Réponse de l'Autorité de régulation
des télécommunications au Livre vert de la Commission
européenne sur la convergence des secteurs des télécommunications,
des médias et des technologies de l'information, et les implications pour la réglementation
/ Mai 1998
Le texte intégral de la réponse de l'Autorité en
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Le livre vert de la Commission
Européenne
Synthése de la réponse de l'Autorité : sommaire
- - Préambule
- Examen des composantes de la convergence
- - Définition de la convergence
- Les quatre niveaux de la convergence
Les technologies et les réseaux
Les usages
Les services
L'industrie
- - Les barrières à la convergence
- Impact de la convergence sur le cadre réglementaire
- Conclusion
- Préambule
- Observateur attentif des mutations technologiques
et responsable avec le gouvernement du développement harmonieux
du marché dans un environnement respectueux des règles
de la concurrence, l'Autorité estime être directement
concernée par le débat ouvert par ce Livre vert.
C'est pourquoi elle a souhaité y participer activement.
- Sa réponse est établie en concertation
étroite avec les acteurs, d'où un certain nombre
d'auditions par le Collège, ainsi que la réunion
conjointe et exceptionnelle des deux commissions consultatives
des télécommunications.
- La Commission européenne s'est intéressée
dès 1984 à la convergence supposée entre
les secteurs des télécommunications, de l'audiovisuel
et de l'informatique. Le Livre vert sur la convergence entre les
trois secteurs dont il est question ici est par conséquent
le prolongement naturel d'une réflexion ouverte il y a
une quinzaine d'années. L'intérêt de l'exercice
tient à la pertinence ou non de garder des régimes
réglementaires différents en fonction du degré
de rencontre, de convergence, entre les différents
secteurs.
- Si la réflexion sur la convergence n'est
pas nouvelle, il n'en demeure pas moins opportun de s'y intéresser
de près aujourd'hui, car l'Europe ne saurait se réveiller
avec une convergence en train de se faire et qu'elle
ne pourrait pas maîtriser. Par ailleurs, ce débat
est directement lié à celui sur la société
de l'information.
- Examen des composantes de la convergence
Définition de la convergence
- Une première réflexion
sur le phénomène de la convergence permet de mesurer
l'importance de la sémantique en la matière. De
quoi parle-t-on ?
- Le Livre vert définit la convergence
comme étant " la capacité de différentes
plates-formes à transporter des services essentiellement
similaires ". Ce peut être, par exemple, la téléphonie
vocale sur le Réseau téléphonique commuté
(RTC), sur le câble ou sur Internet, ou bien la visioconférence
sur le Réseau numérique à intégration de services
(RNIS), le câble ou Internet.
Cette assertion aurait également pu être
inversée, en définissant la convergence comme étant
la capacité de certaines plates-formes à transporter
des services différents. Par exemple le câble
comme vecteur de la télévision, du téléphone
et d'Internet, ou bien les ondes hertziennes comme vecteur de
la téléphonie vocale, de la télévision
et d'Internet.
- Or, le terme plate-forme pose un problème
de sémantique, car le Livre vert n'en donne pas de définition
: s'agit-il du réseau, des équipements de réseaux
(les commutateurs par exemple), des terminaux ou bien d'un élément
déterminé du réseau (le satellite par exemple)
?
Il est par conséquent délicat de tirer
des conclusions en termes de convergence, sans avoir
au préalable défini ce que l'on entend par plate-forme.
Pour cette raison la notion de réseau est privilégiée
dans le présent document.
- Doit-on parler de convergence - action
d'aboutir au même résultat, de tendre vers un but
commun -, ou de synergie - action coordonnée
de plusieurs organes, association de plusieurs facteurs qui concourent
à une action, à un effet unique; ou bien tout simplement
d'un dénominateur commun fourni par la technologie: protocoles
de dialogue (modèle OSI, protocole TCP/IP...), logiciels,
numérisation des réseaux, multiplexage, etc. ?
- La notion de marché doit être approfondie,
car la réalité de la convergence dans le marché
est une question forte à laquelle l'Autorité a cherché
à répondre. C'est en distinguant et en rapprochant
les services offerts par les acteurs économiques et les
usages correspondant à une demande effective des consommateurs
que l'on pourra parvenir à cerner l'évolution de
ce marché.
Les quatre niveaux de la convergence
Les technologies et les réseaux
La généralisation de réseaux
numériques ne suffit pas à susciter la convergence
- Le Livre vert souligne à juste titre l'importance
des changements survenus du fait de la numérisation des
réseaux et des techniques avancées de compression
et de transmission. Néanmoins, l'unicité de ces
réseaux et, a fortiori, leur intégration dans une
plate-forme unique, ne semblent pas aujourd'hui avérés.
En particulier, la disponibilité de services avancés
ne semble pas réellement assurée, en l'état
des techniques actuelles, sur l'ensemble du territoire.
En réalité, on assiste à une
évolution des réseaux préexistants vers des
performances accrues en termes de bande passante et au développement
de nouveaux supports (diffusion hertzienne numérique par
satellite ou voie terrestre, par exemple), sans que la nature
même de ces réseaux, c'est-à-dire leur spécialisation
dans l'un des secteurs concernés, en soit profondément
affectée.
Du point de vue technologique, la numérisation
des réseaux conduit effectivement à un certain rapprochement
des caractéristiques des infrastructures audiovisuelles
et de télécommunications; mais cela n'aboutit pas
pour autant, de manière systématique, à
l'unicité des réseaux, et à leur intégration
dans une plate-forme unique. Si les réseaux deviennent
effectivement polyvalents, ils n'en sont pas pour autant convergents.
Internet n'est pas à lui seul l'aboutissement
de la convergence
Le phénomène Internet (protocole TCP/IP),
auquel le Livre vert donne une importance déterminante,
peut donner l'illusion d'une unicité du réseau,
puisqu'il permet la fédération de réseaux
de nature différente acceptant tous le langage commun TCP/IP.
Mais il ne serait possible d'en déduire la convergence
des réseaux qu'à condition de faire d'Internet le
seul et unique mode de transmission des contenus des différents
secteurs concernés (audiovisuel, télécommunications,
données), ce qui est loin d'être assuré.
Les limites du protocole Internet sont déjà
sensibles et il est peu probable qu'il soit retenu pour certains
services face à des technologies beaucoup plus performantes
(numérique hertzien terrestre ou par satellite pour la
télévision, par exemple).
Les nouvelles technologies numériques ne
sont pas fédérées
- L'intégration des réseaux de communication
n'est pas un phénomène universel. Sur toutes les
composantes de ces réseaux les spécificités
d'origine restent encore très présentes. C'est le
cas pour différentes technologies, dont en particulier
l'ATM.
En effet, la technologie ATM n'a pas été
utilisée à une large échelle sur les réseaux
des opérateurs dès son apparition, car, si ses principes
techniques lui permettent théoriquement de fédérer
les réseaux spécialisés sur un réseau
unique, ses coûts de déploiement restent importants
en regard du marché potentiel.
En pratique, la mise en oeuvre, prudente, de l'ATM
par les opérateurs ne concerne que leurs coeurs de réseaux,
et ils l'utilisent essentiellement pour regrouper les flux provenant
de leurs réseaux spécialisés sur un moyen
de transport qui optimise l'utilisation de la bande passante.
Ce qui est vrai pour l'ATM l'est également pour le RNIS,
l'ADSL et le LMDS, notamment.
- Les caractéristiques des réseaux
de télécommunications semblent plutôt être
la complémentarité et la mixité, et s'il
est difficile aujourd'hui d'établir des pronostics quant
aux chances de succès de telle ou telle technologie, il
paraît encore plus incertain d'affirmer que la convergence
des réseaux est inéluctable.
D'une part, il existe bien des limites technologiques
à son expansion, par exemple celle de la largeur de la
bande passante en fonction de l'information que l'on veut transmettre.
D'autre part, les choix même des acteurs majeurs des secteurs
concernés semblent plutôt privilégier des
solutions spécifiques pour des types de services spécifiques.
- Enfin on peut noter que le développement
de la concurrence dans les télécommunications va
faire apparaître, au moins dans un premier temps, une gamme
variée de solutions et va conduire en fait à une
diversité en matière de réseaux.
Les usages : des usages nouveaux plutôt
que des usages convergents
- L'observation du marché
des télécommunications laisse apparaître
que la définition de la convergence qui est donnée
par le Livre vert est très générale, et que
par conséquent elle doit être précisée
pour refléter la réalité. Dans les trois
niveaux identifiés par le Livre vert (technologies et réseaux,
services et marchés, industrie), il apparaît utile
d'affiner le second, en distinguant bien les services,
offerts par les acteurs économiques, et les usages,
correspondant à la demande effective des consommateurs,
la combinaison des deux étant seule en mesure de caractériser
le marché.
- Une étude des usages actuels dans les différents
secteurs concernés par la convergence ne montre pas de
tendance forte à l'unification. Il y a certes des similitudes,
comme la navigation parmi une offre abondante de programmes et
d'informations, et même des cas de substituabilité
de services appartenant à deux secteurs différents
: le courrier électronique remplaçant l'appel téléphonique
et surtout la télécopie, ou les sites Internet spécialisés
(sport par exemple), concurrençant des émissions
de télévision.
- Mais dans la grande majorité des cas, chacun
des secteurs reste le seul moyen de répondre aux besoins
des consommateurs dans le domaine qui est sa spécialité.
Le fait que quelques utilisateurs bien équipés puissent
bénéficier de services Internet comportant des images
animées ne peut suffire à démontrer que la
télévision est disponible sur Internet.
- D'ailleurs, pour la presque totalité des
foyers, le téléviseur et l'ordinateur restent des
outils dédiés à des usages spécifiques
et non substituables, ne fût-ce que pour des raisons de
confort. Les tentatives de créer des terminaux intégrés
multi-usages n'ont pas connu jusqu'à présent de
suites prometteuses. Ceci n'interdit pas l'évolution des
produits offerts (ordinateur multimédia, télévision
intelligente, téléphone portable avec
capacité Internet...), mais il ne faut pas confondre l'apparition
de services évolués dans chacun des domaines (télévision
interactive, ordinateur portable Internet...) avec une convergence
qui reste très théorique.
- La multiplicité de l'offre de services
proposés se traduit en réalité par des usages
nouveaux, qui n'en sont pas moins proches d'usages préexistants.
Si l'abondance de l'offre de services de communication, qui caractérise
le passage à l'ère de la société
de l'information, induit une relative proximité des
usages, elle ne se traduit pas par l'émergence de terminaux
uniques multi-applications, mais plutôt par une diversification
des terminaux, qui restent spécialisés dans une
fonction.
Les services
Une convergence à sens unique
- Il est encore prématuré d'affirmer
que les développements observés conduiront à
la convergence entre audiovisuel, télécommunications
et informatique. En effet, les réalisations qui ont dépassé
le stade de l'expérimentation concernent essentiellement
un seul des aspects de la convergence : l'offre de services de
télécommunications sur des supports audiovisuels.
Il s'agit de la fourniture d'accès à Internet sur
le câble et, bientôt, sur les satellites à
large bande et, à plus long terme, du développement
du commerce électronique sur ces supports.
A cet égard, il apparaît que le câble,
par les capacités de bande passante qu'il offre immédiatement,
sera le vecteur d'une pénétration de services de
télécommunications dans les foyers, d'ailleurs encouragée
par les pouvoirs publics (le câble est, avec les technologies
hertziennes, l'une des possibilités d'introduction de la
concurrence sur la boucle locale).
- En revanche, la diffusion de services audiovisuels
sur les réseaux de télécommunications rencontre
des obstacles du point de vue de l'usage et elle ne constitue
pas une stratégie prioritaire pour les acteurs du marché.
D'autant plus que ces services n'atteignent pas aujourd'hui le
degré de qualité qui les rendrait concurrentiels
par rapport à la télévision classique.
Des bouquets de services diversifiés
plutôt que de nouveaux services
- En offrant tant des
services de télécommunications que des services
audiovisuels, les opérateurs, au sens large, peuvent d'une
manière ou d'une autre, tenter d'aborder le client par
l'intermédiaire d'un guichet unique, ce qui
concrétise plus une recherche de valeur ajoutée
que l'apparition de nouveaux services.
- On assiste de ce fait à une multiplication,
à une diversification et à un enrichissement réciproque
des services proposés, dont le transport peut se faire,
pour certains d'entre eux, de manière indifférenciée,
quel que soit le type de contenant.
- Cette éclosion de nouveaux services sera
dans bien des cas le fait de nouvelles entreprises sachant marier
des technologies voisines; il est important que l'Europe sache
créer l'environnement favorable à la naissance et
au développement de telles entreprises innovantes.
L'industrie
Une disparité entre les secteurs
- Une étude des dix premières entreprises
de chacun des secteurs considérés fait apparaître
une très forte domination des entreprises opérant
dans les secteurs des télécommunications et de l'informatique.
Une faible diversification
- L'examen des stratégies des acteurs industriels
et des opérations récentes de concentration et d'alliances
entre groupes des différents secteurs (audiovisuel, télécommunications,
informatique) montre que ces dernières se déroulent
le plus souvent à l'intérieur de chaque secteur
(recherche de la taille critique ou intégration verticale),
et que la diversification des groupes n'a ni la même ampleur,
ni la même nature dans chacun des secteurs concernés.
Le recentrage sur les métiers de base est, particulièrement
dans les télécommunications, une stratégie
fréquemment constatée.
Diversification stratégique plutôt
que convergence
- Malgré les apparences, la convergence
annoncée entre les différents secteurs semble davantage
motivée par des préoccupations de meilleure gestion
que par une poussée irrésistible du marché.
Des offres diversifiées de plus en plus nombreuses permettent
en effet d'assurer des économies d'échelle, de mutualiser
et de rentabiliser les équipements, et de fidéliser
le client en lui proposant l'abonnement à différents
services.
- On remarque également que lorsque les groupes
ont des activités dans plusieurs domaines, celles-ci sont
généralement filialisées et que les synergies
attendues ne conduisent que rarement à une offre de produits
convergents . Or, le Livre vert faisait
de l'intégration verticale annoncée l'une des conditions
de l'avènement de la convergence.
- Il faut également souligner que le discours
sur la convergence est un instrument utilisé
par les entreprises en vue d'économies d'échelle
et de synergies commerciales et financières. Loin de favoriser
une convergence des métiers, cette démarche vise
à assurer une meilleure maîtrise des accès,
c'est-à-dire du client final, car ce sont les acteurs qui
maîtrisent cet accès, notamment en disposant d'un
réseau, qui bénéficieront les premiers du
développement du nouveau marché. Il s'agit ici davantage
d'une stratégie de croissance que d'un phénomène
nouveau.
- Les barrières à la convergence
Des barrières réglementaires
très relatives
- Tous les obstacles à la convergence
ne sont pas d'ordre réglementaire, et, comme on l'a vu
ci-dessus, les freins aux développements des nouvelles
technologies de l'information et de la communication sont d'abord
générés par des spécificités
techniques et technologiques, par des spécificités
propres aux usages, et enfin par des spécificités
propres aux marchés concernés.
- Le Livre vert semble sur ce point éluder
le problème, en ce sens qu'il pose pour principe que la
convergence est bénéfique, et que tout ce qui y
fait obstacle doit être supprimé, sans s'interroger
sur les raisons qui peuvent justifier l'existence de telle ou
telle réglementation. Des législations légitimes,
éventuellement spécifiques à un Etat, doivent
pouvoir demeurer applicables, quelle que soit l'évolution
technologique.
L'impact de la réglementation sur le marché
doit être précisé, en mettant l'accent sur
le rôle décisif des règles de concurrence
- Le Livre vert souligne que c'est dans les conditions
de l'accès au marché que la réglementation
peut constituer un obstacle à la convergence, les différents
secteurs n'ayant pas les mêmes régimes. Si l'on peut
souscrire à cette approche, il convient toutefois de préciser
que les obstacles considérés ici par le Livre vert
sont des freins au développement du marché et non
des obstacles à la convergence. Il y a par
conséquent un risque de confusion dans le débat.
Certains obstacles au développement du marché (et
non à la convergence) doivent être, dans cet esprit,
identifiés et levés comme tels.
- L'accès au réseau et en particulier
à la boucle locale, tout comme la question des ressources
rares, constituent à cet égard des enjeux majeurs
pour le développement de la concurrence. Ce sont là
des préoccupations importantes pour l'Autorité.
Le risque est en effet de voir perdurer ou émerger des
positions dominantes de la part d'opérateurs susceptibles
de contrôler les goulets d'étranglement pour accéder
aux consommateurs. Le régulateur est par conséquent
appelé à jouer un rôle toujours aussi important
dans ce domaine, et l'application de règles de la concurrence
adaptées restera le meilleur moyen d'assurer le développement
harmonieux du marché.
La nécessaire prise en compte des incertitudes
du marché par un cadre réglementaire stable
- L'absence de maturité du marché des
nouvelles technologies de l'information et de la communication
peut difficilement être imputé à des freins
de type réglementaire. Par contre, on peut recenser un
certain nombre d'obstacles objectifs que rencontrent
les industriels.
Il s'agit, en particulier:
- des incertitudes liées aux évolutions
technologiques, qui affectent l'offre,
- des incertitudes liées aux évolutions
des usages, qui affectent la demande.
- Ces deux types d'incertitudes apparaissent comme
étant largement plus contraignantes pour un entrepreneur
que les incertitudes de type réglementaire. Et ce peut
être précisément l'objet d'une réglementation
sectorielle que de fixer un cadre stable, permettant, dans une
phase transitoire, de limiter les incertitudes.
- Impact de la convergence sur le cadre réglementaire
Des règles claires et stables
- La stabilité est un impératif dans
cette réflexion. L'ouverture du marché des télécommunications
à la pleine concurrence est toute récente. Il paraît
par conséquent inopportun de changer les règles
du jeu, alors même que les autorités de régulation
ont un rôle majeur à jouer dans un marché
en train de se structurer.
Une distinction fondamentale: communication publique
et correspondance privée
- La convergence technologique, ou plutôt
le développement de l'interopérabilité des
réseaux, pose un défi majeur à ceux qui sont
en charge de réglementer et de réguler les différents
secteurs: pourquoi réglementer de façon différente
des services similaires offerts sur des réseaux différents
?
- Rien ne permet d'affirmer que la distinction fondamentale,
qui est forte en France, entre les télécommunications
- qui relèvent de la correspondance privée - et
la diffusion audiovisuelle - qui consiste en une communication
publique - soit remise en cause par la convergence. Il n'y a en
effet que très peu de cas qui puissent susciter un doute
sur la qualification des services, et rien n'interdit au régulateur
ou au juge de trancher chaque fois les situations litigieuses.
La réglementation des services de télécommunications
assure le secret de la correspondance, tandis que la communication
audiovisuelle est soumise à une régulation du contenu
destinée à préserver l'intérêt
général (liberté d'opinion, pluralisme et
protection de l'individu). L'analyse montre que l'existence de
deux réglementations différentes (correspondance
privée / communication publique) ne s'oppose nullement
à ce que certains réseaux soient susceptibles de
véhiculer en même temps ces deux types de services.
- Eu égard à ce principe fondamental,
l'existence d'un régulateur unique dans chaque Etat ne
serait pas un facteur de rationalisation.
Vers une régulation des services disjointe
de celle des infrastructures
- Si la nature intrinsèque des contenus n'est
pas affectée par la convergence, la distinction entre communications
privées et diffusion publique restant valable, en revanche,
la distinction juridique actuelle entre les réseaux de
télécommunications et les réseaux de diffusion
audiovisuelle fondée sur le type de services transportés
deviendra de plus en plus artificielle.
- Cette évolution pose clairement la question
d'une unification du cadre réglementaire applicable aux
différents réseaux. L'Autorité estime que,
dans cette hypothèse, c'est la mise en uvre des principes
de concurrence qui devrait servir de référence
à la réforme.
- La polyvalence à
laquelle les réseaux devraient bientôt parvenir appelle
une réglementation des services disjointe de celle des
infrastructures. Un service donné devra continuer à
être réglementé en fonction de la catégorie
juridique dont il relève (selon la distinction correspondance
privée / communication publique), quelle que soit l'infrastructure
utilisée pour l'offrir, le réseau étant et
devant rester neutre.
- L'organisation générale du cadre
réglementaire ne ferait plus dépendre un service
du réseau qui le véhicule. Cette évolution
permettrait ainsi de distinguer plus nettement les contenus et
les contenants, la réglementation des réseaux étant
alors basée sur une régulation économique.
Le cas particulier d'Internet
- Internet est présenté par le Livre
vert comme un exemple de convergence, car, selon lui, un même
réseau est susceptible de transporter tous types d'informations
(voix, données, images fixes ou animées), que celles-ci
aient un caractère privé ou public.
- Internet propose en fait des services, tant audiovisuels
que de télécommunications; ces services pourraient
se voir appliquer les deux types de régulation des contenus
(correspondance privée / communication publique) décrits
ci-dessus.
- Conclusion
- La convergence est souvent utilisée
comme un concept autour duquel les opérateurs et les industriels
peuvent organiser de manière plus cohérente leur
attaque du marché et leur stratégie
(la convergence étant alors un objectif pour ces acteurs).
De manière similaire, la maîtrise de l'accès
à l'information et à la communication devient, sur
le plan mondial, un enjeu de pouvoir majeur. Les technologies
de l'information et des communications sont devenues le champ
d'une concurrence très dure. L'Europe doit par conséquent
relever ce défi qui sera un gage de son développement
futur.
- Néanmoins, la réalité du
phénomène global de convergence tarde à se
concrétiser en termes d'offres faites au public, et, surtout,
l'évolution des comportements de ce dernier n'apparaît
pas significative.
- Il appartient pourtant aux autorités
publiques de préparer l'avenir et, comme le souhaite la
Commission européenne, d'encourager l'essor de la société
de l'information A cette fin, il faut souligner que la distinction
actuelle entre, d'une part, les réseaux et les services
de télécommunications, et, d'autre part, les réseaux
et les services audiovisuels, a tendance à s'estomper.
Si une réforme s'avère donc nécessaire, il
conviendrait de lui fixer comme objectif une régulation
distinguant le contenu des contenants. Ceci nécessiterait
de rapprocher les différentes réglementations qui
sont applicables aux contenants.
- En ce qui concerne les services, la régulation
devrait, dans ces conditions, se focaliser sur la distinction
fondée sur leur caractéristique juridique, selon
qu'ils relèvent de la correspondance privée et ou
de la communication publique. Quant aux services mixtes
que l'on peut trouver sur Internet, ils pourraient relever, selon
l'usage que l'émetteur prévoit de faire des contenus,
de l'un ou l'autre régime.
- En conclusion, l'Autorité de régulation
des télécommunications considère que la première
option proposée par la Commission européenne, suggérant
une évolution des structures juridiques existantes, est
la mieux adaptée à l'évolution du marché
des télécommunications en France.
- Elle souligne enfin l'intérêt qu'il
y a à se concentrer sur l'analyse et le traitement des
problèmes concrets de convergence qui se posent, comme,
par exemple, les services de télécommunications
sur le câble ou la téléphonie sur Internet.
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