Paris, le 16 juin 2006
Suite à l’avis favorable du Conseil de la concurrence, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) notifie à la Commission européenne son projet de décision relatif à l’analyse du marché de gros de la terminaison d’appel SMS sur les réseaux mobiles métropolitains. Elle lance concomitamment et jusqu’au 17 juillet une nouvelle consultation publique portant sur cette analyse de marché.
- L’Autorité identifie un nouveau marché pertinent en France métropolitaine, celui de la terminaison d’appel SMS
Dans le nouveau cadre réglementaire communautaire, l'Autorité, comme toute autorité de régulation nationale, mène des analyses concurrentielles sur les 18 marchés identifiés par la Commission européenne comme pertinents et peut, en fonction de circonstances nationales particulières, être amenée à définir de nouveaux marchés pertinents non encore identifiés au niveau européen.
Malgré la forte baisse des coûts unitaires du SMS, les tarifs de terminaison d’appel SMS (ou " TA SMS "), qui représentent près de 50% du prix de détail des SMS, n’ont jamais évolué du seul fait des acteurs, et ce depuis la mise en place de l’interopérabilité SMS en décembre 1999.
Initialement fixés à 5,3 centimes d’euros, les tarifs sont actuellement de 4,3 centimes d’euros suite à une décision de règlement de différend de l’Autorité.
Au vu du développement du SMS en France métropolitaine, illustré par une multiplication par 8,6 du nombre de SMS interpersonnels échangés entre 2000 et 2005, et des problèmes concurrentiels identifiés, l’ARCEP considère que, compte tenu des circonstances nationales particulières, il est désormais nécessaire de mettre en place une régulation spécifique sur le marché de gros de la TA SMS, de façon à libérer le jeu concurrentiel du SMS sur le marché de détail et permettre la diffusion du SMS au-delà du seul monde mobile.
Nombre de SMS émis entre 2000 et 2005
(en millions d’unités) | 2000 | 2001 | 2002 | 2003 | 2004 | 2005 |
Nombre de SMS émis | 1.471 | 3.508 | 5.523 | 8.188 | 10.335 | 12.712 |
(Source ARCEP)
Dans son avis n° 06-A-05, le Conseil de la concurrence s’interroge sur le risque de non répercussion de cette baisse de tarif sur le marché de gros sur lequel s’approvisionnent les opérateurs virtuels et sur le marché de détail de la téléphonie mobile, faute de pression concurrentielle suffisante. Tout en partageant les interrogations du Conseil, l’Autorité espère que son action sur les marchés de gros sera suffisante et considère à ce stade qu’une intervention directe sur le marché de détail n’est pas nécessaire. Néanmoins, dès l’adoption de sa décision, l’Autorité suivra avec attention l’évolution des prix de vente en gros de SMS, notamment ceux facturés aux MVNO (opérateurs virtuels) et des prix pour les utilisateurs finals sur le marché de détail.
L’Autorité propose ainsi de retenir comme marché pertinent au sens de la régulation sectorielle le marché de gros de la terminaison d’appel SMS sur le réseau de chaque opérateur mobile de métropole.
- Les obligations envisagées par l’Autorité
L’Autorité propose donc notamment :
- de désigner chacun des trois opérateurs mobiles de métropole Orange France, SFR et Bouygues Télécom comme exerçant une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d’appel SMS sur leur propre réseau ;
- de leur imposer, à ce titre, des obligations d’accès, de transparence, de non-discrimination et de séparation comptable ;
- d’imposer un contrôle tarifaire, sous la forme d’une orientation vers les coûts, des tarifs de terminaison d’appel SMS ;
Au vu des éléments en sa possession et des objectifs d’efficacité économique, de promotion d’une concurrence effective et loyale entre les opérateurs, ainsi que d’optimisation des avantages pour le consommateur, l’Autorité considère qu’il est justifié et proportionné de fixer le tarif maximal de la terminaison d’appel SMS en métropole :
- à 3 centimes d’euros par SMS efficace pour Orange France et SFR,
- à 3,5 centimes d’euros par SMS efficace pour Bouygues Télécom.
L’écart tarifaire ainsi instauré entre les opérateurs est justifié par l’analyse des coûts menée par l’Autorité, ainsi que par la situation particulière de l’opérateur mobile troisième entrant, qui ne peut pas bénéficier des mêmes " effets club " que SFR et Orange France, qui disposent tous les deux d’une part de marché plus importante. En cela, l’Autorité a suivi la recommandation du Conseil de la concurrence qui note dans son avis que " (…) la position de monopole des trois opérateurs sur les marchés concernés ainsi que le rôle différencié joué par les ressources correspondantes dans l’équilibre financier de chaque opérateur, peuvent justifier une régulation plus précise de ces tarifs, à même d’assurer que ne soit pas affaiblie la position d’un acteur en particulier, et notamment celui qui dispose de la part de marché la plus faible ". L’Autorité précise toutefois que, si une telle différenciation tarifaire est justifiée à titre transitoire, elle n’a pas vocation à perdurer, notamment au regard de critères d’efficacité économique.
- Calendrier et étapes de l’analyse
Après prise en compte des observations reçues lors de la première consultation publique, (octobre 2005), le document a été transmis au Conseil de la concurrence (janvier 2006), qui a rendu un avis le 10 mars 2006.
Ce projet de décision est désormais notifié à la Commission européenne et à l’ensemble des Autorités de Régulation Nationales (ARN). Il est également soumis à consultation publique jusqu’au 17 juillet 2006. Une fois ces deux dernières étapes franchies, l’Autorité pourra adopter sa décision finale.
La France est le premier pays en Europe à envisager une régulation sur ce marché de gros.
ANNEXE
Contexte :
A. Qu’est-ce que la terminaison d’appel SMS ?
Un SMS (Short Message Service) ou service de message court est un message écrit, composé de 160 caractères maximum. Ce service est disponible sur la quasi totalité du parc de terminaux mobiles en circulation sur le marché et fonctionne sur tous les types de réseaux mobiles (GSM, GPRS, UMTS). Certains opérateurs fixes proposent aussi un service de SMS depuis les téléphones fixes compatibles
La terminaison d’appel SMS peut être définie comme le service de gros offert par un opérateur A à un opérateur B, afin de permettre aux abonnés de l'opérateur B d’envoyer un SMS aux abonnés de l'opérateur A. Lorsqu’un consommateur, abonné de l'opérateur B, envoie un SMS à une personne abonnée de l'opérateur A, le SMS est remis par l'opérateur B à l'opérateur A : il " termine " l’appel SMS. Pour ce service de terminaison, l'opérateur A facture à l'opérateur B un prix de gros (le " tarif de terminaison "). L'opérateur B refacture ensuite ce tarif sur le marché de détail au consommateur à l’origine de l’envoi du SMS. Les tarifs de terminaison d’appel SMS ont ainsi généralement une incidence directe sur les prix payés par les consommateurs pour l’envoi de SMS.
B. Les chiffres clés : contexte et enjeux économiques
Le nombre de SMS échangés a été multiplié par 8,6 entre 2000 et 2005 en volume. Les échanges de données (SMS et MMS) représentent environ 12% du chiffre d’affaires des opérateurs mobiles. En 2005, près de 13 milliards de SMS ont été envoyés, générant un chiffre d’affaires de plus de 1 milliard d’euros.
B.1. Evolution comparée des trafics SMS et Voix
B.2. Nombre de SMS envoyés par semaine en fonction de l’âge des utilisateurs
Sur l’ensemble de l’année de 2005, le nombre de SMS mensuel moyen par client s’élève à environ 23 (Source : Arcep, Observatoire des marchés). Selon le CREDOC, le SMS reste par ailleurs l’apanage de la jeunesse, même s’il se diffuse lentement à l’ensemble de la population française.
B.3. Le contexte européen
Au cours de l’été 2005, l’Autorité a élaboré un premier comparatif portant sur les tarifs de terminaisons d’appel SMS en Europe. L’analyse de ce benchmark permet d’établir deux faits stylisés importants :
- En premier lieu, la TA SMS apparaît bien comme une composante du prix de détail des SMS et plus précisément comme un coût pour la fourniture de SMS au détail.
- En second lieu, il apparaît que, plus la TA SMS a été fixée tardivement, plus elle s’établit à un niveau bas. C’est notamment le cas d’un certain nombre de pays qui pratiquaient encore le " bill and keep ", système selon lequel deux opérateurs s’échangent leur trafic de SMS sans se facturer de terminaison d’appel, et qui ont fixer leur tarif de terminaison d’appel SMS lorsqu’ils sont sortis de ce système en 2002 ou en 2003.
C Principe de fonctionnement technique du SMS
Le service du SMS est disponible sur la quasi totalité du parc de terminaux mobiles en circulation sur le marché et fonctionne sur tous les types de réseaux (GSM, GPRS, UMTS). Conformément à la norme GSM, les SMS utilisent des capacités dédiées à la signalisation et sont transmis via le canal sémaphore n°7 (SS7).
Certains opérateurs fixes proposent aussi un service de SMS depuis les téléphones fixes compatibles
Outre le SMS de bout en bout, la norme GSM distingue notamment les SMS-MO (Mobile Originated), des SMS-MT (Mobile Terminated). Un SMS-MO désigne le transfert d’un SMS depuis un mobile vers le SMSC (SMS Center), tandis qu’un SMS-MT désigne le transfert d’un SMS depuis le SMSC vers un terminal mobile.
Techniquement, le service SMS nécessite la mise en place d'un ou plusieurs serveurs spécifiques dans le réseau. Le serveur de messages courts (SMSC) assure le stockage des SMS dans des bases de données, la distribution des SMS aux terminaux mobiles destinataires (quand ceux-ci se sont manifestés dans le réseau GSM auquel ils appartiennent) et le traitement des dates de validité des SMS. Le MSC (Mobile services Switching Center), élément de commutation du réseau mobile commun aux autres catégories de trafic, constitue quant à lui l’émetteur réseau du SMS-MO et le récepteur réseau du SMS-MT.
C.1. SMS mobile à mobile
L’envoi d’un SMS interpersonnel d’un opérateur mobile français ou étranger vers le réseau d’un opérateur mobile tiers est régi par un contrat d’interopérabilité SMS, généralement réciproque. Dans ce cadre, la terminaison d’appel SMS depuis un opérateur A sur le réseau mobile de l’opérateur B consiste en l’acheminement par l’opérateur mobile de destination d’un SMS transmis in fine à l’un de ses abonnés mobiles sous la forme d’un SMS-MT.
S’agissant du mode de facturation au détail, le système du calling party pays prévaut : seule l’émission du SMS est facturée au client final, la réception étant gratuite.
S’agissant du marché de gros, les opérateurs mobiles ne payent pas de charge d’interconnexion s’il s’agit d’un SMS on net et payent le prix correspondant à la terminaison d’appel SMS pour les SMS off net. Dans ce cas, le prix de la charge de terminaison d’appel SMS est la seule partie payée par l’opérateur mobile de l’appelant à l’opérateur mobile de l’appelé. Au 31 décembre 2005, le niveau de la TA SMS s’élevait à 4,3 centimes d’euro.
C.2. Le SMS hors du monde mobile
Outre les opérateurs mobiles, d’autres acteurs, notamment les opérateurs de téléphonie fixe, des fournisseurs d’accès Internet et des éditeurs de services, sont susceptibles de solliciter une prestation de SMS-MT auprès de l’opérateur de destination. Dans ce cadre, l’envoi du SMS-MT se fait aujourd’hui hors connexion et on parle alors de " SMS Push ". Si les architectures de réseaux diffèrent quelque peu, la cinématique des échanges reste équivalente à celle décrite précédemment.
Plutôt que de passer par plusieurs interfaces (une par opérateur de destination) ayant des caractéristiques différentes et nécessitant certains développements techniques, ces acteurs non mobiles recourent généralement aux services d’un agrégateur (équivalent de l’opérateur de transit pour la " voix ") qui se charge alors de l’acheminement des SMS.
Les documents associés
Les réponses à l’appel à commentaires sont à adresser à ce courriel
La consultation publique est disponible en téléchargement (pdf - 1,4 Mo (pdf - 1.46Mo))