Paris, le 25 juillet 2006
L'Autorité met en consultation publique son projet de décision relatif aux niveaux de terminaison d’appel mobile en métropole pour 2007 et le notifie à la Commission Européenne : les baisses proposées sont conformes à l’annonce faite par l’Autorité fin 2004 d’une baisse de l’ordre de 50% sur 3 ans
Ces baisses devraient constituer un transfert de l’ordre de 200 millions d’euros sur la seule année 2007 des opérateurs mobiles aux opérateurs fixes et in fine à leurs clients.
- L’Autorité fixe les niveaux de terminaison d’appel voix des opérateurs mobiles métropolitains pour l’année 2007
L’Autorité a adopté fin 2004 les décisions d’analyse des marchés de gros de la terminaison d’appel (TA) vocal sur chacun des réseaux des trois opérateurs mobiles métropolitains. Dans ses décisions, l’Autorité avait désigné Orange France, SFR et Bouygues Télécom comme puissants sur le marché de leur terminaison d’appel mobile vocale et leur avait imposé à ce titre une baisse importante de leurs tarifs de gros.
Pour rappel, la baisse des tarifs de gros en 2005 était de 16,3% pour Orange France et SFR, et de 17,3% pour Bouygues Telecom. La baisse de ces tarifs était de 24% pour les trois opérateurs en 2006.
L’Autorité avait annoncé qu’une troisième baisse des terminaisons d’appel vocal aurait lieu pour le 1er janvier 2007, dont les niveaux seraient déterminés au plus tard fin septembre 2006. L’objet du projet de décision aujourd’hui mis en consultation publique et notifié à la Commission européenne est de définir l'encadrement tarifaire des tarifs de terminaisons d’appel vocal pour l'année 2007 de SFR, Orange France, et Bouygues Télécom.
L’Autorité impose un prix moyen de la terminaison d’appel " intra-ZA " au plus égal sur l’année 2007 :
- à 7,5 c€/min pour Orange France et SFR,
- à 9,24 c€/min pour Bouygues Télécom.
La baisse relative du prix moyen de terminaison d’appel sera donc d’environ 21%, pour Orange France et SFR, et d’environ 18%, pour Bouygues Télécom, s’inscrivant dans la continuité de celles imposées en 2005 et en 2006.
| Charge de terminaison d’appel d’origine nationale | |||
2004 | 2005 | 2006 | 2007 | |
Orange/SFR | 14,94 | 12,50 | 9,50 | 7,50 |
Bouygues Télécom | 17,89 | 14,79 | 11,24 | 9,24 |
(*) profil de consommation 75% heures pleines et 25% heures creuses sur la prestation " intra-ZA "
- Ces tarifs de gros sont justifiés au regard des éléments dont l’Autorité dispose et des objectifs qu’elle poursuit
L’Autorité considère :
- que les structures de coûts des trois opérateurs sont compatibles avec l’imposition des tarifs de terminaison d’appel mobile vocal pour 2007 à 7,5 c€/min pour Orange France et SFR, et à 9,24 c€/min pour Bouygues Télécom.
- que la fixation de ces tarifs de gros s’inscrit de manière cohérente dans la tendance européenne de baisse des niveaux des tarifs de terminaison d’appel mobile en Europe, - d’autant que le rythme de cette baisse devrait s’accélérer dans le futur, notamment du fait de l’action de la Commission européenne -. Le positionnement actuel de la France par rapport aux autres pays européens ne devrait donc pas être modifié de manière significative.
- que cette évolution des tarifs de gros pour l’année 2007 aura pour conséquence la disparition des offres de communications fixe vers mobile utilisant des dispositifs dits " hérissons " ou " passerelles GSM " avec la fermeture de l’espace économique existant entre le prix d’achat d’une communication hérisson et le niveau des terminaisons d’appel mobile.
Les " hérissons ", encore appelés " passerelles mobiles (1) " ou " boîtiers radio ", sont des équipements qui peuvent être raccordés à un commutateur et qui permettent d’écouler du trafic vers les réseaux mobiles, en utilisant alors deux boucles locales radio au lieu d’une. La première boucle locale radio permet d’acheminer l’appel du " hérisson " jusqu’au réseau de l’opérateur mobile ; la deuxième permet d’acheminer l’appel du réseau de l’opérateur mobile jusqu’au terminal mobile du destinataire de l’appel.
L’Autorité considère que cette situation est insatisfaisante puisqu’elle dégrade la qualité sonore des communications, interdit l’identification de l’appelant et constitue une utilisation inefficace du spectre hertzien.
Cette disparition ne devrait pas induire de hausse de coût pour les opérateurs fixes ni de variation de prix significative pour les utilisateurs grands comptes qui utilisent également de tels dispositifs [cf. en annexe la communication de l’Autorité aux acheteurs d’appels téléphoniques fixe vers mobile des " grands comptes "].
- L’Autorité maintient, à titre conservatoire, en valeur absolue l’écart de 1,74 c€/min existant entre la TA de Bouygues Télécom et celle de SFR et Orange France
L’Autorité considère que, de manière transitoire, pendant la période de convergence des tarifs de terminaison d’appel vers les coûts de référence sous-jacents, une différenciation tarifaire en faveur de Bouygues Télécom permettra à la société de corriger les effets pervers engendrés par des niveaux de terminaison d’appel voix élevés par rapport aux coûts et par l’arrivée plus tardive de Bouygues Telecom sur le marché.
Le maintien de l’écart actuel à 1,74 c€/min entre la TA de Bouygues Télécom et celle de SFR et Orange France est cohérent avec les écarts de coûts constatés, ayant notamment pour origine des effets d’échelle moindres compte tenu du plus faible volume de trafic sollicitant le réseau du troisième opérateur.
L’Autorité observe qu’il ne lui est pas possible aujourd’hui d’expertiser finement les différences de coûts existant entre les opérateurs, et d’identifier les déterminants de ces différences liés aux effets d’échelle, à des différences d’efficacité, ou à des divergences dans les méthodes de comptabilisation des coûts choisies.
L’Autorité propose donc à titre conservatoire de maintenir en valeur absolue, à son niveau actuel pour l’année 2007, l’écart existant entre le niveau de la TA de Bouygues Télécom et celui des TA de SFR et Orange France, dans l’attente d’un réexamen des différences de coûts qui s’inscrira dans le cadre de la prochaine analyse relative aux marchés de gros de la terminaison d’appel vocal sur le réseau de chacun des opérateurs mobiles métropolitains et des obligations imposées à ce titre. Ce nouveau processus d’analyse des marchés aura lieu durant l’année 2007 et portera sur la période 2008-2010.
Dans les douze prochains mois, l’Autorité va donc re-examiner l’ensemble des éléments de coûts dont elle dispose, les confronter à une modélisation technico-économique en vue de mesurer le niveau de l’écart transitoire introduit au bénéfice de Bouygues Télécom et de spécifier le processus de convergence vers une symétrie tarifaire. Ce délai permettra aussi d’évaluer le degré de fluidité du marché de détail mobile français en prenant en compte les effets de l’amélioration des processus de conservation du numéro attendu pour le début 2007. Le degré de fluidité du marché de détail est un élément essentiel pour spécifier la durée du processus de convergence vers des terminaisons d’appel symétriques. La fluidité du marché français est actuellement relativement faible du fait des médiocres conditions de portabilité du numéro et de la généralisation des clauses d’engagement minimum, qui s’imposent à tout moment à près de 75% des clients titulaires d’une offre post-payé.
- Impact du contrôle du prix de la terminaison d’appel : un gain pour les clients fixes de l’ordre de 200 millions d’€ en 2007
S’agissant du trafic fixe vers mobile, l’Autorité considère que l’impact négatif de court terme pour l’opérateur mobile sur le résultat devrait être en première approximation égal à la baisse de recette des charges d’interconnexion fixe-mobile.
L’incidence à court terme de l’encadrement tarifaire fixé pour 2007 sur le trafic mobile vers mobile est de second ordre. En effet, chaque opérateur subit la baisse de sa terminaison d’appel, mais bénéficie d’une réduction comparable de ses charges d’interconnexion résultant de la baisse des terminaisons d’appel de ses concurrents.
Ainsi, compte tenu du volume représenté par le trafic fixe vers mobile d’environ 10 milliards de minutes, la baisse imposée par l’Autorité représente un transfert d’un montant d’environ 200 millions d’euros d’Orange France, de SFR et Bouygues Télécom à l’ensemble des opérateurs fixes et à leurs clients.
Compte tenu du poids de la terminaison d’appel mobile dans le tarif de détail des appels fixe vers mobile, l’Autorité estime que la baisse des terminaisons d’appel des opérateurs mobiles devrait permettre une baisse correspondante des prix de détail des appels fixe vers mobile, au bénéfice du client fixe, de l’ordre de 12 %. Le gain pour les consommateurs téléphonant d’une ligne fixe, résidentiels ou entreprises, sera alors de l’ordre de 200 millions d’euros.
S’agissant de l’impact sur le marché de détail mobile, il découlera du renforcement du jeu concurrentiel entre les acteurs et du niveau de concurrence sur le marché de gros de l’accès et du départ d’appel sur lequel les opérateurs mobiles virtuels (MVNO) s’approvisionnent : cet impact sera plus lent à se matérialiser compte tenu de la faible fluidité tant de ce marché de gros que du marché de détail mobile sous-jacent. Même si elle ne peut aujourd’hui évaluer cet impact, l’Autorité restera attentive aux effets positifs que la baisse des tarifs de TA pourra avoir sur les conditions financières consenties aux MVNO.
- Calendrier
Ce projet de décision est désormais notifié à la Commission européenne et à l’ensemble des Autorités de Régulation Nationales (ARN). Il est également soumis à consultation publique jusqu’au 5 septembre 2006. Une fois ces deux dernières étapes franchies, l’Autorité pourra adopter sa décision finale et la publier avant fin septembre 2006, conformément au calendrier qu’elle avait initialement fixé dans les décisions n° 04-0937, n° 04-0938 et n° 04-0939.
ANNEXE
Communication à l’attention des acheteurs d’appels téléphoniques fixe vers mobiles des " grands comptes " privés et publics
Paris, le 25 juillet 2006
L’Autorité souhaite attirer l’attention des acheteurs des grands comptes privés ou publics qui organisent des appels d’offres en vue d’acheter des communications fixe vers mobile en nombre et/ou sur plusieurs années.
- Disparition des hérissons achetés par des utilisateurs finaux
Les " hérissons ", encore appelés " passerelles mobiles (1)" ou " boîtiers radio ", sont des équipements qui peuvent être raccordés à un commutateur et qui permettent d’écouler du trafic vers les réseaux mobiles, en utilisant alors deux boucles locales radio au lieu d’une. La première boucle locale radio permet d’acheminer l’appel du " hérisson " jusqu’au réseau de l’opérateur mobile ; la deuxième permet d’acheminer l’appel du réseau de l’opérateur mobile jusqu’au terminal mobile du destinataire de l’appel.
Certains opérateurs mobiles commercialisent directement ces produits à des utilisateurs finaux (notamment des grandes entreprises ou des entités publiques). Dès lors que les opérateurs fixes ne disposeraient plus de la possibilité de recourir à des offres de type hérissons, l’Autorité considère opportun que les opérateurs mobiles cessent d’être des offreurs d’appels fixe vers mobile en ne signant plus de nouveau contrat ou en ne renouvelant pas les contrats déjà signés et en cours de validité. L’Autorité souligne qu’il est important que le marché des appels fixe vers mobile repose à nouveau sur des schémas d’interconnexion classique, et qu’en conséquence les seuls offreurs sur ce marché soient des opérateurs ayant effectivement recours à cette interconnexion.
L’Autorité attire l’attention des opérateurs mobiles et de leurs clients, notamment grands comptes, sur le risque de recours contentieux devant le Conseil de la concurrence contre de tels contrats s’ils perduraient. L’Autorité rappelle que toute pratique consistant à proposer notamment aux " grands comptes " des offres de détail " fixe vers mobile " à des prix inférieurs à la charge de terminaison d'appel pourrait être considérée comme ayant pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence, dès lors qu'elle peut conduire à évincer du marché les opérateurs tiers.
- Appels d’offre pluriannuels des " grands comptes " et régulation des TA mobiles
Les charges de terminaison d’appel mobile constituent une part prépondérante des coûts supportés par les opérateurs pour l’acheminement des appels depuis les postes fixes vers les réseaux mobiles. Or, les niveaux de ces terminaisons d’appel pour les années futures ne sont connus ni des opérateurs ni de l’Autorité elle-même. Lorsque des appels d’offres d’une portée pluriannuelle incluant des communications vers les mobiles sont passés par des grands comptes, la possibilité que ces montants connaissent une baisse les prochaines années constitue un enjeu majeur pour les acheteurs comme pour les soumissionnaires.
L’Autorité entend ici sensibiliser les grands comptes qui achètent des volumes importants de communications fixe vers mobile dans le cadre d’appels d’offres pluriannuels, sur l’impact des modalités imposées aux candidats concernant la forme des prix soumissionnés pour ces communications.
Si des prix fermes pluriannuels ont l’avantage pour l’acheteur de lever l’incertitude sur les prix pratiqués durant la vie du marché, ils ne permettent en revanche pas de profiter pleinement des effets de la concurrence sur les niveaux de prix et peuvent exposer dans certaines circonstances le fournisseur, et in fine l’acheteur, à un risque de recours contentieux sur son offre.
D’une part, du fait des risques encourus en basant ses prix sur une anticipation incertaine de baisse des coûts, les prix proposés peuvent finalement se révéler moins avantageux que des prix basés sur les charges actuellement en vigueur auxquelles seraient répercutées les baisses futures de TA mobile au fur et à mesure de leur mise en œuvre.
D’autre part, cette pratique engendre un biais concurrentiel en faveur des acteurs intégrés horizontalement sur les marchés fixes et mobiles qui sont moins sensibles à cet aléa du fait de leur intégration et a pour conséquence de diminuer les effets de la concurrence sur le niveau des prix proposés en réponse aux appels d’offre. En effet, tous les opérateurs ne bénéficient pas de la même capacité financière et certains, bien que compétitifs, ne peuvent proposer de prix engendrant des pertes sur le début du marché ou risquer de ne finalement pas recouvrer leurs coûts sur la durée totale du marché. En outre, afin de diminuer les risques de pertes, les opérateurs sont incités à sous-estimer les futures baisses de charges. Enfin, le risque d’un recours contentieux contre une offre trop basse est important et pénalisera in fine l’acheteur qui pourrait être obligé de relancer un appel d’offre.
Afin de profiter pleinement des effets de la concurrence et de ne pas s’exposer au risque d’un recours contentieux, il est ainsi préférable pour les acheteurs " grands comptes " privés ou publics de communications fixe vers mobile d’imposer aux candidats de fonder leurs offres :
- soit sur un taux de remise en référence à un tarif général de l’opérateur qui évoluera durant la période d’exécution du marché en fonction des baisses futures de charges de TA mobile comme c’est couramment le cas dans les marchés publics ;
- soit sur un prix ferme basé sur les seuls niveaux connus de terminaison d’appel mobile et sur un engagement de répercuter intégralement les baisses futures de charges de TA mobile lorsqu’elles seront connues.
___________________________
(1) GSM gateways en anglais
Les documents associés
Les réponses à l’appel à commentaires sont à adresser à cette adresse.
Le projet de décision soumis à consultation publique (pdf)