l'opérateur, et ce bien que ses résultats d'exploitation demeurent en croissance régulière. La question parfois exprimée du degré adéquat de régulation doit être posée à la lumière de ces considérations. En effet, le régulateur ne peut ignorer les difficultés financières de l'opérateur historique ; pour autant, ce contexte, dont l’origine dépasse largement le seul champ national, ne saurait le conduire à abdiquer la mission qu'il tient de la loi et notamment à s'écarter de l'objectif fondamental d'ouverture et d'élargissement progressif d'une concurrence favorable au consommateur. Les actions de régulation portent leurs effets sur les activités exercées par France Télécom sur son marché domestique ; or, sur ce marché, France Télécom dégage un chiffre d'affaires et un résultat d'exploitation en croissance régulière, témoignant de sa réactivité et de son adaptabilité au nouveau contexte concurrentiel. De plus, les chiffres témoignent de l'effet vertueux de la concurrence, génératrice de volumes et de nouveaux usages dont l'opérateur dominant tire les bénéfices en situation privilégiée de "meneur de jeu". La structure du groupe France Télécom, regroupant en son sein des activités fixes, mobiles et Internet, est parfois mise en cause par certains observateurs et concurrents de l'opérateur historique qui estiment que la séparation structurelle, voire physique, de certaines activités constituerait un vecteur de développement concurrentiel plus important pour le marché. En particulier, certains pensent que la séparation physique des activités de " réseau " – la boucle locale en particulier – pourrait être la solution à même d'accélérer le développement de la concurrence par le dégroupage de la boucle locale qui aujourd'hui connaît un déploiement limité. La solution consistant à séparer les activités "réseau" des activités "services" a notamment été retenue dans le cas des activités ferroviaires ; le caractère récent de cette mesure ne permet toutefois pas aujourd'hui d'en mesurer l'efficacité. Il convient en outre de souligner que les situations d'un réseau ferré et d'un réseau de télécommunications ne sont pas comparables : en effet, l'activité de réseau dans le secteur des télécommunications paraît économiquement plus propice au développement d’initiatives concurrentielles ; des solutions alternatives à la boucle locale de France Télécom en cours de déploiement (boucle locale radio, boucles optiques d'entreprises) en sont les manifestations. En outre, intrinsèquement, une solution de "désintégration" de l'entreprise sur ses activités historiques serait longue et complexe à mettre en œuvre, alors même que l'objectif poursuivi de mise en place d'une concurrence effective et loyale justifie une réactivité importante. Il ne semble pas qu'une telle solution puisse répondre à la question centrale, rencontrée dans la plupart des pays, des comportements que l'opérateur historique est susceptible de mettre en œuvre pour maintenir – voire abuser de – sa position dominante sur son marché. Enfin, un dispositif de ce type pourrait conduire à la reconstitution d'un monopole sur le réseau, fragilisant les initiatives concurrentielles alternatives. La mise en place des conditions d'une concurrence établie dépend ainsi essentiellement du contrôle ex ante susceptible de prévenir de tels comportements de l'opérateur historique, notamment par une séparation comptable adaptée, davantage que de sa structure d'activités dont les synergies dégagées constituent un facteur de compétitivité, y compris vis-à-vis des opérateurs étrangers, que le régulateur ne saurait contester. 2. Légitimité et pérennité de la régulation Ce sont ainsi les instruments de contrôle et de contrainte mis à disposition du régulateur qui doivent pouvoir être pleinement utilisés lorsque cela est justifié ; leur renforcement est à plusieurs égards nécessaire. Ce contrôle concerne en premier lieu les conditions de tarification, qu'il s'agisse de prix de détail ou de prix de cession de prestations intermédiaires (interconnexion, accès, dégroupage) ; le contrôle amont des tarifs, appuyé sur une séparation comptable adaptée, produit des effets équivalents à une séparation structurelle et peut être mise en œuvre plus rapidement et efficacement : ces instruments permettent en effet de s'assurer que l'opérateur historique n'applique pas des conditions tarifaires discriminatoires à ses concurrents par rapport à celles qu'il réserve à ses propres activités ou services ; ce principe d'identité des prix de cession internes et externes pour des prestations équivalentes est fondamental. A cet égard, les dispositions relatives à la séparation comptable prévues au cahier des charges de France Télécom approuvé par le décret du 27 décembre 1996 appellent assurément une révision pour être adaptées à la situation nouvelle liée à la problématique du dégroupage ; si en l'état actuel des textes, la mise en œuvre de ce contrôle relève d'un accord bilatéral entre le régulateur et l'opérateur, donner un cadre juridique à ce dispositif paraît nécessaire. En second lieu, la prévention de comportements autres que tarifaires, touchant par exemple aux conditions techniques et opérationnelles de l'interconnexion et de l'accès, appelle la mise en œuvre par le régulateur de leviers d'intervention efficaces et adaptés. Plusieurs instruments ont été mis à disposition par la loi du 26 juillet 1996 : le règlement des litiges, la procédure de sanction, la fixation de règles générales sous couvert de l'homologation ministérielle, la faculté de saisir le Conseil de la concurrence ; a été ajoutée plus récemment la faculté tirée du règlement européen de décembre 2000 d'imposer des modifications de l'offre de référence de l'opérateur. Au total, il apparaît que loin de voir son rôle diminuer, la régulation du secteur doit être confirmée, tant du point de vue qualitatif que quantitatif, au travers d'objectifs réaffirmés et d'instruments adaptés. 3. La concurrence au bénéfice des consommateurs Depuis le 1er janvier 1998, date de l’ouverture complète du secteur des télécommunications, la concurrence s’est effectivement développée sur l’ensemble des segments du marché, ce dont témoignent le nombre des opérateurs aujourd’hui présents en France, la part de marché qu’ils ont acquise et la baisse des prix qui a résulté de ce mouvement. Conformément à l'objectif qui lui est assigné, la concurrence a effectivement bénéficié aux consommateurs, entreprises ou particuliers. Cela s’observe d’abord à travers la baisse des prix, effective sur l’ensemble des marchés. Ainsi le prix de la minute de communication téléphonique longue distance a-t-il été divisé par dix entre 1996 et 2001. L’apparition et la généralisation des forfaits, tant pour le téléphone mobile que pour l’accès à Internet, ont très largement participé à ce mouvement. La diversification des offres et des services est une autre caractéristique de la concurrence, favorable au consommateur. Ainsi, la concurrence a apporté aux utilisateurs une nouvelle dimension dans leur approche des services de télécommunication : le choix. Mais cette liberté nouvelle se traduit aussi par une complexité accrue dans les offres et les tarifs. Cette inévitable complexité rend plus difficile la comparaison des formules proposées par les opérateurs et peut parfois conduire à des pratiques contraires à l’intérêt des clients. En outre, on observe un déficit de visibilité des consommateurs quant à l’évolution des services et des technologies. Cette situation conduit naturellement au développement des litiges entre les opérateurs et leurs clients. Des mesures ont été prises par les pouvoirs publics pour favoriser la lisibilité des factures et des tarifs et pour proscrire les clauses abusives dans les contrats. Il reste encore beaucoup à faire pour améliorer la visibilité pour les consommateurs et les sensibiliser au développement des nouveaux services. L’Autorité s’attache à y contribuer par un dialogue constant avec les consommateurs et leurs associations. 4. L’évolution des compétences du régulateur La transposition du nouveau cadre réglementaire européen va conduire à l’adaptation d’un certain nombre de compétences de l’Autorité à la progression de la concurrence. Les deux principaux facteurs d’évolution sont l’établissement d’un régime d’autorisation générale et la mise en place d’un cadre de régulation plus souple pour la désignation des opérateurs puissants et l’application d’obligations renforcées à ces opérateurs. Mais l’ensemble des compétences de régulation peuvent être appelées à être adaptées, qu’il s’agisse de la gestion des ressources rares, des règles relatives à l’interconnexion et à l’accès ou du contrôle tarifaire, non seulement en raison de l’application du nouveau cadre réglementaire, mais également pour adapter la régulation à un marché qui a évolué depuis cinq ans.
Avec l’application du nouveau cadre européen, l’autorisation générale devient la règle et le droit d’utilisation individuel l’exception, réservée à l’attribution de ressources rares. Si le régime d’autorisation générale allège de façon positive l’entrée des acteurs sur le marché, elle ne supprime pas la nécessité d’une relation établie entre les opérateurs et le régulateur, en particulier pour lui permettre d’identifier les acteurs (détermination de leurs droits et obligations : taxes administratives, droit à l’interconnexion, sanctions éventuelles, etc.) et de recueillir les informations nécessaires à la régulation (établissement de statistiques, conduite d'analyses concurrentielles, informations sur la qualité de service ou les tarifs). C’est pourquoi il est indispensable, ainsi que la directive " Autorisation " en prévoit la possibilité, que les opérateurs se notifient auprès de l’Autorité avant le lancement de leur activité. Cette notification doit être obligatoire, afin que la régulation s’applique effectivement à l’ensemble des opérateurs. Elle doit s’accompagner d’un pouvoir de contrôle de cette déclaration et des moyens correspondants pour l'exercer. S’agissant des différentes catégories d’autorisation existantes, il faut souligner que les mêmes droits et obligations s’appliqueront à l’ensemble des acteurs de réseaux et services ouverts au public dans le nouveau cadre. La distinction juridique actuelle entre " exploitant de réseau ouvert au public " (L. 33-1) et " fournisseur du service téléphonique au public " (L. 34-1) n’est donc plus indispensable, d’autant que le service téléphonique tend à devenir un service de télécommunications parmi d’autres. En revanche, dans le cadre d’une autorisation générale valable pour l’ensemble des opérateurs, certaines obligations auront vocation à s’appliquer plus particulièrement aux fournisseurs de services et d’autres aux exploitants de réseaux. Par ailleurs, la distinction entre réseaux ouverts au public et réseaux indépendants demeure dans le nouveau cadre réglementaire européen. Outre les réseaux à usage privé réservés à l'usage de la personne qui les établit, elle repose aujourd’hui essentiellement sur la notion de groupe fermé d’utilisateurs, entendue au sens d’une communauté d’intérêt préexistante au réseau et stable dans le temps. Or, dans un certain nombre de cas, ce critère ne correspond plus à la réalité des projets. Ainsi, les services proposés par certaines collectivités ou organismes, dans le cadre d’autorisations de réseaux indépendants, s’adressent à des publics qui dépassent le cadre d’un GFU (par exemple un accès à Internet dans une mairie ou une bibliothèque municipale). Cette évolution, liée au développement des nouvelles technologies, traduit bien souvent le fait que les collectivités territoriales ne trouvent pas, auprès des opérateurs, d’offres adaptées à leurs besoins. Dès lors, la distinction entre réseau ouvert au public et réseau indépendant, qui a son utilité car elle offre une formule simple et peu coûteuse à des milliers de sociétés, doit être clarifiée et simplifiée afin de rester pertinente. Le maintien de la distinction est toutefois subordonné à l’établissement d’un critère de différenciation plus opérationnel (par exemple la distinction entre les agents d’un organisme et les usagers de celui-ci). C’est pourquoi l’Autorité a d’ores et déjà engagé une réflexion approfondie avec les acteurs sur cette question.
La gestion et l’attribution des ressources dans des conditions transparentes et non discriminatoires est une des missions quotidiennes du régulateur. Le nouveau cadre européen maintient un système de droits individuels pour l’attribution des fréquences et des numéros, même s’il précise que les décisions individuelles d’attribution ne doivent être utilisées que lorsque cela est nécessaire. Deux évolutions principales peuvent être envisagées dans la gestion des fréquences :
S’agissant des ressources en numérotation, le nouveau dispositif prévoit peu d’évolutions. La directive " Service universel " prévoit explicitement la portabilité des numéros mobiles, qui sera mise en œuvre en France au 30 juin 2003. Par ailleurs, elle fixe à trois semaines le délai d'attribution des numéros, mesure dont la mise en œuvre pourrait exiger des moyens supplémentaires. Enfin, la directive " Autorisation " pose la question de la cessibilité des numéros à des tiers, en laissant aux Etats membres le soin d’y répondre. Sur ce point, l’Autorité est favorable à une solution comparable à celle envisagée pour les fréquences. S’agissant enfin des ressources liées à l’utilisation d’Internet, l’Autorité est soucieuse de renforcer la transparence dans la gestion actuelle des adresses IP et des noms de domaines. Pour ce faire, elle estime nécessaire de mettre en place un cadre juridique confortant les instances gérant les noms de domaine au niveau français et d’encadrer davantage, au plan européen, la gestion des adresses IP, en s’inspirant du modèle de la gestion des ressources en numérotation. Elle s’attache pour sa part à renforcer sa coopération avec les organismes gestionnaires des ressources.
Le nouveau cadre européen prévoit une régulation qui s’adapte d’une part en fonction des caractéristiques de chaque marché pertinent (définition des marchés pertinents et application d’obligations différenciées aux opérateurs désignés puissants sur chacun de ces marchés), d’autre part en fonction de la progression de la concurrence sur chacun des marchés identifiés (conduite régulière d’analyses concurrentielles permettant d’adapter les obligations appliquées aux opérateurs puissants sur chaque marché pertinent). Une telle évolution va conduire à une adaptation des méthodes de travail de la régulation. En effet, l’analyse des marchés va prendre une place qu’elle n’avait pas jusqu’à présent dans l’action quotidienne de l’Autorité. L’Autorité sera appelée à conduire de façon régulière des enquêtes quantitatives et qualitatives sur un plus grand nombre de marchés qu’actuellement (les directives actuelles ont identifié quatre marchés pertinents). En outre, la Commission européenne sera plus étroitement associée à ces travaux, puisque la directive " Cadre " lui accorde un droit de regard, voire de veto, sur ces questions. L’Autorité considère que cette évolution représente une amélioration du cadre actuel, qui va permettre la mise en œuvre d’une régulation concurrentielle plus fine sur chaque marché. Elle souligne toutefois, à la lumière de son expérience, que l’efficacité du dispositif mis en place dans le cadre de la transposition suppose l’établissement d’un cadre contraignant pour le recueil d’information afin d’assurer la pertinence des informations collectées et la rapidité dans la réalisation des analyses. L’Autorité a d’ailleurs anticipé ces évolutions en conduisant, à la fin de l’année 2001, trois enquêtes de concurrence.(1) Parallèlement à cette adaptation de la régulation sectorielle, le nouveau cadre européen prévoit un renforcement de la coopération entre les autorités de régulation nationales et les autorités de concurrence. Il faut rappeler à cet égard que la loi de 1996 a établi un dispositif de coopération entre l’Autorité et le Conseil de la concurrence pleinement cohérent avec les nouvelles directives et qui a parfaitement fonctionné. L’Autorité considère qu’il doit être maintenu, dans son principe, même si quelques améliorations de procédures pourraient permettre d’en renforcer encore l’efficacité.
L’application du cadre actuel pendant cinq ans a montré les limites du dispositif actuel en matière d’interconnexion et d’accès. En particulier, la nécessité d’adopter un texte spécifique sur le dégroupage a montré que le cadre actuel n’était pas suffisamment général et manquait de souplesse. Le nouveau cadre présente à cet égard l’avantage de réunir l’ensemble des questions d’accès et d’interconnexion sous un régime unifié, en dotant le régulateur d’une marge d’action appréciable dans la mise en œuvre des outils de la régulation de l’accès. En particulier, il faut souligner les inconvénients du mécanisme actuel d’approbation du catalogue d’interconnexion de France Télécom : il s’agit d’abord d’un mécanisme qui donne davantage l’initiative à l’opérateur historique qu’à l’Autorité. Il en résulte un processus de négociation qui conduit à une approbation du catalogue en général trop tardive par rapport aux attentes du marché. Par ailleurs, afin que les opérateurs puissent effectivement disposer d’une offre dans des délais raisonnables, l’Autorité est conduite à approuver un document qui n’est pas pleinement satisfaisant, et à compléter certains points par la suite. Il existe certes des outils complémentaires, tels que l’article D. 99-16 permettant à l’Autorité de modifier des prestations du catalogue ou l’article L. 34-8-VI, nouvellement introduit par l’ordonnance du 25 juillet 2001 et permettant à l’Autorité d’intervenir au cours de négociations relatives notamment à l’interconnexion. Ces outils n’ont cependant pas été mis en œuvre à ce stade, le premier soulevant certaines difficultés juridiques dans son application concrète, le second ne portant pas précisément sur le contenu du catalogue d’interconnexion. C’est pourquoi l’Autorité est favorable à l’établissement d’un véritable pouvoir de modification de l’offre de référence des opérateurs puissants soumis à cette obligation, ce que prévoit expressément la nouvelle directive " Accès ". L’institution d’une telle disposition ne supprime pas pour autant la nécessité d’une publication annuelle de l’offre de référence. Elle souligne par ailleurs l’utilité de dispositions existantes, qui devront être maintenues dans le futur cadre réglementaire : il conviendra en particulier de maintenir des dispositions contraignantes permettant de vérifier l’orientation vers les coûts (audit des comptes), ainsi que la transmission à l’Autorité des conventions d’interconnexion, afin de lui permettre de s’assurer de l’absence de discrimination. Enfin, les dispositions actuelles relatives au dégroupage devront être maintenues et inscrites dans le cadre du régime de l’accès.
L’Autorité a été conduite à plusieurs reprises à souligner que le dispositif actuel de contrôle des tarifs de détail de France Télécom méritait d’être simplifié, afin d’en renforcer l’efficacité. Les aménagements proposés tiennent compte de l’expérience acquise et s’inscrivent dans le respect des objectifs poursuivis :
Afin de simplifier le dispositif, le contrôle des tarifs pourrait être confié à l’Autorité, dans le cadre d’une distinction plus nette entre la définition de la politique publique, qui relève du Gouvernement et du Parlement, et sa mise en œuvre, qui constitue la mission du régulateur. Ces propositions sont pleinement cohérentes avec les nouvelles directives, qui prévoient expressément le contrôle, par le régulateur, des tarifs du service universel et des opérateurs puissants.
Le bilan de l'utilisation de l'ensemble des outils de régulation conduit à mettre l’accent sur l'objectif d'une meilleure effectivité des décisions. En effet, l'exécution des décisions est parfois ralentie ou entravée par l'opérateur concerné, causant un préjudice important à la mise en œuvre des objectifs poursuivis. Un élément de réponse avancé notamment dans le rapport établi par M. le Sénateur Pierre Hérisson réside dans la faculté, pour l'Autorité, de disposer de moyens plus contraignants en la matière, sur le modèle des injonctions ou des astreintes qui peuvent être ordonnées par les juridictions de droit commun. La compétence de règlement des différends, qui s’est révélée extrêmement utile à l’exercice de la régulation, pourrait également être rendue plus efficace par la mise en œuvre d’un certain nombre d’améliorations. Ainsi la possibilité, pour l’Autorité, de conduire une consultation publique en cours de procédure, la faculté expresse de conférer une portée rétroactive aux décisions pour prendre en compte les impacts économiques et concurrentiels des conditions restées en vigueur pendant la période d'instruction, et la possibilité de contraindre les parties à exécuter ces décisions constitueraient des outils indispensables pour donner toute sa portée et sa pleine efficacité à cette compétence. S’agissant du pouvoir de sanction, il est essentiel d’introduire davantage de souplesse dans les délais et d’élargir le spectre des sanctions qui peuvent être imposées, par exemple en permettant à l’Autorité de retirer des droits d’utilisation de fréquences et de numéros. Ces deux dispositions sont d’ailleurs prévues explicitement par les nouvelles directives. La régulation devrait également être dotée de compétences renforcées pour lui permettre d’effectuer de véritables enquêtes, y compris hors du cadre de la recherche d'éventuelles infractions. De telles enquêtes sont indispensables à l’exercice de ses missions compte tenu de l’asymétrie d’information qui caractérise les situations respectives du régulateur et des opérateurs. Enfin, l'évolution des conditions d'intervention des collectivités territoriales dans le secteur des télécommunications appellera une implication particulière du régulateur dans l'accompagnement et le suivi de ces initiatives, et donc la mise en place d'outils adaptés à cette démarche.
La nouvelle directive "Service universel" prévoit que la résolution des litiges auxquels sont partie des consommateurs doit pouvoir se faire rapidement, par des procédures extrajudiciaires transparentes, simples et peu onéreuses. Jusqu’à présent, une telle procédure n’existe pas en France. Pour sa part, l’Autorité joue un rôle de médiateur entre les opérateurs et leurs clients, à travers les réponses qu’elle apporte aux courriers des consommateurs et les actions de concertation conduites avec leurs associations. Mais, au-delà même du nouveau cadre européen, la nécessité d’une procédure plus formalisée se fait de plus en plus sentir face :
Les modalités pratiques d'institution de telles procédures doivent à l’évidence faire l’objet d’une réflexion complémentaire, et notamment afin de savoir quel serait l’organisme le plus compétent et le mieux adapté pour assurer cette fonction (ART, instances chargées de l’application du droit de la consommation, médiateurs municipaux et départementaux, commissions de surendettement etc.). En tout état de cause, et quel que soit l’organisme qui en est chargé, des moyens suffisants devront lui être alloués pour assumer efficacement sa mission. II. La convergence, facteur d'évolution de la régulation Prenant en compte la convergence technologique des réseaux, les nouvelles directives " Cadre " et " Autorisation " prévoient un régime commun pour l'ensemble de ces réseaux et pour la fourniture de services sur ces réseaux, quelles que soient les technologies utilisées (fixe ou mobile, filaire, hertzienne ou par satellite, réseaux câblés etc.). Ces dispositions, qui ne s'appliquent pas aux contenus, régis par une régulation spécifique, vont conduire à une adaptation des réglementations nationales, qui en l'état comportent des dispositions distinctes et hétérogènes dans les domaines des télécommunications et de l'audiovisuel. En effet, dès lors que les différents supports et technologies se font concurrence pour véhiculer de mêmes contenus, il est essentiel, pour éviter des distorsions, d'assurer une cohérence des schémas d'autorisation et des droits et obligations associés au cadre d'activité des différents acteurs et de la régulation économique. Cette harmonisation concerne particulièrement les conditions d'attribution des ressources nécessaires à ces activités, et notamment les fréquences. C’est pourquoi l’application du nouveau cadre réglementaire européen, la prise en compte des évolutions technologiques ainsi que des difficultés rencontrées dans l’application du cadre actuel, notamment pour les réseaux câblés, rendent aujourd’hui indispensable l’harmonisation du régime juridique applicable à l'ensemble des réseaux de communications électroniques. Il faut à cet égard rappeler que si la distinction entre " correspondance privée " et " communication publique " peut être pertinente pour la régulation des contenus, elle ne l’est plus pour la régulation des réseaux, qui doit reposer sur une approche économique. En conséquence, les prestataires techniques ne doivent pas être considérés comme responsables des contenus transportés ou hébergés, comme l’Autorité a déjà eu l’occasion de le souligner dans son avis sur le projet de loi sur la société de l’information, en mai 2001. Leur définition appelle des échanges et des débats qui devront trouver leur aboutissement au Parlement, notamment à l'occasion de la transposition des nouvelles directives communautaires. A titre de contribution à cette réflexion, l'Autorité suggère que l’harmonisation du régime juridique des réseaux repose sur deux principes :
Une telle distinction permettrait de séparer la régulation des contenus de celle des contenants et d’homogénéiser la régulation des contenants. Ainsi, le métier de transporteur / diffuseur serait soumis à la régulation des contenants et la régulation de l’accès des éditeurs et des distributeurs aux réseaux des transporteurs / diffuseurs serait rattachée à celle de l’accès aux réseaux, issue du droit des télécommunications. La régulation des contenants devra également s’intéresser aux systèmes d’accès conditionnels, dont la problématique est très proche de celle de l’accès aux réseaux, définie par les directives européennes. Enfin, dans ce nouveau contexte, le domaine des services en ligne appellera une attention particulière, compte tenu des perspectives importantes qu'il présente en termes de croissance, sous l'impulsion notamment du passage au multimédia. Les réseaux câblés requièrent clairement des adaptations du cadre actuel. Aujourd'hui, les différentes catégories de réseaux desservant des abonnés finals se voient appliquer des régimes juridiques distincts :
Les réseaux câblés sont ainsi soumis à un double régime juridique, en tant que réseau de diffusion de services audiovisuels et en tant que réseau destiné à fournir des services de télécommunications. En outre, la délivrance d’autorisation d’un réseau câblé par la commune ou le groupement de communes se fait souvent dans le cadre d’une concession qui prévoit un bien de retour à la commune à son échéance. Cette situation peut dissuader le câblo-opérateur d'investir dans la mise à niveau de son réseau en vue de fournir des accès Internet à haut débit, compte tenu du niveau élevé des investissements à engager. Ce mode d'attribution commune par commune a conduit à des réseaux très dispersés pour le même opérateur, ce qui paraît nuire à l'efficacité et à la production d'économies d'échelle en rapport avec les investissements à réaliser, en particulier pour l'exploitation et la commercialisation de nouveaux services (Internet à haut débit, téléphonie). Par ailleurs, il faut noter que les conditions d’accès au domaine public sont plus favorables pour les réseaux de télécommunications, alors que les conditions financières d'usage de la composante particulière qu'est le spectre hertzien sont au contraire beaucoup plus avantageuses pour les réseaux audiovisuels. Cette situation complexe ne permet pas d’assurer un traitement juridique équitable et technologiquement neutre entre réseaux. Elle est surtout particulièrement préjudiciable à certains réseaux câblés, qui devraient être un support privilégié pour le développement des services de communications en ligne, notamment à haut débit. Il paraît donc nécessaire, ainsi que l’Autorité l’a déjà souligné dans ses réponses à la consultation publique sur la société de l’information et sur le projet de loi sur la société de l’information, d’aligner le régime juridique applicable aux réseaux câblés sur celui des réseaux de télécommunications. Au demeurant, cette harmonisation est rendue nécessaire par la nouvelle directive relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques. Par ailleurs, la fourniture de services audiovisuels sur un réseau de communications électroniques s’accompagne aujourd’hui d’un certain nombre de contraintes, comme en témoigne l’exemple des réseaux câblés. Ainsi aujourd’hui, l’exploitation de ces réseaux, c’est-à-dire la fourniture de services audiovisuels sur ces réseaux, est autorisée par le CSA sur proposition des communes et donne lieu à une convention avec le CSA. Ce régime comporte des obligations spécifiques imposées au distributeur pour les services diffusés sur ses réseaux (quotas, nombre minimum de services en propre, etc.). Un tel régime paraît relativement contraignant, en particulier dans la perspective où il serait étendu à l’ensemble des réseaux de communications électroniques. Il risquerait alors de limiter les perspectives de développement pour les opérateurs haut débit et, partant, la fourniture de nouveaux services (de type accès à des bases vidéo, vidéo à la demande sur DSL). En particulier, on peut supposer que des applications du type audiovisuel seront un jour un facteur important du développement du haut débit. Il ne faudrait pas que les initiatives en la matière, et donc le développement du haut débit, soient freinées par une réglementation trop stricte et mal adaptée. Il semblerait donc préférable d’appliquer ces contraintes aux seuls éditeurs de contenus, le distributeur étant alors tenu de prévoir dans ses contrats avec les éditeurs des clauses les obligeant à respecter la législation en vigueur. 3. L'harmonisation nécessaire du régime des fréquences L’harmonisation du régime juridique des réseaux hertziens est également souhaitable et au demeurant inéluctable. Sa mise en œuvre concrète soulève toutefois certaines difficultés, car la fourniture d’un service faisant appel à des fréquences hertziennes doit parfois répondre à des exigences qui sont à la croisée de la régulation du contenant et du contenu, en raison de la rareté des fréquences et du lien direct qui est établi vers l’abonné. Si l’harmonisation est nécessaire pour l’ensemble de ces questions, afin d’assurer un traitement équitable et technologiquement neutre des réseaux, ainsi qu’une gestion efficace des fréquences, plusieurs cas doivent être distingués, dans le cadre d’une approche pragmatique :
Aujourd’hui, l’Autorité est affectataire de ces fréquences et les attribue aux chaînes de télévision et aux stations de radio. Pour établir un système cohérent, il est nécessaire d’intégrer les réseaux de transport audiovisuel dans le régime général des réseaux et d’attribuer les fréquences non plus aux éditeurs, mais aux transporteurs ;
Il paraît souhaitable, afin de résoudre un certain nombre de difficultés actuelles, d’intégrer ces réseaux dans le régime général des réseaux de communications électroniques. Au demeurant, les services correspondants ne sont pas porteurs d’enjeux en terme de contenu et il semble que cette intégration puisse se faire sans difficulté majeure ;
Ils sont à la croisée de la régulation des contenants et des contenus. Ainsi, les fréquences de diffusion sonore et télévisuelles sont-elle aujourd’hui attribuées directement aux stations de radios et chaînes de télévision, c’est-à-dire aux éditeurs et diffuseurs de contenus, et non aux transporteurs. En outre, ces réseaux sont aujourd’hui soumis à des régimes variables, selon les catégories de réseaux (par exemple, les réseaux par satellites pour des services audiovisuels ne nécessitent pas d’autorisation), ce qui plaide pour des solutions pragmatiques et progressives. Selon les cas, deux schémas, non exclusifs l’un de l’autre, pourraient être appliqués, qui consisteraient :
Dans les deux cas, le réseau serait soumis à la régulation des contenants. Les modalités pratiques de mise en œuvre de ces schémas, qui sont détaillés dans le rapport de l’Autorité sur l’adaptation de la régulation, font apparaître plusieurs options possibles dans chacun des cas. Une réflexion complémentaire avec l’ensemble des autorités compétentes sera nécessaire pour déterminer les solutions les plus adaptées.
Il sera enfin nécessaire d’harmoniser le régime de redevances associées aux fréquences pour le secteur des télécommunications et de l'audiovisuel, compte tenu du caractère de plus en plus substituable des services. En effet en France aujourd’hui, l’usage de fréquences de télécommunications est généralement associé à des redevances, alors que celui de fréquences de l’audiovisuel en est exempté. L'existence de charges de service public incombant à certains organismes de radiodiffusion ne paraît pas à elle seule susceptible de justifier le maintien d'une différence aussi importante que celle qui sépare la tarification systématique de la gratuité généralisée, dans la mesure notamment où les opérateurs de télécommunications sont eux-mêmes assujettis à des obligations opérationnelles et financières relevant de l'intérêt général voire du service public, comme l'acheminement gratuit des appels d'urgence ou la participation au financement du service universel. 4. Le développement des services en ligne Le développement des services en ligne, à partir des réseaux fixes et mobiles, présente un potentiel important de croissance pour les opérateurs, générateur de nouveaux usages pour les abonnés. Cette problématique tient naturellement une part importante dans la réflexion du l'adaptation de la régulation ; elle mêle en effet des domaines régulés et des domaines non régulés dont la frontière gagnerait à être définie, ce que le projet de loi sur la société de l'information avait d'ailleurs esquissé. Ces services en ligne regroupent en effet trois catégories : des services de télécommunications s'inscrivant dans le régime du respect des correspondances (envoi de messages), des services qui tout en s'appuyant sur des services de télécommunications supportent des contenus destinés à la communication au public, et des services de nature mixte faisant à la fois intervenir des contenus destinés au public et de la correspondance privée (commerce électronique). Certains de ses services relèvent par nature de la régulation audiovisuelle, notamment en ce qu'ils comportent des problématiques de sauvegarde du pluralisme de l'expression. En tout état de cause, une distinction claire est nécessaire entre l'accès et le contenu : si les services en ligne peuvent pour partie relever de la régulation des contenus, les services d'accès aux communications doivent naturellement relever de la régulation des contenants qui trouve corps dans le code des postes et télécommunications. III. Le marché des mobiles et l'UMTS Au cours des cinq dernières années, le marché des services mobiles a été l’un des moteurs essentiels de la croissance du marché européen des télécommunications. L’harmonisation européenne a constitué un puissant facteur de développement pour ce marché. Cette dimension doit être prise en compte pour assurer le succès de l’UMTS. Le marché des mobiles est ouvert à la concurrence en France depuis 1987. Il a connu un développement exceptionnel au cours des 10 dernières années, au point de devenir aujourd’hui un besoin quasi-universel. En 7 ans, entre fin 1994 et fin 2001, le taux d’équipement est passé de 1,3 % à 61,6 % dans notre pays. Le nombre de lignes mobiles a dépassé celui des lignes fixes en 2001, pour atteindre près de 37 millions en fin d’année. Ce succès est très largement le résultat d’un processus engagé au niveau européen. L’adoption d’une norme européenne unique, le GSM, grâce à une étroite collaboration entre les opérateurs et les constructeurs de matériels, a en effet largement contribué à faire de l’Europe le premier marché mondial du téléphone mobile. Le marché des services mobiles a très largement évolué en l’espace de dix ans. A l’origine analogique et réservé à un public restreint, le téléphone mobile touche aujourd’hui un très large public, grâce à la concurrence, qui a permis une baisse des tarifs très importante et une diversification des formules. Forfaits et cartes prépayées sont aujourd’hui les deux formules qui se partagent le marché, pratiquement à égalité. Les services eux-mêmes se sont très fortement développés. A côté du service de la voix, on a vu apparaître et se développer des services de données, notamment à travers le succès des messages courts (SMS). Les services plus élaborés, de type " Internet mobile ", connaissent un développement plus progressif. L’échec du protocole Wap démontre la nécessité de disposer d’une technologie et d’un modèle économique adaptés à ces nouveaux services. C’est un enjeu essentiel pour la mise en œuvre des nouvelles technologies mobiles (GPRS et UMTS) en cours d’introduction sur le marché. 2. Les enseignements du processus d'introduction de l’UMTS A cet égard, l’introduction de l’UMTS en Europe s’effectue aujourd’hui dans un contexte difficile, en raison de plusieurs facteurs. D’abord, le calendrier fixé par l’Union européenne pour l’introduction de cette technologie s’est révélé trop ambitieux par rapport aux contraintes techniques et économiques liées à la maturation de l’UMTS. Ensuite, l’absence d’harmonisation qui a caractérisé le processus dans les différents Etats membres a conduit à d’importantes disparités dans les procédures de sélection des opérateurs. On observe ainsi une répartition à peu près équivalente entre les pays qui ont choisi les enchères et ceux qui ont eu recours à la soumission comparative. Ces disparités ont eu pour conséquence une charge financière excessive, qui a largement contribué au retournement des marchés financiers, ainsi qu’à l’endettement actuel des principaux opérateurs européens. Il peut être noté à titre illustratif que ce prélèvement, d'environ 100 milliards d'euros pour l'ensemble des opérateurs en Europe, représente les commandes d'une année sur le marché des équipements. Le dossier de l’UMTS illustre ainsi la nécessité d’une harmonisation européenne renforcée, notamment dans le domaine de la gestion des fréquences. Le nouveau cadre européen a tiré les enseignements de cette situation puisque la décision " Spectre radioélectrique ", adoptée le 7 mars 2002, pose les bases d’une politique communautaire harmonisée en matière de gestion des fréquences. La décision établit en effet un cadre d’orientation et un cadre juridique communautaire en matière de spectre radioélectrique. Elle a pour objectif d’assurer une coordination des politiques en la matière et, le cas échéant, l’harmonisation des conditions relatives à la disponibilité et à l’utilisation efficace du spectre nécessaire au bon fonctionnement du marché européen des télécommunications. Le cheminement tourmenté de l’introduction de la troisième génération en Europe, rapproché notamment du succès fulgurant de l’i-mode au Japon, montre aussi l’importance des enjeux de la normalisation des équipements de réseaux et des terminaux, gage d’interopérabilité et de commodité pour le consommateur. De manière générale, il souligne également la nécessité d’une approche de l’innovation qui privilégie la prise en compte des attentes et des besoins des consommateurs et non pas l’exaltation en tant que telle des potentialités d’une nouvelle technologie. Si le service universel n'est pas fondamentalement modifié dans sa définition par la nouvelle directive européenne qui y est consacrée, des évolutions sont toutefois susceptibles d'intervenir dans sa traduction concrète. En effet, les modalités de mise en application des principes du service universel tel qu’établi par la loi de 1996 sont aujourd'hui fragilisées, voire rendues inadaptées, par plusieurs éléments récents. En premier lieu, le dispositif en place a été partiellement mis en cause par un arrêt de la Cour de Justice des Communautés européennes du 6 décembre 2001 condamnant la France pour non-respect des dispositions communautaires en ce qui concerne les modalités de calcul des contributions au service universel, notamment pour ne pas avoir pris en compte les avantages induits de la fourniture du service universel par un opérateur, notion effectivement absente du décret relatif au service universel. Cet arrêt conduit également à une nécessaire régularisation, actuellement en cours, des sommes indûment versées par les opérateurs au titre des contributions au service universel depuis 1997. Par ailleurs, le poids du service universel dans le trafic Internet conduit, de la part des fournisseurs d'accès, à une remise en cause répétée du mode de calcul des contributions, actuellement établi sur la base du volume de trafic, ce qui conduit effectivement à renchérir in fine le coût des services Internet. C’est pourquoi l’Autorité a eu l’occasion à plusieurs reprises de souligner, publiquement et auprès des autorités compétentes, la nécessité de revoir la base de calcul des contributions au service universel, afin que celles-ci s’appuient sur le chiffre d’affaires (hors interconnexion) et non plus sur le volume de trafic. Une telle mesure pourrait rééquilibrer les charges afin qu’elles pèsent de manière significativement moindre sur le développement d’Internet. Enfin, le périmètre lui-même, dont la définition relève des pouvoirs publics aux niveaux européen et national, n'est pas sans susciter des débats : l'achèvement de la couverture du territoire en téléphonie mobile, la plus large diffusion de l'Internet à haut débit sont des questions dont certains appellent une révision de la définition actuelle, parfois jugée " dépassée " au regard du développement de nouvelles technologies. Il convient toutefois de garder à l'esprit que le service universel tel que défini à l'origine visait notamment à garantir l'accessibilité sur l'ensemble du territoire et à un prix abordable du service téléphonique, service dont à l'époque la quasi-totalité des foyers disposait ; s'agissant de la téléphonie mobile, la question est d'achever la couverture du territoire dans les zones non desservies ; en ce qui concerne le haut débit, l'objectif est tout autre dès lors qu'il s'agit de technologies encore peu déployées à ce stade. En outre, la définition du service universel retenue dans la directive récemment adoptée exclut cet élargissement, bien qu'elle puisse à l'avenir être modifiée, ce qui sera sans doute nécessaire. En l'état actuel des textes cependant, un financement par un fonds de service universel ne peut constituer une réponse à cette question, qui relèverait dès lors davantage d'autres initiatives publiques, notamment à l'échelon local. V. L'aménagement du territoire et l'intervention des collectivités territoriales L'implication des collectivités territoriales dans le secteur des télécommunications revêt des enjeux particulièrement importants dans un contexte de difficultés de financement pour les nouveaux opérateurs et de croissance des besoins pour les collectivités et les utilisateurs. Il apparaît ainsi de plus en plus clairement que certaines zones du territoire auront des difficultés à attirer les opérateurs, et que d'autres ne pourront être couvertes par eux, dans un contexte économique et financier difficile, que moyennant des partenariats aux formes diversifiées avec les collectivités. Deux approches simultanées ont été mises en œuvre par les pouvoirs publics pour tenir compte de cette problématique. La première a été initiée lors du Comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 9 juillet 2001, par lequel le Gouvernement a engagé un plan d’action pour achever la couverture du territoire en téléphonie mobile en 3 ans, ainsi que la mise en place d'un dispositif de soutien public à l'investissement des collectivités territoriales afin de généraliser l’accès à Internet à haut débit en France. De manière complémentaire, l’article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, dans sa nouvelle rédaction issue de la loi du 17 juillet 2001, a représenté un progrès significatif en ce qu’il reconnaît désormais pleinement la légitimité des interventions des collectivités à des fins d’aménagement du territoire, dans le respect des principes de la concurrence. Les débats qui ont entouré la rédaction d’un projet de circulaire d’application ont toutefois mis en lumière les difficultés de mise en œuvre du dispositif, notamment lorsqu’il s’agit d’établir une frontière entre " réseaux de télécommunications " et " infrastructures passives ". De toute évidence, et pour permettre aux collectivités d’apporter une contribution significative au développement des technologies de l’information et de la communication, il est indispensable de sortir de ce débat qui se heurte à des difficultés techniques insurmontables. Dès lors, sans doute faut-il s’attacher à établir un cadre adapté aux différentes formes que pourrait prendre l’intervention des collectivités territoriales. Cela pourrait passer par une refonte du cadre établi par l’article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, sur la base d’une distinction plus nette entre le rôle qu’elles peuvent jouer auprès des opérateurs pour favoriser financièrement leur installation sur leur territoire et leur rôle éventuel en matière d’établissement, voire d’exploitation, de réseaux de télécommunications, étant entendu qu’elles ne pourraient cumuler ces deux types d’intervention sur une même zone géographique. Dans le premier cas, un cadre juridique clair pourrait être établi afin de déterminer les conditions dans lesquelles les collectivités peuvent apporter une contribution au déploiement des opérateurs sur leur territoire, par voie de subvention. Afin de respecter les principes de la concurrence, établis au niveau européen, il sera vraisemblablement nécessaire de définir les zones sur lesquelles cette intervention se justifie. Dans le second cas, il s’agirait de revenir sur l’interdiction faite aux collectivités d’exercer l’activité d’opérateur. Une telle évolution peut se justifier par les exigences d’aménagement du territoire au regard de la réalité du marché. Il apparaît aujourd’hui clairement que, même avec une aide des collectivités territoriales, certaines zones du territoire ne pourront être desservies par les opérateurs dans des conditions de rentabilité suffisante. Il pourrait donc être envisagé d’autoriser les collectivités qui le souhaitent, sous certaines conditions et dans les zones les moins desservies, à établir et à exploiter elles-mêmes un réseau de télécommunications. Deux solutions sont possibles pour ce faire : soit permettre aux collectivités d’être opérateur sous le régime d’autorisation générale du code des postes et télécommunications qui découlera nécessairement de la transposition à venir des directives, soit prévoir un régime d’autorisation spécifique, inscrit dans le code général des collectivités territoriales, ce qui serait cohérent avec la finalité d’aménagement du territoire contenue dans cette démarche. L’autorisation des collectivités territoriales devra naturellement être assortie d’un ensemble de conditions relatives aux zones couvertes, à la situation de l’offre des opérateurs etc., afin de déterminer les critères d’une intervention compatible avec l’exercice de la concurrence. Une telle mesure permettrait en outre de résoudre les difficultés juridiques liées à la fourniture de services de télécommunications par les communes sur les réseaux câblés dont elles assurent la gestion commerciale, directement ou par délégation, en leur offrant une alternative possible à la cession de ces réseaux. Par ailleurs, l’intervention des collectivités appelle, de par son importance et sa complexité, une démarche d’accompagnement et de suivi prenant en compte l’ensemble des aspects juridiques et économiques, en accord avec les enjeux de régulation concurrentielle du secteur. L’Autorité estime nécessaire que ce suivi soit organisé selon des modalités qui permettent de prendre en compte le plus en amont possible et de façon cohérente l’ensemble de ces questions. Cela induit assurément une implication forte du régulateur et un renforcement de sa coopération opérationnelle avec les collectivités et les échelons déconcentrés de l’Etat. Cette implication sera encore plus indispensable dans le cas où les collectivités sont autorisées à être opérateur de télécommunications. En effet, l’arrivée de nouveaux types d’acteurs, comme les collectivités, ne doit pas conduire à affaiblir la portée de la régulation. VI. Les principes de l’organisation de la régulation Si les objectifs assignés par la loi à la régulation demeurent très largement pertinents, les modalités de sa mise en œuvre méritent sans doute une adaptation, dans le sens d’une simplification et d’une clarification des responsabilités. Le principe d’une distinction plus nette entre les missions de définition des orientations de la politique publique d'une part, à travers la législation et la réglementation, et les missions de régulation d'autre part, c’est-à-dire d’application de ces orientations, pourrait être retenu comme ligne directrice pour améliorer et simplifier le dispositif actuel. L’application de ce principe devrait conduire sous l'égide du Parlement à une clarification des responsabilités respectives du Gouvernement et de l’Autorité. Le partage des compétences de régulation institué par la loi de 1996 ne favorise pas la lisibilité ni l’efficacité du dispositif. La transposition du nouveau cadre européen pourrait ainsi être l’occasion de confier au régulateur des compétences de plein exercice dans tous les domaines qui relèvent de ses missions, et en particulier la régulation économique. Ce nouveau dispositif justifierait en particulier un renforcement du rôle du Parlement à l’égard de l’Autorité. C’est dans le cadre de ce contrôle parlementaire renforcé que le gouvernement devrait avoir la possibilité de formuler auprès des instances parlementaires compétentes ses souhaits quant aux orientations qu’il reviendrait au régulateur de mettre en œuvre, par exemple au travers d'un débat parlementaire à échéance régulière. Dans ce contexte, le rapport annuel d'activité de l'Autorité pourrait avoir vocation, en plus de son objet actuel, à rendre compte plus particulièrement de la mise en œuvre des orientations définies par le Gouvernement. Dans ce cadre, des relations renforcées pourraient se mettre en place entre le régulateur et les commissions parlementaires ainsi qu’avec la CSSPPT, dont la composition et l'expérience sont susceptibles de lui donner une vocation naturelle à jouer un rôle important dans l'organisation de ce processus périodique d'orientation générale et d'évaluation de la régulation. Ce dispositif trouverait naturellement sa place en complément du dialogue régulier et étroit entre le régulateur et le Gouvernement sur un certain nombre de questions essentielles relevant de la politique publique (service universel, politique tarifaire, décisions structurantes). La dimension internationale de la régulation constitue également un facteur d'évolution important : outre les relations avec les institutions européennes qui auront vocation à se renforcer dans le futur cadre réglementaire issu des directives récemment adoptées, l'Autorité aura à cœur de poursuivre et de renforcer les actions de coopération déjà initiées par l'établissement de liens directs avec ses homologues étrangères ainsi qu'avec les organisations régionales ou internationales. Des moyens humains et financiers adaptés seront aussi nécessaires pour faire face à ces multiples évolutions. Il faut rappeler que l’Autorité dispose actuellement de moyens inférieurs à la plupart de ses homologues européens, à périmètre équivalent. Enfin, les évolutions économiques et réglementaires en cours auront sans doute un impact sur le fonctionnement et l’organisation de l’Autorité. Celle-ci devra s’y préparer, dans le prolongement naturel de la réflexion qu'elle avait décidé d'entreprendre dès le début de l'année 2002 en vue de cerner les impacts potentiels sur ses missions des évolutions du cadre communautaire et du contexte économique et technologique du secteur des télécommunications. Annexe : le bilan de cinq ans de régulation Installée le 5 janvier 1997 pour veiller à l’établissement d’une concurrence effective dans le secteur des télécommunications, l’Autorité a adopté, au cours de ses cinq années d’existence, plus de 5000 décisions qui couvrent l’ensemble de ses domaines de compétences. Certaines d’entre elles se sont révélées particulièrement structurantes, et ce sur l’ensemble des segments du marché des télécommunications. Son action s’est caractérisée par une volonté de mettre en œuvre les objectifs de politique publique exprimés par le législateur dans la loi du 26 juillet 1996 : l’exercice d’une concurrence effective au bénéfice du consommateur ; la fourniture et le financement du service universel ; la croissance et la compétitivité de notre économie ; l’aménagement et la couverture du territoire par les réseaux de télécommunications. Elle s’est également employée à conduire cette action avec un souci de concertation permanent ; à cette fin elle a engagé de nombreuses consultations publiques et s’est efforcée de réunir les acteurs autour d’une table à chaque fois que les circonstances l’exigeaient. Au 1er janvier 1998, la concurrence n’était effective que sur le marché des mobiles, marché émergent en forte croissance, qui comptait 5,8 millions d’utilisateurs, soit un taux d’équipement de 10,5%. Le marché du téléphone fixe était encore sous monopole et ne s’est ouvert à la concurrence que progressivement avec la mise en œuvre, par étapes, de la sélection du transporteur. La concurrence avait été ouverte sur les infrastructures au 1er juillet 1996 et sept autorisations ont été délivrées entre cette date et le 1er janvier 1998. Quant à l’accès à Internet, il en était encore à ses premiers balbutiements et ne touchait que très marginalement le grand public, même si plusieurs fournisseurs d’accès étaient déjà présents sur ce marché. Enfin, si avant 1997, l'Etat avait, dans le cadre d'une organisation spécifique de ses services, préfiguré la mise en place d'une régulation indépendante dans le secteur des télécommunications, la création de l’Autorité, un an avant l’ouverture totale du marché des télécoms, a constitué une innovation importante dans la modernisation de l’intervention de l’Etat dans ce secteur, ouvrant par ailleurs la voie à la mise en place de structures similaires dans d’autres domaines. Aujourd’hui, la concurrence est devenue une réalité en France. Cela s’exprime à travers le nombre d’opérateurs présents sur le marché mais aussi à travers la part de marché prise par la concurrence : au 31 décembre 2001, 113 opérateurs étaient titulaires d’une licence, même si le mouvement de consolidation engagé en 2000 a conduit à une réduction du nombre des acteurs en 2001 (de 131 à 113). S’agissant des parts de marché, les situations sont différentes sur chaque segment.
La réalité de la concurrence et les effets tangibles pour le consommateur des principales décisions prises par l’Autorité peuvent s’apprécier sur l’ensemble des segments qui composent le marché des télécommunications. La concurrence sur le segment du téléphone fixe s’est mise en place en plusieurs étapes. Plusieurs décisions adoptées par l’Autorité ont ainsi établi les conditions techniques et tarifaires pour permettre aux nouveaux opérateurs de proposer leurs offres et de réduire leurs tarifs :
Evolution du nombre d’abonnés à la sélection et à la présélection du transporteur
Le nombre d’abonnés à la sélection et à la présélection du transporteur a augmenté de façon importante en 2001 : le nombre d’abonnements à la sélection appel par appel croît de 15,6% en un an. Quant au nombre d’abonnements à la présélection, il connaît une hausse de 88,1%. Le recours aux opérateurs alternatifs s’est ainsi accentué en 2001. Il convient en outre d’ajouter que le mouvement continu de baisse des tarifs d’interconnexion entre 1998 et 2001 a permis aux opérateurs de proposer à leurs clients des offres de plus en plus variées et attractives. 2. Les services à valeur ajoutée Les services vocaux dits " avancés " ou " à valeur ajoutée " peuvent être fournis soit par les opérateurs de boucle locale, soit par des mécanismes d’interconnexion ; ils recouvrent trois types principaux de services : les services gratuits pour l’appelant (ou "libre appel"), les services à coûts partagés entre l’appelant et l’appelé et les services à revenus partagés entre l’opérateur de télécommunication et le fournisseur de service. Ils consistent principalement en des services mis en œuvre par des entreprises ou des services administratifs, à destination du public, à des fins d’information, de renseignements ou dans un but marketing ou commercial. La fourniture de tels services par des opérateurs autres que France Télécom a été rendue possible par plusieurs actions de l’Autorité :
Le marché des mobiles est ouvert à la concurrence depuis 1987. Il a été marqué par plusieurs évolutions au cours des dix dernières années : En 1991 ont été délivrées les premières licences à la norme GSM, à France Télécom Mobiles et à SFR. L’arrivée, en 1994, du 3ème opérateur GSM, Bouygues Télécom, a conduit à l’exercice d’une véritable concurrence, à l’arrivée des forfaits et à la baisse des prix. En 7 ans, entre fin 1994 et fin 2001, le taux d’équipement est passé de 1,3 % à 61,6 %. Le nombre de lignes mobiles a dépassé celui des lignes fixes en 2001, pour atteindre près de 37 millions en fin d’année. Entre 1998 et 2001, la régulation des réseaux mobiles de GSM s’est concentrée sur les charges de terminaison d’appel des réseaux fixes vers les réseaux mobiles, composante principale du prix des appels fixe vers mobile. La désignation, par l’Autorité, de France Télécom Mobiles et de SFR comme opérateurs puissants sur le marché national de l’interconnexion à partir de 1999 oblige ces deux opérateurs à orienter leurs tarifs d’interconnexion vers les coûts, ce qui a eu pour effet direct :
Depuis l’origine, l’Autorité s’est impliquée très fortement dans la préparation de la troisième génération de services mobiles, l’UMTS. Elle s’est ainsi attachée à conduire son introduction en France, en application des prérogatives que la loi lui a confiées. A la suite d’un travail de concertation engagé début 1998, puis d’une consultation publique conduite en 1999, elle a retenu la méthode de la soumission comparative pour sélectionner les candidats. La dégradation du contexte financier et les montants parfois atteints, en Europe, pour le prix des licences, n’ont pas permis à la France d’attribuer les quatre licences disponibles lors du premier appel à candidatures, achevé le 31 mai 2001. Deux opérateurs, Orange et SFR, ont ainsi obtenu une licence dans un premier temps. A la suite de l’annonce, par le Gouvernement, d’un aménagement des conditions financières de l’UMTS à l’automne 2001 tenant compte des analyses conduites en la matière par l'Autorité, celle-ci a préparé un second appel à candidatures, lancé le 29 décembre 2001, pour la délivrance de deux licences. Au 16 mai 2002, date limite de remise des dossiers, seul Bouygues Télécom avait déposé sa candidature. Les résultats devront être publiés avant le 30 septembre 2002. Dans ce dossier, l’objectif de l’Autorité a été de maintenir le marché français dans le mouvement avec les meilleures conditions de départ et la meilleure visibilité possibles. Il n’y a pas aujourd’hui de retard du marché français de l’UMTS compte tenu des délais nécessaires au processus de normalisation en cours, qui devrait permettre le lancement de ce marché fin 2003, début 2004, en France comme dans le reste de l’Europe. L’action de l’Autorité a été inspirée par la volonté d’établir une réelle concurrence sur la troisième génération de services mobiles à la lumière des potentialités du marché français. Le dispositif mis en place est de nature à permettre à la France de jouer son rôle en Europe dans le développement de cette nouvelle technologie essentielle à la progression vers la société de l’information. L’accès à Internet en France représente :
Si le mot " Internet " ne figure pas dans la loi du 26 juillet 1996, il s’agit néanmoins d’un champ d’action quotidien pour le régulateur.
Avec 7 millions d’abonnés au 31 mars 2002, l’accès commuté représente, selon l’AFA, 90 % des abonnés résidentiels à Internet. La concurrence entre les fournisseurs d’accès est réelle sur le marché de l’accès à Internet par le réseau commuté. Elle a été favorisée et consolidée par l’action de l’Autorité, qui s’est également attachée à établir les conditions d’une concurrence effective entre les opérateurs, aujourd’hui présents sur le marché de la collecte du trafic d’accès à Internet. En 1999 ont été introduits les forfaits " tout compris " à la suite d’une concertation conduite par l’Autorité. Celle-ci a parallèlement établi les conditions d’une concurrence entre opérateurs sur le marché de la collecte du trafic Internet par l’introduction du modèle d’interconnexion indirecte, favorable au développement des forfaits. Cette offre a été inscrite au catalogue d’interconnexion de France Télécom en 2000. Enfin, France Télécom a proposé aux opérateurs, le 1er septembre 2001, une offre d’interconnexion forfaitaire permettant d’améliorer les conditions d’interconnexion pour le trafic d’accès à Internet. Une version améliorée de cette offre a été introduite, en novembre 2001, dans le catalogue d’interconnexion de France Télécom pour 2002. L’offre d’interconnexion forfaitaire disponible en France est aujourd’hui l’une des plus avantageuses en Europe. Elle a permis en particulier une baisse significative des coûts de collecte supportés par les fournisseurs d’accès à Internet. Les premiers effets concrets de l'interconnexion forfaitaire sont les suivants : pour les fournisseurs d'accès à Internet, l'interconnexion forfaitaire semble avoir constitué un levier important de baisse des coûts de collecte ; bien qu'ils n'aient pas traduit cette situation au travers d'offres illimitées pour l'internaute, cette baisse leur a permis de mieux rentabiliser leurs offres. Du point de vue des opérateurs, l'interconnexion forfaitaire requiert un engagement plus important ; certains opérateurs, non assurés d'atteindre les volumes nécessaires pour être en mesure de pratiquer des prix unitaires compétitifs sur le marché, ont réduit leur position.
L’accès à haut débit représente 734 500 abonnés résidentiels au 31 mars 2002, soit 10 % des abonnés résidentiels à Internet (source AFA). Le dispositif français repose sur l’établissement d’une concurrence entre opérateurs, ainsi que sur la diversité et la complémentarité des technologies. Ainsi, depuis quelques années, plusieurs technologies permettant aux utilisateurs d’accéder à Internet à haut débit se développent. Il s’agit notamment des réseaux câblés, de l’ADSL et de la boucle locale radio mais aussi des réseaux sans fil (technologies "Wi Fi") et du satellite. L’Autorité contribue à permettre leur déploiement. La boucle locale radio a vocation à permettre de fournir l’accès à Internet à haut débit dans un cadre local pour les PME et les collectivités territoriales ; à la suite de la procédure de sélection conduite par l’Autorité en 2000, la France est aujourd’hui un des rares pays où cette technologie se déploie effectivement, malgré les difficultés de la conjoncture. Des offres commerciales ont vu le jour dans une trentaine d’agglomérations. S’agissant de l’ADSL, technologie essentielle à la généralisation du haut débit, plusieurs offres sont en principe disponibles pour permettre le développement concurrentiel de ce marché : des offres aux fournisseurs d’accès, une offre intermédiaire aux opérateurs au niveau du réseau ATM, des offres de dégroupage au niveau de la paire de cuivre qui dessert le client. L’articulation entre ces différentes offres pour permettre à l’ensemble des acteurs d’intervenir dans des conditions économiques viables est un enjeu majeur pour le développement du haut débit en France. L’Autorité s’attache au travers de ses décisions à permettre une concurrence effective sur l’ensemble des segments de la chaîne de fourniture des services. Elle a rendu, le 30 avril 2002, un avis défavorable sur l’évolution des tarifs de l’offre faite par France Télécom aux fournisseurs d’accès (offre IP/ADSL), demandant à l’opérateur de modifier, préalablement à une baisse raisonnable des tarifs de cette offre, les conditions techniques et tarifaires de l’offre proposée aux opérateurs (ADSL-Connect-ATM), afin d’assurer la concurrence sur l’ensemble des segments de la chaîne. L’Autorité a été particulièrement active sur la préparation et la mise en œuvre du dégroupage. Elle a engagé, dès 1999, une consultation publique qui a permis d’en établir les enjeux et de définir les options possibles. Elle a ensuite réuni les acteurs au sein d’un groupe de travail chargé de préparer sa mise en œuvre, rendue possible par l’adaptation du cadre réglementaire à la fin de l’année 2000. Après une période d’expérimentations, le dégroupage est devenu opérationnel en septembre 2001, sur la base d’une offre de référence établie par France Télécom et modifiée par l’Autorité à plusieurs reprises. Environ 600 lignes avaient été dégroupées en avril 2002. Pour remédier aux difficultés encore observées, l’Autorité a engagé, début 2002, une nouvelle phase d’amélioration de l’offre de référence de France Télécom. C’est dans le cadre de cette démarche qu’elle a adopté, le 16 avril 2002, une décision modifiant l’offre de référence de France Télécom sur plusieurs points. Cette décision se traduit par :
France Télécom a proposé, le 14 juin 2002, une nouvelle offre de référence mettant en œuvre les modifications demandées par l’Autorité. Par ailleurs, les réseaux câblés représentent un tiers des abonnés à haut débit sur le marché résidentiel en 2001. Les réseaux câblés couvrent en France une part moins importante de la population que dans d’autres pays (par exemple aux Etats-Unis ou en Belgique), mais ils ont toute leur place dans le développement de la société de l’information. L’action de l’Autorité a largement contribué à rendre possible la fourniture d’Internet par le câble. Elle a en effet adopté, à l’été 1997, deux décisions qui ont permis l’adaptation technique des réseaux du plan câble pour la fourniture de services d’accès à Internet. En définitive, les dispositions prises pour favoriser l’accès à Internet en France conduisent à un développement parallèle de l’accès à haut et à bas débit. Cette situation pourrait constituer une spécificité du dispositif français dans la mesure où, chez nos principaux voisins européens, on observe plutôt la prééminence de l’un ou l’autre mode d’accès, mais rarement une progression conjointe des deux. Ces deux types d'offres s'avèrent en définitive complémentaires dans la mesure où l'utilisation d'une formule attractive à bas débit peut contribuer à amener vers Internet des catégories supplémentaires de personnes susceptibles de migrer ensuite vers le haut débit lorsque l'intensité de leur usage d'Internet le justifie. L’offre d’interconnexion de France Télécom – dont les principales prestations font l’objet d’une offre de référence, le catalogue approuvé chaque année par l’Autorité – a joué un rôle structurant. Cette offre a en effet été déterminante, tant du point de vue des coûts supportés par les nouveaux entrants que de leurs stratégies d’investissement et de déploiement de réseau. Les évolutions du catalogue d’interconnexion de France Télécom pour la période 1998-2001 ont été importantes : s’agissant des tarifs des prestations d’acheminement de trafic téléphonique, le prix moyen de la minute collectée ou terminée au niveau local a diminué de 37,6 % entre 1998 et 2001 ; le prix moyen de la minute collectée ou terminée au niveau régional en simple transit a connu une baisse de 46 %. En moyenne, les tarifs d’interconnexion pour le service téléphonique ont connu entre 1998 et 2001 une baisse de l’ordre de 40 %, qui s’est traduite dans l’évolution des prix de détail. Les tarifs d’interconnexion pour l’accès à Internet ont également enregistré des baisses importantes, notamment fin 1999 avec l’introduction d’un tarif de nuit et surtout fin 2001 avec la mise en œuvre d’une offre d’interconnexion forfaitaire. Le catalogue a également été enrichi, au fil des années, de nouvelles prestations (collecte pour compte de tiers pour les numéros spéciaux, interconnexion indirecte pour Internet, facturation pour compte de tiers, etc.). Concernant les prestations d’accès aux sites de France Télécom, les évolutions ont permis de baisser les factures des opérateurs correspondant à la colocalisation de leurs équipements ou à l’achat de liaisons de raccordement auprès de France Télécom. La structure du trafic d’interconnexion a aussi évolué sur la période 1998-2000 : en 1998 les opérateurs, pour la plupart interconnectés au niveau régional, ont principalement utilisé les services de simple et double transit ; par la suite, et progressivement, les opérateurs ont déployé leurs réseaux : l’interconnexion au niveau local (au niveau du commutateur d’abonnés) représentait ainsi en 2000 environ 20 % du trafic, contre 80 % pour le niveau régional (simple transit), le niveau national (double transit) représentant une part marginale du trafic. L’évolution de l’offre de France Télécom sur la période a ainsi permis de réduire les coûts des opérateurs par des baisses de tarifs et de favoriser l’investissement car le déploiement au niveau local s’est développé de façon significative. L’exercice de la concurrence s’est traduit par une baisse des prix proposés au consommateur sur l’ensemble des segments du marché des télécommunications.
Le mouvement de baisse des prix du téléphone, qui s'était initié avant l'ouverture à la concurrence et en anticipation de celle-ci s'est confirmé dans les années récentes, tant pour les ménages que pour les entreprises. Ainsi, sur la base de paniers de consommation(2) établis par l’Autorité, le prix des communications nationales (hors locales) de France Télécom a connu en 6 ans (1996-2001) une baisse de l’ordre de 60 %, pour les entreprises comme pour les ménages. Le prix des communications locales a quant à lui baissé de 11 % pour les ménages et de 14 % pour les entreprises. Et si au total, les baisses sur la facture moyenne n’ont été sensiblement que de 10 % et 28 % respectivement, c’est essentiellement en raison des décisions spécifiques relatives à la hausse du prix de l’abonnement de France Télécom, lequel est passé de 7,87 à 12,55 euros toutes taxes comprises pour les particuliers, conformément au rééquilibrage tarifaire auquel il devait être procédé. Les effets de la concurrence sur le niveau des prix peuvent également être examinés sur la période récente au cours de laquelle elle s'est plus particulièrement exercée ; ainsi, au cours des trois dernières années (1999-2001), le prix moyen des communications nationales (hors locales) a baissé de 26,8 % pour France Télécom et de 35,7 % pour les principaux concurrents de France Télécom.
Les tarifs des communications à partir d’un téléphone mobile ont très largement baissé entre début 1998 et début 1999 pour se stabiliser par la suite. Sur la base de la moyenne arithmétique des meilleures formules tarifaires des opérateurs mobiles, les tarifs des formules mobile ont connu des baisses importantes entre 1998 et 2001 pour les quatre paniers établis par l’Autorité. Les prix ont ainsi baissé :
Par ailleurs, l’action de l’Autorité a contribué à la baisse des tarifs fixe-mobile : une baisse de l’ordre de 40 % a été obtenue sur la période 1999-2000 ; une baisse de 40 % des tarifs d’interconnexion pour ces appels est programmée sur la période 2001-2004.
Jusqu'en 1999, l'usage d'Internet est resté faible. Pour la période à partir de laquelle l'essor est devenu significatif, le prix moyen de l’accès à Internet a fortement baissé. On constate ainsi entre janvier 1999 et décembre 2001 :
Pour les durées de communications courtes et moyennes, on assiste à une stabilisation à partir du printemps 2001. Les prix des communications longues ont très fortement baissé jusqu’au printemps 2001 pour augmenter légèrement à partir du second semestre 2001, en raison de la disparition des forfaits illimités. Conclusion : un marché en forte croissance Sous l’effet de la concurrence et du progrès des technologies, le marché des télécommunications connaît depuis trois ans une croissance à deux chiffres, en valeur comme en volume. Cette tendance s’est confirmée en 2001, malgré une conjoncture moins favorable. Internet et la téléphonie mobile sont les moteurs de cette croissance avec une forte hausse des recettes (respectivement 58,8 % et 26,8 % en 2001) et des volumes (113,8 % et 24,6 %).
Après l’euphorie de l’année 2000, 2001 a été marquée par un ralentissement de l’économie mondiale accentué à l’automne et amplifié par l’impact supplémentaire des attentats du 11 septembre sur les anticipations des industriels et de la sphère financière. Ce repli conjoncturel a particulièrement touché le secteur des NTIC, et ce dans un contexte économique incitant fortement au déstockage et au ralentissement des investissements de grande envergure. L’Europe a suivi ce mouvement. Globalement, la France est l’un des pays les moins touchés par la crise grâce à une consommation soutenue et une hausse du pouvoir d’achat des ménages. Cependant, le déstockage a été tout aussi brutal qu’ailleurs et les investissements ont cessé de progresser.
Le secteur des télécommunications s’est trouvé au centre de l’éclatement de la bulle spéculative de la mi-2000 et essuie en 2001 les contrecoups financiers de cette tourmente. Les montants atteints par le prix des licences UMTS dans certains pays européens ont également pesé sur la situation financière des opérateurs. Le secteur se consolide ; les acteurs modifient leurs stratégies de conquête de marchés, mettent davantage l’accent sur le rétablissement de leurs marges, et les investissements marquent un ralentissement. On pourrait légitimement s’attendre à un repli du chiffre d’affaires des services de télécommunications tant au niveau mondial qu’européen. La situation apparaît cependant contrastée. Les équipementiers, amenés à prévoir un recul des ventes, connaissent une période plus difficile que les opérateurs. Les difficultés ont diverses sources : les surcapacités installées et la chute des prix des nouveaux entrants entraînant des faillites, l’incapacité de certains nouveaux entrants à poursuivre le financement de leurs plans de développement, un endettement massif des grands opérateurs du fait d’acquisitions à une période où les marchés financiers attribuaient des valeurs excessives aux activités de télécommunications, l’attente de la maturité des applications des nouvelles technologies, et enfin un ralentissement sur la plupart des marchés européens de la croissance du taux de pénétration des mobiles.
En France, malgré ce contexte défavorable, le secteur des télécommunications reste en croissance, tant en valeur (+10,6%) qu’en volume (+23%), et tient une place centrale dans l’économie française. Plus de 1,5 % des dépenses de consommation des ménages sont consacrées aux services de télécommunications (chiffre qui a quasiment triplé en 30 ans). En volume, ces mêmes dépenses maintiennent une progression supérieure à 20 % par an depuis 1999 et montrent l’engouement des français pour les technologies de l’information et de la communication. L’investissement du secteur représente environ 2,6 % de l’investissement français sur la période, chiffre en retrait qui traduit une certaine maturité du secteur et qui est une conséquence directe de l’explosion des investissements en 2000. Le marché est une fois de plus porté par l’Internet et les mobiles. L’année 2002 devrait voir se confirmer ces tendances, même si un ralentissement de la croissance est vraisemblable. Par ailleurs, si l’emploi est globalement resté stable dans le secteur des services de télécommunications, celui-ci a été à l’origine de la création d'emplois nouveaux, et notamment d’emplois induits dans l’ensemble de l’économie. 1- Ces enquêtes ont porté sur trois marchés : la collecte de trafic commuté pour l'accès à Internet ; l'interconnexion ; les infrastructures de desserte en fibre optique. 2- Les paniers de consommation permettent d'évaluer l'évolution de la facture moyenne d'une catégorie donnée d'utilisateurs (abonnés résidentiels ou abonnés professionnels). Il s'agit d'une observation à structure et à niveau de consommation constants ; cela signifie que l'on ne prend en compte que l'effet prix et non l'effet volume. Seuls sont pris en compte l'abonnement au service téléphonique et les communications nationales les plus usuelles ; ne sont donc pas intégrées, en particulier : les communications internationales, les communications à destination de mobiles, les communications Télétel ou Audiotel. |