L'Autorité de régulation des télécoms exprime sa préférence pour un marché ouvert et concurrentiel.
Ce lundi, l'Autorité de régulation des télécoms (Arcep) réunit les acteurs de l'Internet des objets pour leur présenter son projet de régulation "pro innovation". Très libéral dans son approche, Sébastien Soriano, le président de l'Arcep, veut encourager tous les acteurs du secteur - à la fois opérateurs télécoms et entreprises de services ou industries - à se lancer sans attendre de "régulation miracle". "Le message que nous voulons porter aux entreprises utilisatrices est simple: il faut y aller", insiste le président de l'Arcep, qui s'étonne de la frilosité des entreprises à mettre en œuvre des nouveaux services liés à l'Internet des objets. Une position provocante, alors que les objets connectés sont de plus en plus ciblés par les pirates informatiques.
Dans ce contexte, une des priorités du régulateur est néanmoins d'"établir la confiance". Pour cela, l'Arcep a travaillé en collaboration avec les principales agences concernées par le sujet, la Cnil, pour la protection des données personnelles, l'Anssi, pour la sécurité des entreprises, la DGE, pour la compétitivité… "Tous les objets connectés ne sont pas forcément vulnérables. Il faut faire attention aux raccourcis qui associent Internet des objets et attaque massive", souligne Sébastien Soriano. "Après une première génération d'objets pour lesquels la sécurité a peut-être été insuffisamment pensée, le niveau est en train de monter. Cela va se construire dans la durée." Les enjeux sont d'autant plus importants que les Européens ont toutes les cartes en main pour bâtir les grands groupes capables de rivaliser avec les géants américains de l'Internet.
Favoriser l'émergence de nouveaux acteurs
Pour autant, le régulateur n'entend pas abreuver le marché de nouvelles règles et d'obligations. "Nous sommes en mode bazar, pas en mode cathédrale", lance Sébastien Soriano, qui veut signifier aux acteurs de l'Internet des objets que l'Arcep ne tranchera pas en faveur d'un standard de connectivité pour le secteur. "Si un standard s'impose, c'est qu'il aura été choisi par le marché, mais pas par le régulateur", ajoute-il. Les solutions télécoms qui permettent le développement de l'Internet des objets sont là, "sérieuses et pérennes". Les Français sont en outre bien positionnés, avec le consortium LoRa et la start-up Sigfox. Tous deux utilisent des bandes de fréquences libres, qui ciblent les communications "bas débit". Il s'agit, par exemple, de connecter une place de parking, qui envoie un signal quand elle est libre, un compteur d'eau pour détecter des fuites…
"Il faut savoir que nous serons toujours du côté des "barbares", de ceux qui viennent bousculer le marché. C'est une nouvelle forme d'ouverture à la concurrence que nous vivons"
Sébastien Soriano, président de l'Arcep
"Il faut savoir que nous serons toujours du côté des "barbares", de ceux qui viennent bousculer le marché. C'est une nouvelle forme d'ouverture à la concurrence que nous vivons", ajoute Sébastien Soriano, soucieux d'apporter un cadre qui favorise l'émergence de nouveaux acteurs. "Nous voulons simplement assurer l'équilibre entre les acteurs bien installés et les nouveaux entrants", ajoute le président de l'Arcep. Sans les nommer, il oppose ainsi les opérateurs télécoms en place à des entreprises comme Sigfox.
Guichet unique
Parmi les mesures prônées, figure la suppression des barrières à l'entrée dans les télécoms. Pour assurer une connectivité multiple, certains sites télécoms ou des éléments du mobilier urbain (des Abribus, des candélabres…) pourraient être mutualisés pour accueillir de nouveaux équipements de réseaux mobiles. Il prône cette ouverture alors qu'une véritable course est lancée. Orange met ainsi en avant sa volonté de couvrir 2600 communes en LoRa en janvier 2017. Tandis que Bouygues Telecom confirme une couverture nationale avec son réseau LoRa fin 2016 avec 4000 antennes. La mutualisation des infrastructures les priverait d'un de leurs avantages, tandis que le nouvel entrant Sigfox se targue de déjà couvrir la France et que d'autres, comme Qovisio, déploient leur solution. Par ailleurs, le régulateur a prévu de mettre en place un guichet unique, disponible dans le courant du premier semestre 2017, pour faciliter les tests grandeur nature de nouvelles technologies par des start-up.
À terme, de nouvelles "fréquences basses" pourraient être attribuées à l'Internet des objets. "Il n'y a aucune urgence. Pour le moment, les ressources disponibles permettent largement de faire face aux besoins du secteur, dans la mesure où tout le monde respecte les règles d'utilisation de ces fréquences", tempère Sébastien Soriano. Il prendra au 1er janvier 2017 la présidence du Berec, la réunion des autorités des télécoms européennes. Une année pendant laquelle il compte bien faire évoluer l'environnement réglementaire européen.
Propos receuillis par Elsa Bembaron et Service Infographie
→ L'article du journal Le Figaro