Mesdames et Messieurs,
Je voudrais d'abord adresser mes remerciements à Georges Rouilleaux, pour m'avoir une fois encore invité à m'exprimer à l'occasion cette semaine des télécoms, véritable sommet des télécommunications.
La situation du marché a beaucoup évolué depuis un an : dans le domaine des radiocommunications, le marché des mobiles poursuit sa progression ; quant à la boucle locale radio et à la troisième génération de mobiles, elles sont, vous le savez, au cœur de nos préoccupations actuelles. La place d'Internet sur le marché s'est rapidement amplifiée ; elle donne lieu à de multiples sollicitations du régulateur pour l'introduction de la concurrence sur la boucle locale.
Je voudrais introduire mon propos en vous donnant quelques éléments sur la situation du marché en 1998 et au 1er semestre 1999, à partir de l'observatoire des marchés dont nous publions aujourd'hui les premiers résultats.
I. L’observatoire des marchés et la situation du marché
En effet, alors que la place des télécommunications ne cesse de croître dans l'économie nationale et mondiale, la connaissance de ce marché était encore insuffisante pour répondre aux besoins en information des pouvoirs publics, des acteurs du secteur des télécommunications et des consommateurs.
C'est pourquoi nous avons mis en place, cette année, un suivi statistique du marché des télécommunications, conformément à la loi de réglementation, qui prévoit la possibilité pour l'Autorité, de recueillir des informations auprès des opérateurs titulaires de licences. Nous avons ainsi réalisé une enquête auprès de ces opérateurs, en partant de leur activité en 1998.
Nous en publions aujourd'hui une première synthèse, qui présente les principales données relatives au marché des services de télécommunications. Un rapport complet couvrira l’ensemble du marché des télécommunications y compris les équipements, toujours en 1998, et sera rendu public en janvier 2000.
Il commentera de façon détaillée les différents chiffres donnés dans le document d'aujourd'hui ; il comprendra une analyse plus approfondie de certains marchés, avec une mise en perspective historique ou internationale : téléphonie longue distance, téléphone sur le câble, Télétel, Audiotel, numéros à coûts partagés, accès à Internet, commerce électronique, mobiles.
On y trouvera des données de base sur les tarifs et les options tarifaires du téléphone en France et dans les différents pays.
Enfin, ce rapport fournira des éléments d'analyse des effets de la libéralisation du secteur sur l'économie, en termes de compétitivité et d'innovation, d'investissement et d'emploi.
Dans son rapport d'activité pour 1998, l'Autorité avait publié une première synthèse statistique du marché. S'il apparaît que les ordres de grandeur sont respectés, les quelques différences s'expliquent simplement : les chiffres publiés en juillet correspondaient à une estimation ; par ailleurs, la méthode retenue s'est naturellement affinée.
Même s'il ne s'agit que d'une première étape, le dispositif de suivi statistique est à présent en place. Vous pourrez désormais disposer chaque année de cette enquête, établie dans des conditions homogènes permettant de mesurer l'évolution du marché. C'est un travail très important et j'en remercie tous ceux qui y ont participé.
Nous allons le poursuivre, en collaboration avec les opérateurs et avec l’INSEE, dans deux directions complémentaires :
- étendre le champ d'investigation aux opérateurs non titulaires de licence ;
- compléter cette enquête par un suivi des prix des services.
Le rôle de l'INSEE, avec qui nous avons signé une convention, sera de recueillir des chiffres sur les fournisseurs d'accès à Internet, auprès desquels une enquête test a été effectuée en 1999, et sur les opérateurs non titulaires de licences (transporteurs de données et certains fournisseurs de cartes). L'INSEE appuiera aussi l'Autorité dans le traitement statistique des données.
Les données publiées aujourd'hui sont regroupées en six chapitres :
- Les acteurs : En 1998, on dénombre 67 opérateurs titulaires d'une licence, dont 13 opérateurs mobiles et 54 opérateurs fixes, ainsi qu'environ 1500 sociétés non titulaires d'une licence, dont 600 fournisseurs d'accès à Internet.
- L'offre de service de télécommunications par segments de marché : en 1998, le chiffre d'affaires du marché des services de télécommunications s'élève à 176,6 milliards de francs, dont 14 milliards pour l'interconnexion, pour un volume de trafic de 148,4 milliards de minutes.
La téléphonie fixe représente 55,4% du marché en valeur et 87,5% du volume total de la voix. On comptait, toujours en 1998, 34,1 millions de lignes d'abonnés fixes et 860 000 abonnés à la sélection du transporteur en fin d'année.
Les communications locales représentent un chiffre d'affaires de 24,6 milliards de francs, dont 1 milliard pour le trafic d'accès local à Internet, soit plus de 4%.
Avec 24,8 milliards de francs, le marché de la téléphonie mobile constitue le second marché de services de télécommunications après celui de la téléphonie fixe.
- La consommation des ménages en services de télécommunications : elle a atteint 75,3 milliards de francs en 1998 et connaît une croissance de l'ordre de 4% depuis 1990. La facture mensuelle moyenne des ménage s'élève à 249 francs pour le téléphone fixe et à 377 francs pour le téléphone mobile.
- Les prix pour les ménages : l'indice des prix des services de télécommunication est passé de 101 en 1994 à 91 en 1998, ce qui confirme l'analyse des paniers de consommation établie par l'Autorité.
- Le poids des services de télécommunications dans l'économie française : le marché représente 1,2% de la production nationale hors taxes. Les investissements réalisés en 1998 par les opérateurs titulaires d'une licence s'élèvent à 36,3 milliards et représentent 2,3% du total des investissements en France. Enfin, les opérateurs emploient près de 156 000 personnes soit 0,7% de l'emploi en France.
- La place de la France dans le marché mondial des services de télécommunications : avec 3,2% d'un marché mondial estimé à 732,5 milliards de dollars, la France occupe en 1998, le septième rang pour les services de télécommunications.
Je précise que cette enquête annuelle sera complétée, à compter de l'an 2000, par des enquêtes trimestrielles simplifiées. Nous avons d'ores et déjà recueilli des éléments sur le premier semestre 1999. Rapportés à l'année 1998, ces chiffres témoignent d'une vraie croissance du chiffre d'affaires global et d'un quasi doublement du trafic mobile sortant.
J'ajoute enfin qu'à la fin du mois de novembre, sur le marché des services fixes, on comptait 77 opérateurs titulaires d'une licence, dont 21 opérateurs de simple fourniture du service téléphonique ( L. 34-1), 15 exploitants de réseau (L. 33-1) et 41 opérateurs de réseau et de service téléphonique (L. 33-1 + L. 34-1).
II. Les radiocommunications
Les mobiles
J'ai récemment souligné l'excellente performance réalisée par le marché des mobiles au mois d'octobre dernier ; la France se situe désormais dans le mouvement européen et les perspectives de croissance demeurent élevées. Je voudrais insister aujourd'hui sur trois points qui ont une incidence directe pour les consommateurs, la qualité de service, la couverture du territoire et la question des prix.
- L'enquête qualité de service
Pour la troisième année consécutive, l'Autorité a conduit, en concertation avec les opérateurs et les associations de consommateurs, une enquête d’évaluation de la qualité de service des réseaux de téléphonie mobile, telle qu’elle peut être perçue au quotidien par les utilisateurs.
Cette enquête, conduite par le cabinet Directique, s’est déroulée sur 6 semaines, entre mi-septembre et fin octobre. Plus de 30 000 appels ont été réalisés, dans les conditions d’utilisation courantes du téléphone portable.
Conformément à ce que j’avais annoncé l’an dernier, plusieurs évolutions, visant notamment une meilleure représentation de l’usage de la téléphonie mobile, ont été introduites dans l’enquête réalisée cette année :
- Tout d’abord, pour la première fois, les mesures ont été réalisées aléatoirement dans les zones testées. Le choix des sites de mesures ne se fait plus, comme les années précédentes, sur la seule base des zones couvertes par les trois réseaux ;
- Les plus grandes agglomérations ont été testées en y distinguant, d’une part, les zones " très denses " et les " autres zones denses " et, d’autre part, les heures " de pointes " et les " heures creuses ". Ainsi, l’enquête permet cette année de mieux rendre compte de la qualité de service perçue dans les situations les plus difficiles ;
- Les tests ont été étendus à de nouvelles situations géographiques, dans les petites agglomérations de 5 000 à 20 000 habitants, et à de nouveaux modes d’utilisation (dans les trains de banlieue des grandes agglomérations et les TGV). En revanche, les axes routiers (routes nationales et autoroutes) n’ont pas été retenus dans l’échantillon de cette année ; des mesures en voiture ont été cependant effectuées dans les rues et sur les axes importants au sein des agglomérations ;
- Enfin, des tests " mobile à mobile " ont, pour la première fois, été effectués afin de mieux refléter les formes multiples de l’utilisation de la téléphonie mobile.
Les résultats permettent une comparaison entre 1998 et 1999, sur la base des indicateurs déjà retenus, c'est-à-dire le taux de communications réussies dès le premier essai et maintenues deux minutes, ainsi que la qualité auditive, parfaite ou acceptable.
L’étude menée cette année confirme que la qualité des services de téléphonie mobile est globalement bonne, et à tout le moins maintenue, quelle que soit la taille des agglomérations considérées.
Elle permet en outre d’apporter des réponses à certaines des interrogations qui s’étaient posées l’an dernier.
Au vu des résultats de l’enquête, il est possible de tirer deux enseignements :
- d’une part, dans les très grandes agglomérations de plus de 400 000 habitants, le taux d’échec et de coupure en " heures de pointe " est environ le double de celui mesuré en " heures creuses ", quel que soit l’opérateur considéré ;
- d’autre part, dans les agglomérations de taille plus petite, aucun phénomène de saturation n’est à relever. Les taux de communications réussies dans ces agglomérations, toutes tranches horaires confondues, sont voisins de ceux relevés dans les très grandes agglomérations de plus de 400 000 habitants aux " heures creuses ".
S’agissant de la qualité de service mesurée dans les trains, la situation est globalement moins bonne et appelle sans doute des efforts accrus sur la couverture ; elle est plus contrastée selon les opérateurs.
Je vous invite enfin à prendre attentivement connaissance du descriptif des conditions techniques de l’enquête, avant d’aborder les parties consacrées aux résultats, pour établir des comparaisons dans le temps.
L'An prochain, l'Autorité poursuivra cette opération en liaison avec les opérateurs et les associations de consommateurs. Peut-être sera-t-il opportun de la focaliser plus particulièrement sur un thème annuel ; sans doute sera-t-il également nécessaire de mettre l'accent sur la couverture du territoire.
- La couverture du territoire par les réseaux mobiles
En effet, la couverture du territoire, et plus précisément le complément de couverture attendu, devient une question importante et sensible. Certes, les opérateurs ont rempli, voire dépassé leurs obligations de couverture de la population. Comme nous l'avions déjà indiqué dans notre avis sur le rapport remis par le Gouvernement au Parlement en juillet 1998, et portant notamment sur les zones d'implantation et sur les délais de couverture de ces réseaux, c'est pour l'essentiel, l'un des effets positifs de la concurrence.
La possibilité d'aller plus avant dans la couverture du territoire, pour répondre au développement de l'usage des mobiles, qui tend à devenir une version non réglementaire du service universel, doit donc faire l'objet d'une réflexion approfondie.
Je rappelle en particulier que fin 1997, lorsque les opérateurs mobiles ont été exonérés d'une partie de leur contribution au financement du service universel, l'Autorité avait posé comme conditions, d'une part l'affectation, par les opérateurs, des sommes ainsi économisées à la couverture du territoire, d'autre part l'engagement de coopération dans l'établissement des infrastructures, afin de favoriser la complémentarité des réseaux, dans le cadre de la concurrence actuelle et d'apporter une contribution à la protection de l'environnement.
Dans les prochains mois, l'Autorité fera le point avec les opérateurs sur le respects de ces engagements et sur les évolutions possibles dans ce domaine.
- Le cadre de la croissance des mobiles
Après les discussions dont j'avais pris l'initiative et qui se sont conclues, en juillet dernier, par un accord sur une baisse de 20% des tarifs des appels entrants avant l’automne, un certain nombre de questions demeurent :
- La sélection du transporteur et la présélection vers les mobiles ;
- L'alignement du régime d'interconnexion et de fixation des tarifs des appels entrants sur le régime de droit commun ;
- L’harmonisation des charges de terminaison d’appel sur les réseaux mobiles ;
- La mise en œuvre d’une nouvelle étape de baisse des tarifs entrants.
Ces questions ne sont pas indépendantes les unes des autres et doivent être traitées dans un cadre, voire un calendrier, communs. L'Autorité reprendra prochainement l'initiative pour engager de nouvelles discussions.
La résolution de ces questions suppose également que les opérateurs s'attachent à inscrire durablement leur stratégie dans une logique de rééquilibrage économique de leurs activités. Les prix des appels sortants, qui sont aujourd'hui déterminés librement par les opérateurs mobiles, figurent en France parmi les plus bas d’Europe, au moment où les équations économiques étudiées pour l'UMTS requièrent la recherche de nouvelles capacités d'investissement.
Mais au regard du coût très important d'acquisition d'un nouvel abonné, la pratique, largement répandue, de la subvention des terminaux ne paraît pas durable économiquement. Par ses contreparties, elle engendre bien souvent l'incompréhension des consommateurs.
La troisième génération de téléphonie mobile
La démarche de sélection des candidats qui va s'engager s'inscrit dans un calendrier européen ; celui-ci a fixé au 1er janvier 2000 la date de publication de la procédure d'attribution des licences, afin de permettre aux opérateurs retenus d'ouvrir leurs services dès janvier 2002. L’Autorité prépare cette introduction avec le souci de respecter ce calendrier et s’attache en tout état de cause à conduire son action en cohérence avec le rythme effectif de progression de nos partenaires européens.
S'agissant de la procédure, les réponses à la consultation de l’Autorité et les travaux de la Commission consultative des radiocommunications ont montré que l'ensemble des acteurs, opérateurs, industriels ou experts, est favorable à la soumission comparative. L’Autorité prend en compte leur argumentation, dans sa force et dans sa diversité, pour la préparation de la proposition qu'elle va faire prochainement au secrétaire d'Etat à l'industrie. Ce n'est pas une position de principe, mais le fruit d'une analyse sur la situation de la France et les enseignements des expériences à l'étranger.
La concertation avec les acteurs sur la préparation de l'appel à candidatures se poursuit. Une récente réunion de la Commission consultative des radiocommunications a permis d'avancer sur plusieurs points : modalités de sélection des candidats, accords d'itinérance, normes, obligations de couverture, partage des sites etc. La qualité de cette réflexion me conduit à la poursuivre jusqu'à l'élaboration ultime de notre proposition, que le ministre sera appelé à publier.
La boucle locale radio
Le Secrétaire d'Etat à l'industrie a publié hier la proposition établie par l'Autorité pour l'attribution des licences de boucle locale radio. Je m'en réjouis, car c'est une étape importante dans ce dossier auquel l'Autorité a consacré depuis deux ans un effort particulier, notamment pour la conduite du processus d'expérimentations préalables et pour la préparation, là encore largement concertée, du cahier des charges de la consultation qui s'ouvre.
Deux objectifs principaux sont à retenir de cette première étape :
- l'introduction d'une nouvelle forme de concurrence sur la boucle locale,
- le développement privilégié des services à haut débit.
D'ici deux mois, l'Autorité recevra les dossiers des candidats ; elle en assurera le dépouillement et l'instruction, et établira les propositions d'attribution des licences en vue de leur délivrance avant l'été 2000. D'ores et déjà, de futurs candidats se manifestent ; ils sont nombreux et je m'en félicite.
La PMR
Nous avons pris, ces derniers mois, plusieurs initiatives dans le domaine des réseaux radio mobiles professionnels, avec trois objectifs :
- simplifier les procédures administratives :
promouvoir l’introduction des technologies numériques
- adapter la tarification.
Dans le prolongement de la décision de l’Autorité du 17 novembre 1998, qui a notamment créé le concept de réseaux radio mobiles professionnels locaux dits RPX exploités par des installateurs, l'Autorité a engagé deux consultations :
- un appel à commentaires concernant la planification des ressources en fréquences pour certaines applications de radiocommunications professionnelles ; la synthèse de cette consultation va permettre de fixer des orientations et de donner ainsi une meilleure visibilité aux utilisateurs et à leurs fournisseurs.
- une consultation des installateurs pour poursuivre les simplifications administratives
Nous avons enfin conduit, aux côtés du Gouvernement, des travaux sur la tarification des réseaux radio mobiles professionnels : nos efforts pour réduire le niveau des taxes et adapter les principes de tarification devraient se traduire prochainement aux plans législatif et réglementaire. En effet, le projet de loi de finances 2000, actuellement en discussion, conduit à une suppression des taxes de constitution et de modification de dossiers. C'est une première réponse des pouvoirs publics à l'attente des professionnels, qui concerne potentiellement 40 000 réseaux ; un projet de décret tarifaire, en cours d'élaboration, devrait par ailleurs permettre de développer la tarification au canal, dont l’Autorité a proposé la généralisation, 15 000 réseaux étant concernés par cette autre mesure.
III. Point sur la régulation
Si les radiocommunications prennent aujourd'hui une importance décisive dans le secteur, je voudrais également saisir cette occasion pour faire le point sur d'autres thèmes qui marquent cette fin d'année.
Le contrôle des "E"
J'ai pris connaissance d'une interrogation sur le suivi, par l'Autorité, de la mise en œuvre des obligations accompagnant l'attribution d'un préfixe "E". Ces obligations sont les suivantes :
- établir au moins un point d'interconnexion par région métropolitaine 18 mois après l'inscription d'un "E" dans leur licence, au moins deux points après 36 mois et au moins trois points dans les régions comportant au moins trois départements, au plus tard dix ans après.
- Respecter une contrainte d'évolution d'un ratio rapportant les capacités de transmission en propre aux capacités de transmission totales de l'opérateur : 40% après 18 mois ; 60% après 36 mois.
C'est ainsi qu'un premier contrôle a été réalisé au mois de juillet 1999 auprès de 9 Télécom réseaux, Omnicom (GTS), Siris et Télécom Développement (Cégétel), soit 18 mois après l'inscription d'un "E" dans leur licence, conformément à la décision adoptée en juillet 1997. Au vu des éléments transmis, je souligne que ces quatre opérateurs respectent les critères établis. L'investissement correspondant s'élève globalement à 2,7 milliards de francs.
Ce contrôle portera en janvier prochain sur Tele2 ; il devient sans objet pour Esprit Telecom, dont le préfixe 6 est actuellement en cours de restitution.
Plusieurs décisions, adoptées ou en cours d'adoption, auront une incidence certaine sur l'exercice de la concurrence et le développement du marché au cours de l'année 2000. Je pense notamment à l'introduction de la présélection, à l'approbation du catalogue d'interconnexion de France Télécom et à l'évaluation du coût net du service universel pour l'année 2000.
La présélection
Le décret adopté le 27 octobre par le Gouvernement a transposé les dispositions communautaires relatives à l'introduction de la présélection, qui permettra à tout utilisateur de présélectionner l'opérateur de son choix, sans avoir à composer de préfixe, pour ses communications non locales.
Les opérateurs soumis à l'obligation de publier un catalogue d'interconnexion doivent fournir la présélection dans ce catalogue. Seule France Télécom se trouve dans ce cas pour l'année prochaine. En raison du passage à l'an 2000, France Télécom a indiqué que la disponibilité effective de ce service interviendrait le 17 janvier.
Ce dispositif est particulièrement important pour le développement du marché puisqu'il permettra de simplifier l'accès à l'opérateur de son choix par un utilisateur, jusqu'ici obligé de composer un préfixe court à chaque appel.
L'Autorité va adopter une décision établissant les modalités de mise en œuvre de ce service, qui s'inscrit dans le prolongement des lignes directrices que nous avons publiées au mois de juillet dernier, après concertation avec les opérateurs.
Elle retient plusieurs principes :
- L'ouverture de la sélection appel par appel et de la présélection à destination des numéros mobiles est subordonnée à une modification des licences des opérateurs mobiles permettant d'aligner le régime d'interconnexion et de fixation des tarifs des appels entrants sur le régime de droit commun.
- Dans un souci de simplicité pour les utilisateurs, et afin de ne pas pénaliser les investissements réalisés dans un réseaux national, un seul opérateur pourra, dans un premier temps, être présélectionné, la sélection appel par appel demeurant bien entendu disponible.
- Les appels qui peuvent actuellement être présélectionnés correspondent aux numéros géographiques au delà de la zone locale de tri, ainsi qu'aux numéros internationaux ; l'ensemble des opérateurs autorisés à fournir le service téléphonique peut donc être présélectionné, et ce dès qu'ils auront communiqué à France Télécom les numéros identifiant les lignes d'abonnés concernées.
Sur ce dernier point, est apparue une difficulté d'échange entre les programmes informatiques des opérateurs nouveaux entrants, qui ont immédiatement mis en œuvre les lignes directrices de l'Autorité, et celui de France Télécom, qui annonce ne pouvoir être prête que dans plusieurs mois. Un délai aussi long dans l'application des décisions de l'Autorité n'est pas acceptable ; j'ai donc demandé que toutes dispositions soient prises pour que rien ne vienne différer la mise en œuvre effective de la présélection en janvier 2000 dans des conditions acceptables pour tous, opérateurs et consommateurs.
Le catalogue d’interconnexion 2000
J'ai mentionné le catalogue d'interconnexion 2000. Les discussions avec France Télécom sont dans leur phase finale, le dispositif tarifaire et l'accès à Internet en constituant des thèmes essentiels.
Vous comprendrez que je ne m'étende pas davantage sur cette discussion, qui a pour but de parvenir à l'établissement d'un document qui prenne en compte nos demandes essentielles et que l'Autorité soit ainsi en mesure d'approuver.
Le service universel
En application de la loi de juillet 1996, un nouveau dispositif interviendra pour le financement du service universel à partir du 1er janvier 2000, Cela se traduit de trois manières :
- Tout d'abord, à partir du 1er janvier, la composante liée au déséquilibre de la structure des tarifs de France Télécom n'existe plus. Elle avait été ramenée de 2 milliards de francs à 16 millions de francs pour 1999 suite à la hausse de l'abonnement principal par France Télécom au 1er mars dernier.
- Le coût du service universel se compose désormais de la péréquation géographique, des tarifs sociaux, de la publiphonie ainsi que de l'annuaire et du service de renseignements. Il est entièrement financé par le fonds de service universel.
- En conséquence, ce nouveau régime met fin au paiement par les opérateurs d'une surcharge aux tarifs d'interconnexion.
La décision proposant l'évaluation du coût du service universel pour 2000, adoptée par l'Autorité le 30 septembre 1999, doit être constatée par le ministre ; elle s'appuie essentiellement sur la même méthodologie que l'an dernier et intervient dans le même contexte au regard des tarifs sociaux, qui ne sont toujours pas mis en œuvre, ce qui va devoir entraîner, au titre de la régularisation pour 1998, un remboursement aux nouveaux entrants des crédits versés à ce titre, à travers le fonds, à France Télécom.
IV. L'accès à Internet à haut débit et la problématique du dégroupage
Au delà de la concurrence sur les communications fixes, Internet et les mobiles sont à présent les marchés les plus porteurs du secteur. L'accès à Internet, en particulier le marché du haut débit, devient l'enjeu principal de la boucle locale.
J'en arrive donc à la problématique du dégroupage qui constitue une des préoccupations essentielles du marché. Nous avons rendu publique, le 29 octobre, la synthèse des réponses à la consultation publique engagée en avril, consultation dont j'avais annoncé le principe en juillet 1998 et dont je rappelle l'objectif :
Préparer une base de réflexion et de propositions, sur une question dont il apparaissait inéluctable qu'elle viendrait au premier rang des préoccupations de la Commission européenne et de nos partenaires de l'Union. Je me félicite aujourd'hui que l'excellent document de consultation préparé sous l'égide de la Commission consultative des réseaux et services de télécommunications et la richesse des contributions éclairent la prise de décisions devenues nécessaires.
Parmi les cinq options analysées, la plus souvent préconisée est assurément l'accès à la paire de cuivre (option 1). Elle est en effet considérée comme la seule à même d’assurer une réelle liberté du nouvel entrant dans la définition de ses services et sa relation avec le client. Les acteurs reconnaissent toutefois que sa mise en œuvre nécessite des travaux préliminaires pour régler les questions techniques et économiques qu'elle pose assurément. Sa réalisation n'est donc pas immédiate, d'autant plus qu'il est maintenant reconnu par tous qu'elle appelle des investissements importants, y compris pour le nouvel entrant.
L’accès à un circuit virtuel permanent (option 3) est en général perçu comme un complément souhaitable, voire indispensable à cette première option. Il n'est pas suffisant à lui seul pour répondre aux attentes du marché, mais il pourrait permettre aux opérateurs de limiter leur retard par rapport à France Télécom dans le lancement de leurs offres ADSL et de les établir dans des conditions de concurrence équitables.
Sur cette base, l’Autorité s'est fixé deux objectifs immédiats :
D'abord, la mise en œuvre d'une solution qui permette aux opérateurs nouveaux entrants d'offrir des services à haut débit ADSL dans des conditions équivalentes à celles dans lesquelles France Télécom est aujourd'hui autorisée à développer ses propres services.
Je souligne à cet égard que si la solution dite du circuit virtuel permanent a été retenue par la consultation, toute autre solution technique assurant l'égalité effective de la concurrence qui serait proposée par France Télécom et qui serait agréée par le plus grand nombre d'opérateurs, pourrait naturellement être retenue. Encore faut-il que cette question soit traitée sans plus attendre. L'Autorité vient de prendre connaissance avec attention d'une offre, dite de revente, de France Télécom, destinées tant aux fournisseurs de services qu'aux opérateurs ; elle examinera avec la même attention les appréciations de ces opérateurs sur les marges d'action qui leur sont proposées. La saisine du Conseil de la concurrence par 9 Télécom est à cet égard un signal important.
En donnant en juillet dernier un avis favorable à l'offre ADSL de France Télécom, l'Autorité reconnaissait l'importance stratégique de cette technologie pour le développement d'Internet et posait une condition, alors non suspensive, pour la mise en œuvre d'offres alternatives. Il serait hautement dommageable que ce marché ne puisse s'ouvrir dans des conditions normales de concurrence, au risque d'être sérieusement perturbé, au détriment de tous les acteurs, par des procédures contentieuses.
Deuxième objectif : préparer un programme de discussion pour définir les travaux nécessaires à la mise en œuvre du dégroupage de la paire de cuivre d'ici la fin 2000. Trois questions doivent en particulier faire l'objet d'une réflexion en commun :
- la gestion de la cohabitation sur un même câble et les interférences entre lignes ;
- les relations entre opérateurs et les procédures opérationnelles ;
- les modalités de fixation des tarifs.
J'ai invité les membres de la Commission consultative des réseaux et services de télécommunications, à laquelle participe naturellement France Télécom, à me faire part, pour le 15 décembre, de leurs propositions en ce sens. A cette date, je réunirai les acteurs concernés pour en tirer les enseignements.
J'estime que là encore cette approche doit d'abord servir à bien préparer les décisions à venir et à éclairer, le moment venu, un nécessaire débat parlementaire.
Les deux objectifs que je viens de rappeler sont complémentaires dans leur nature et dans leur calendrier. Telle est bien en tout cas l'attente du marché telle qu'elle s'est exprimée dans les réponses à la consultation.
Conclusion : La dimension européenne
Pour conclure, je dirai que le développement du secteur des télécommunications est pour une large part placé sous le signe de l'Europe. Nous touchons du doigt les enjeux concrets de la formation d'un véritable marché européen.
L'Union européenne vient d'engager un réexamen du cadre communautaire qui régit le secteur des télécommunications.
Les enjeux économiques liés au développement de la société de l'information sont considérables. En ce sens, le cadre de la régulation, défini à Bruxelles et mis en œuvre à Paris, influe directement sur la satisfaction présente et future des consommateurs et sur la place des entreprises françaises et européennes face à leurs concurrents.
Les orientations récemment rendues publiques par la Commission européenne pour ce réexamen paraissent, pour l'essentiel, satisfaisantes.
Sans doute un lourd travail reste-t-il à accomplir avant l'adoption des nouvelles directives puis leur transposition dans le droit français. Des questions, qui ne sont pas de détail, demeurent posées notamment pour le régime des licences, les obligations des opérateurs puissants sur un marché, les conditions d'interconnexion et d'accès aux réseaux, la concurrence sur la boucle locale. L'Autorité, aux côtés du Gouvernement français et dans le respect de ses compétences, contribuera à ce débat majeur pour l'avenir de notre économie et le bien être de nos concitoyens
Je vous remercie de votre attention.