Selon nos informations, l'Arcep lance le 27 novembre une consultation publique visant à prolonger de deux ans, jusqu'à fin 2020, la durée de son analyse du marché de gros des services de diffusion hertzienne terrestre. L'autorité de régulation des télécommunications, qui avait évoqué en juin dernier un possible retrait sur ce secteur, revient sur sa décision et réaffirme sa volonté de réguler ex ante, au-delà du 17 décembre 2018, ce marché sur lequel évoluent l'opérateur historique TDF et l'opérateur alternatif towerCast, propriété de NRJ Group (Satellifax du 26 octobre).
Les contributions à cette consultation publique doivent être transmises au plus tard le 12 décembre. L'Arcep a aussi sollicité les avis du CSA et de l'Autorité de la concurrence, a précisé son président Sébastien Soriano, interrogé par Satellifax. Ces avis arriveront à la même période.
La mise en œuvre de cette analyse nécessitera d'avoir l’aval de la Commission européenne, pourtant plutôt favorable à la dérégulation du marché de gros de la TNT. Cette décision devrait intervenir avant les élections européennes de mai 2019.
"Un pavé dans la mare"
L'ouverture de cette consultation publique intervient alors que l'Arcep, dans un "bilan et perspectives" soumis à consultation en juin dernier, envisageait de ne pas reconduire pour un cinquième cycle la régulation du marché de gros de la TNT. Cette décision s'appuyait notamment sur deux constats : le développement de l'IPTV qui dépasse la TNT depuis début 2017 et l'augmentation du nombre d’accès à haut et très haut débit, soutenu par le plan France Très haut débit lancé en février 2013. A l'issue de cette consultation, l'ensemble des acteurs s'étaient unanimement prononcés contre l'arrêt de la régulation.
"Les orientations que nous avions sorties en juin ont jeté un pavé dans la mare et nous sommes conscients que nos propos ont été considérés comme agressifs. Nous prenons acte du caractère brutal que pouvait représenter notre dérégulation immédiate et nous revenons au point de départ", explique Sébastien Soriano, à Satellifax soulignant la volonté de l'Arcep d'envoyer les bons signaux pour accompagner les transitions technologiques et de les inscrire dans un tempo adapté.
Si l'avenir proche sur la plateforme TNT n'est pas à la concurrence en termes de diffusion, l'Arcep ne se désintéresse pas pour autant de l'audiovisuel. Dans un avis en date du 2 octobre, elle a fait état auprès de l'Autorité de la concurrence d'une série de propositions visant à accompagner les évolutions de la distribution de ce secteur. "Ces propositions sont très larges pour ne pas être dans un face à face réducteur entre l'audiovisuel et les télécoms," indique-t-il.
Pour une proposition du gouvernement sur l'avenir de la TNT
Cette réflexion sur l'évolution de la régulation s'inscrit, de plus, dans un double contexte technique et politique. En mai, l'Arcep s'était appuyée sur des plans du gouvernement pour considérer qu'en 2020, tous les Français bénéficieraient d'un débit à 8 Mbits/s, qu'il avait estimé suffisant pour se passer de la TNT. "Nous avons pris acte des contributions de plusieurs acteurs, notamment du CSA et de TDF, qui estimaient que ce débit serait peut-être suffisant pour une chaîne en haute définition mais pas pour un usage multi écrans au sein du foyer", note Sébastien Soriano. Et d'ajouter : "Nous avons alors estimé que l'échéance de 2022, qui correspond à un objectif du gouvernement de passer à un débit de 30 Mbits/s, sera plus confortable".
L'Arcep a aussi tenu compte de la période d'incertitude qui s'ouvre pour les acteurs en raison de la réforme de la loi sur l'audiovisuel, qui doit être menée en 2019. "C'est au politique de savoir quel type de modernisation de la TNT, il souhaite mettre en place. Pour le moment, nous avons uniquement sur la table une proposition du CSA (Satellifax du 23 février). Il nous semble que l'avenir de la TNT est une politique industrielle et mériterait une proposition du gouvernement, comme cela a toujours été le cas pour les changements de norme", explique le président de l'Arcep. "En ce moment, nous sommes dans une phase de prise de conscience et de réflexion du politique. L'extinction de la TNT n'est pas programmée mais il faut voir comment penser l'avenir de la diffusion audiovisuelle et comment amener internet et la télévision à tout le monde", ajoute-t-il.
Compte tenu des objectifs du plan France Très Haut Débit, ou des objectifs européens qui visent à fournir un débit d'au moins 100 Mbits/s par foyer en 2025, "il y a une marche forte des réseaux télécoms pour aller vers une couverture élevée du territoire", rappelle Sébastien Soriano.