L’Arcep adopte de nouvelles décisions dans le cadre des analyses des marchés du haut et du très haut débit fixe après réception des observations de la Commission européenne
Ces décisions sont l'aboutissement d'un cycle de travail de plus d'un an, rythmé par des échanges avec les opérateurs, l'avis de l'Autorité de la concurrence et les observations de la Commission européenne, dont l’Autorité a tenu compte. L’Arcep remercie l’ensemble des acteurs ayant contribué aux différentes phases de leur élaboration, notamment lors des consultations publiques.
Ces décisions définissent, d’une part, la régulation dite "asymétrique" - c'est-à-dire s'appliquant uniquement à l'opérateur puissant Orange - des marchés du haut et du très haut débit fixe pour les prochaines années (2021-2023), à savoir :
- un marché séparé du génie civil ;
- le marché « 3a » des offres passives ;
- le marché « 3b » des offres activées généralistes et
- le marché « 4 » des offres activées spécifiques entreprises
D’autre part, l’Autorité adopte également une décision visant à compléter le cadre de régulation « symétrique » de la fibre (applicable à l’ensemble des opérateurs exploitant des réseaux FttH), ainsi qu’une recommandation apportant des précisions quant à l’application de ce cadre. La décision a été transmise au Gouvernement pour être homologuée afin d’entrer en vigueur.
Enfin, l’Autorité adopte une décision fixant un encadrement tarifaire de l’accès à la boucle locale cuivre d’Orange pour les années 2021 à 2023. Cette décision complétant les décisions relatives aux marchés « 3a » et « 3b » a également fait l'objet d’une consultation publique et d'une notification à la Commission européenne.
Les évolutions de la régulation, pour la période 2021-2023 par rapport au cycle précédent, portent sur trois objectifs clés, identifiés par l’Arcep et développés ci-après : accompagner la bascule du réseau historique de cuivre vers la fibre, poursuivre la régulation pro-investissement pour faire de cette dernière la nouvelle infrastructure fixe de référence et dynamiser le marché entreprises.
Maintenir une régulation pro-investissement pour faire de la fibre la nouvelle infrastructure fixe de référence
La fibre, en tant que nouvelle infrastructure qui va équiper l’ensemble du territoire pour les prochaines décennies, constitue l’enjeu majeur de ce nouveau cycle de régulation. Les déploiements des réseaux de fibre optique sont un chantier inédit par son ampleur et aussi par sa forme, qui allie investissement des opérateurs, initiatives des territoires et solidarité de l’État. La régulation y joue un rôle central pour assurer les bonnes incitations et permettre au marché d’apporter toute sa puissance d’investissement. L’action pro-investissement de l’Arcep a ainsi eu un rôle de catalyseur du marché au cours des dernières années, avec une hausse, unique en Europe, de près de 50 % de l’investissement en cinq ans, se traduisant en 2019 sur la fibre par un rythme inédit de +4,8 millions de lignes déployées en un an par les opérateurs d’infrastructure, et dans le même temps un accroissement de +7,3 millions des lignes où au moins trois opérateurs commerciaux sont présents au point de mutualisation. Le cycle de régulation 2017-2020 avait pour objet de permettre à l’ensemble des opérateurs de participer à l’effort d’investissement, là où Orange était trop seul. Cet objectif est désormais atteint. La dynamique du FttH se retrouve également sur le marché de détail, avec plus de 40 % des locaux couverts par le FttH ayant effectivement souscrit à un abonnement, et une progression exceptionnelle au troisième trimestre 2020 avec près d’un million d’abonnés au FttH supplémentaires. L’Arcep tient une nouvelle fois à saluer les efforts des opérateurs pour maintenir un haut niveau d’ambition durant cette année 2020 marquée par la crise sanitaire.
L’Autorité constate que la dynamique concurrentielle est aujourd’hui présente sur le marché de la fibre. Pour asseoir durablement cette dynamique, elle propose une consolidation de la régulation « symétrique » de la fibre optique, s’appliquant à tous les opérateurs. L’enjeu est désormais de faire jouer pleinement à la fibre son rôle de prochaine infrastructure fixe de référence, pour créer les conditions d’une substitution totale, à terme, du réseau historique en cuivre par la fibre. L’Arcep impose en particulier des garanties de qualité de service de la fibre à tous les opérateurs, afin que la technologie tienne toutes ses promesses, partout en France, pour tous les utilisateurs, particuliers comme professionnels.
Accompagner la bascule du réseau historique de cuivre vers la fibre, dans la perspective d’une substitution totale d’ici dix ans
La perspective est désormais celle d’une substitution totale, d’ici dix ans, du réseau historique en cuivre par la fibre. L’Arcep se félicite de la mobilisation d’Orange pour ce chantier inédit de la bascule du cuivre. Au sein des pouvoirs publics, l’Arcep entend jouer un rôle de garant de cette bascule, pour qu’elle se fasse à bon rythme, tant au niveau de l’intérêt des utilisateurs que du jeu concurrentiel. Aucun utilisateur ne doit être laissé de côté et la crise du Covid-19 a confirmé s’il en était besoin combien la fibre constituait un horizon indispensable.
A l’issue des consultations, l’Arcep confirme ses propositions initiales, consistant à accompagner la fermeture du réseau cuivre par Orange et dans ce cadre à inciter les opérateurs à basculer vers la fibre quand celle-ci est disponible, dans le respect d’une approche non-discriminatoire et en offrant de la visibilité. L’Arcep ouvre en particulier la possibilité d’une fermeture commerciale anticipée du cuivre, en amont de la fermeture technique, et en précise les conditions. Orange a ainsi d’ores et déjà indiqué qu’il procéderait à de premières fermetures commerciales sur son réseau cuivre en 2021.
Ces conditions sont posées alors qu’au-delà de ces premières fermetures commerciales, le projet d’Orange doit encore largement être précisé. L’Arcep ne dispose en effet pas encore de la part d'Orange d’un calendrier précis de fermeture et des modalités associées. L’Arcep invite ainsi l’opérateur historique à donner dans les meilleurs délais de la visibilité sur son programme de fermeture. Sur la base d’un plan précis, l’Autorité pourra examiner de possibles adaptations complémentaires, comme des réductions de délais. Dans un objectif d’incitation, l’Arcep a également introduit au sein de l’encadrement tarifaire du dégroupage une clause de révision permettant d’ajuster le niveau du tarif à la hausse si le futur plan présente des garanties d’un programme et d’un calendrier de fermeture ambitieux.
Pour la détermination de cet encadrement tarifaire, l’Arcep s’est pour la première fois appuyée pleinement sur la modélisation d’un réseau de boucle locale mutualisée pour prendre en compte la transition technologique vers le très haut débit. Du fait de l’accélération du vidage du réseau cuivre, la méthode utilisée précédemment, s’appuyant sur la comptabilité réglementaire, ne permettait plus de donner un signal tarifaire stable et prévisible. L’Autorité a donc fait le choix de s’appuyer, pour le présent encadrement tarifaire, sur la modélisation qu’elle a développée, qui permet d’introduire dans les tarifs un signal de long terme à même d’accompagner cette bascule.
Apporter la fibre aux entreprises et en faire un marché véritablement concurrentiel
Les offres à destination des entreprises constituent un autre enjeu majeur. Il s’agit de démocratiser la fibre optique pour les PME, à la fois en permettant des offres moins onéreuses, et en diversifiant l’éventail de qualité de service pouvant être offert. Cela passe, pour les accès généralistes comme pour les accès spécifiques de haute qualité, par un marché de gros d’offres activées dynamique, qui puisse s’appuyer sur plusieurs offreurs et laisse sa place à un modèle d’opérateur uniquement de gros (modèle dit « wholesale only »), au bénéfice d’un large écosystème d’opérateurs d’entreprises.
Le développement d’un tel marché concurrentiel des offres de gros activées sur le réseau FttH a progressé, avec un taux de disponibilité de ces offres passant de 11 % en 2017 à près de 88 % au second trimestre 2020, mais n’est pas encore acquis ; l’Autorité poursuit ainsi son action pour favoriser son développement. Elle impose sur l’ensemble des réseaux FttH la mise en place d’offres passives avec qualité de service renforcée (garanties de temps de rétablissement de 10h et 4h), pour garantir à chaque entreprise, quelle que soit sa localisation sur le territoire, la disponibilité d’une offre sur fibre adaptée à ses besoins, ainsi que d’ajuster davantage la régulation des réseaux fibre historiques (boucle locale optique dédiée – BLOD) pour tenir compte de l’émergence progressive de ces offres qualité de service renforcée sur réseau FttH.
L’Autorité s’attache dès à présent à la bonne mise en œuvre des décisions adoptées et accompagnera à cet effet l’ensemble des acteurs concernés. Elle sera en particulier attentive aux travaux sur la préparation de fermeture du cuivre, notamment au sein des groupes de travail qu’elle anime.
Pour aller plus loin
Les analyses de marché de l'Arcep, un processus approfondi de consultation du secteur, engagé depuis plus d'un an :
- publication d'un document de "bilan et perspectives" (1) ;
- une première consultation publique sur des projets de décisions asymétriques et symétrique (2) ;
- avis de l'Autorité de la concurrence (3) ;
- une seconde consultation publique sur les projets de décisions asymétriques et symétrique (4) ;
- une consultation publique sur le projet de décision d’encadrement tarifaire (5) ;
- observations de la Commission européenne sur les projets de décision « asymétriques » (6), « symétrique » (7) et sur la décision d’encadrement tarifaire (8).
(1) Communiqué du 11 juillet 2019.
(2) Communiqué du 6 février 2020
(3) Avis n° 20-A-07 du 15 septembre 2020 (pdf - 564Ko)
(4) Communiqué du 7 juillet 2020
(5) Communiqué du 11 septembre 2020