D’ici fin 2019[1], le stock d’adresses IPv4 disponibles sera épuisé, et internet « cessera de grandir » : le RIPE-NCC, le registre régional d'adresses IP qui alloue les adresses IPv4 pour l'Europe et le Moyen-Orient, a annoncé que le nombre d’adresses IPv4 en attente d'attribution est supérieur au nombre d’adresses IPv4 restantes. Cette pénurie entraîne d’ores et déjà une augmentation significative du prix de ces adresses sur le marché secondaire, engendrant une barrière à l’entrée à l’encontre des nouveaux acteurs sur l’internet. Enjeu de compétitivité et d’innovation, la migration de tous les acteurs de l’internet vers le protocole IPv6 est désormais urgente.
L’Arcep met en ligne une version élargie de son baromètre de la transition vers IPv6 qui signale un retard de la majeure partie des acteurs
Le baromètre de la transition vers IPv6 passe au crible tous les acteurs de la chaîne internet et la progression de leur transition vers IPv6. Il présente notamment l’état actuel des déploiements et les prévisions des principaux opérateurs pour les réseaux fixes comme mobiles.
Plusieurs nouveautés sont à noter cette année : la collecte d’informations a été élargie aux opérateurs ayant entre 5 000 et 3 millions de clients grand public et des chiffres exclusifs issus d’acteurs tiers partenaires, comme l’Afnic [2], complètent le baromètre.
Cette année encore, l’Arcep alerte sur le fait que la majeure partie des acteurs n’envisagent pas un déploiement qui permettrait de répondre à la pénurie d’IPv4 et invite l’ensemble de l’écosystème d’internet à accélérer leur transition vers IPv6, seule solution pérenne.
Sur le réseau fixe, en ce qui concerne les principaux opérateurs télécom en France, l’Arcep constate des progrès mais appelle les opérateurs à poursuivre et renforcer leurs efforts. Leurs prévisions de déploiements demeurent notamment insuffisantes pour faire face à la pénurie d’adresses IPv4. Sur le réseau mobile, malgré leurs efforts, l’Arcep alerte sur le retard des opérateurs dans le déploiement d’IPv6 et les appelle à prendre les mesures nécessaires pour répondre à la pénurie d’IPv4.
Une synthèse des résultats, par opérateur, est à retrouver à la fin de ce communiqué.
Du côté des hébergeurs, le retard est toujours aussi marqué. Seuls 15,5% des trois millions et demi de sites web des noms de domaine .fr, .re, .pm, .yt, .tf et .wf sont à ce jour accessibles en IPv6 [3]. Le taux d’hébergement mail est alarmant avec seulement 5,8% des serveurs mail accessibles en IPv6.
Première réunion de la « task-force » dédiée à IPv6, mise en place par l’Arcep, en partenariat avec l’Internet Society France
La « task-force » dédiée à IPv6, dont la réunion de lancement s'est tenue aujourd’hui, est ouverte à l’ensemble des acteurs de l’écosystème internet (opérateurs, hébergeurs, entreprises, secteur public, etc.). Elle a pour objectif de favoriser l’accélération de la transition vers IPv6 en permettant aux participants d’aborder des problèmes spécifiques et de partager les bonnes pratiques. Elle se réunira deux fois par an.
Lors de cette première réunion, les participants ont échangé autour de deux sessions d’ateliers : l’impact de la pénurie d’IPv4 et les enjeux de sécurité d’IPv6. Ces différents ateliers ont été précédés par des interventions du RIPE-NCC et de l’ANSSI.
Si vous souhaitez contribuer à la transition vers IPv6, inscrivez-vous à la task-force.
État actuel des déploiements IPv6 et les prévisions des principaux opérateurs pour les réseaux fixes et mobiles – Synthèse des résultats
Sur le réseau fixe :
• 100% des clients SFR sont déjà compatibles IPv6 sur le xDSL, 60% en FttH et 0% sur le câble. Des progrès sur l’activation en FttH sont à noter, même si le nombre de clients activés, c’est-à-dire qui émettent et reçoivent effectivement en IPv6, reste très faible (moins de 7% des clients toutes technologies confondues). Les activations à venir demeurent également insuffisantes (entre 25% et 35% à mi-2020 et entre 45% et 55% à mi-2022). Une grande majorité des clients n’activant pas IPv6 manuellement, SFR est encouragé à réaliser cette activation par défaut comme la plupart des autres opérateurs.
• Les efforts de déploiement de Bouygues Telecom sont observés (environ 20% de clients activés à mi-2019 contre 2,5% à mi-2018) bien que la compatibilité en IPv6 reste très faible. Les prévisions demeurent également très insuffisantes (entre 50% et 60% à mi-2022) pour faire face à la pénurie. Bouygues Telecom est encouragé à augmenter le nombre de clients IPv6-ready et à poursuivre les efforts de déploiement d’IPv6 sur leur réseau fixe.
• Les taux actuels de clients activés de Free et d’Orange sont relativement élevés (environ respectivement 80% et 68%) et ont progressé. Les projections à mi-2022 sont encourageantes (100% pour Free et entre 85% et 95% pour Orange) mais la pénurie rend nécessaire une accélération de la transition encore plus prononcée.
• L’Arcep se félicite que Free ait déployé un nouveau firmware sur la très grande majorité de ses box en mai 2019 et supprimé la possibilité de désactiver IPv6, augmentant ainsi significativement l’utilisation d’IPv6 en France.
• Les quatre opérateurs sont invités à proposer de l’IPv6 sur leurs offres entreprises et à entamer au plus vite la transition sur la 4G fixe.
Sur le réseau mobile :
• Bouygues Telecom poursuit ses efforts de déploiement sur les réseaux mobiles, avec 79% de clients Android activés.
• Les prévisions d’Orange sur Android sont à noter (entre 15% et 25% à mi-2020 et entre 45% et 55% à mi-2022), même si l’opérateur est invité à augmenter le nombre de terminaux dans lesquels IPv6 est activé.
• Bouygues Telecom et Orange ont mené un déploiement remarquable sur les iPhone en septembre 2019 (respectivement 68% et 30% fin octobre 2019).
• Malgré les efforts prévus par SFR pour 2022, le déploiement planifié reste, selon l’Autorité, insuffisant en termes d’objectif et de rythme.
• Il est particulièrement regrettable que Free Mobile n’ait pas été en mesure de transmettre des prévisions.
• Les opérateurs sont invités à entamer le déploiement d’IPv6 sur l’intégralité de leurs offres, notamment « data uniquement » et entreprises.
[2] Association française pour le nommage Internet en coopération
[3] Données AFNIC à septembre 2019