- le discours prononcé fait foi -
Mesdames et Messieurs,
Au nom de l’ensemble du Collège de l’ARCEP qui m’entoure, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue pour la présentation du 10ème rapport d’activité de l’Autorité de Régulation des Télécommunications, devenue depuis 2 ans Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. L’Arcep fête en effet cette année ses 10 ans.
Je commencerai ce tour d’horizon par le secteur des Postes.
La régulation postale
Comme dans le secteur des communications électroniques, l’Autorité conduit sa mission avec pragmatisme et, je l’espère, professionnalisme, en recherchant la transparence et en favorisant la concertation :
- Elle a développé l’information publique sur les marchés postaux par la création d’un observatoire statistique des activités postales qui a déjà donné lieu à deux publications annuelles : il y avait une réelle pénurie d’information économique sur le secteur. Je crois pouvoir dire que l’ensemble des acteurs du secteur ont apprécié cette initiative et je les remercie de leurs contributions. L’Autorité s’attachera bien sûr à améliorer ce dispositif ;
- Elle a donné à La Poste un cadre tarifaire, en fixant sur la période 2006-2008, les caractéristiques d’encadrement pluriannuel des tarifs des prestations de service universel postal. Ce cadre permet à La Poste de conduire son ambitieux programme de modernisation Cap Qualité Courrier ;
- Elle veille au développement de la concurrence non seulement par la délivrance des premières autorisations mais également par la conduite d’une concertation ouverte avec les acteurs sur des sujets de nature opérationnelle comme l’accès aux boîtes aux lettres et le marquage des envois postaux.
Je voudrais revenir sur ces derniers points.
En matière d’autorisations, 17 autorisations ont été délivrées ; toutes les grandes Postes des pays voisins en ont obtenu pour le courrier international. Une autorisation a été attribuée à Adrexo pour déployer un réseau de distribution d’envergure nationale et des opérateurs locaux font des demandes d’une grande variété pour opérer sur des niches de marché à l’échelle d’une agglomération ou d’un département. Ceci dit, le segment du courrier ouvert à la concurrence est encore limité et l’intensité de cette concurrence en est sans doute bridée.
La loi pose un principe d’égal accès aux immeubles pour tous les opérateurs de services postaux. Sa mise en œuvre s’avère ardue sur le terrain pour les nouveaux entrants, dans un contexte où la fermeture des immeubles se généralise. L’Autorité est soucieuse de donner corps à ce principe et a engagé des travaux de concertation avec les professionnels de l’habitat et les opérateurs pour les sensibiliser et préciser des modalités d’accès convenables.
Dans notre pays, comme dans d’autres pays européens, la coexistence de plusieurs opérateurs rend nécessaire de définir des règles de marquage des envois, en particulier lorsque les objets transitent par plusieurs opérateurs.
La concertation que nous avons menée avec les opérateurs sur ce sujet nous a amenés à conclure qu’une situation résiduelle de double marquage était inhérente à une phase de transition du marché.
L’Autorité a aussi engagé un dialogue actif avec La Poste sur la qualité du service universel postal, dont la surveillance est l’une de ses missions de régulation majeure. Elle vient de lancer une consultation publique sur les besoins et les attentes des utilisateurs de services postaux en matière de qualité du service universel et d’information sur celle-ci.
D’autre part, afin de disposer de références économiques objectives, elle a pris une première décision fixant les restitutions comptables règlementaires de La Poste, en tenant compte à la fois de ce qu’exige la mise en œuvre efficace des missions de l’Autorité et des capacités du système comptable de La Poste.
Enfin, comme vous le savez sans doute, les instances européennes devraient s’accorder bientôt sur la date d’ouverture totale des marchés postaux à la concurrence. C’est un événement extrêmement important pour le secteur postal : soyez convaincus que tous nos efforts seront tournés vers un objectif : que l’ouverture soit une réussite.
J’en viens maintenant au secteur des communications électroniques.
Depuis la création de l’Autorité en 1997, le marché a profondément évolué.
L’innovation des opérateurs et la dynamique de la concurrence ont renforcé l’appétence des consommateurs pour les services de communications électroniques, et ont notamment nourri la diffusion des services mobiles et haut débit.
Le taux de pénétration d’Internet dans les foyers français est désormais de près de 45 % et progresse d’environ 5 points par an depuis 1999. La France compte ainsi, fin 2006, près de 13 millions d'abonnements à Internet à haut débit. Ce développement remarquable, essentiellement réalisé au travers des technologies ADSL sur paire de cuivre téléphonique, est la résultante d’une régulation déterminée mais pragmatique qui a encouragé l’innovation et l’investissement dans les infrastructures, du dynamisme d’opérateurs comme Free (groupe Iliad) et NeufCégetel, et enfin du professionnalisme de France Télécom qui a joué le jeu et s’est inscrite dans cette nouvelle dynamique de marché.
Du côté de la téléphonie mobile, le nombre d’abonnés s’accroît régulièrement, à un rythme annuel de 7 à 8% sur les trois dernières années. Il frise fin 2006 52 millions, soit un taux de pénétration de près de 82%. Le volume de minutes de téléphonie consommées a, pour sa part, accéléré l’an passé, progressant de 15% en un an, contre 10% en 2005. L’ARCEP a réduit de façon importante les tarifs de gros des terminaisons d’appel voix et SMS. Entre 2002 et 2007, les niveaux de la terminaison d’appel vocale auront été divisés par 3, induisant pour le consommateur une baisse du prix des appels fixe vers mobile de l’ordre de 50 %.
Avec un chiffre d’affaires de 41 milliards d’euros, dont 32 milliards pour la téléphonie fixe, la téléphonie mobile et Internet, le marché final des communications électroniques représente ainsi aujourd’hui 2,3% du PIB français. Le marché de la téléphonie mobile est largement prépondérant avec un chiffre d’affaires de 16,9 milliards, la téléphonie fixe représentant 11,4 milliards et l’Internet 3,7.
Nous ne pouvons que nous féliciter de ces résultats, obtenus grâce à un cadre réglementaire souple, clair et bien conçu.
Pour autant, le marché s’organise autour d’opérateurs significatifs : France Télécom demeure un opérateur largement dominant, avec un poids de l’ordre de 60% en valeur sur le marché de détail (fixe et mobile) dans son ensemble. Ce chiffre est encore plus élevé en prenant en compte les marchés de gros.
Dans le secteur mobile, les trois opérateurs de réseaux mobiles, et les deux premiers en particulier, détiennent une position très forte. Les opérateurs mobiles virtuels totalisent fin 2006 un million quatre cent mille clients, soit un peu moins de 3 % des abonnés mobiles.
Sur le segment particulier du haut débit, qui préfigure les réseaux fixes de demain, le marché se concentre avec une part de marché de l’ordre de 50% pour France Télécom et de l’ordre de 20% chacun pour Free et NeufCegetel, mais la taille de ces deux derniers opérateurs reste faible face à ceux contrôlant une activité mobile.
Le développement d’un marché très dynamique et concurrentiel dans le haut débit ne doit donc pas masquer une situation globale déséquilibrée entre opérateurs mobiles et fixes, porteuse d’incertitudes pour l’avenir.
Après ce bref bilan sur la situation des marchés, comment évolue leur régulation ?
La régulation asymétrique se poursuit, mais de façon plus circonscrite
L’Autorité fait évoluer la régulation asymétrique et la recentre sur les goulots d’étranglement que constituent les infrastructures les réseaux d’accès et les terminaisons d’appels.
En matière d’accès, l’Autorité mène un suivi actif des différentes offres de gros de France Télécom. Elle vient ainsi de contrôler les conditions de mise en œuvre par France Télécom de l’offre de location de fibre optique (LFO), qui permet aux opérateurs alternatifs d’étendre plus rapidement leurs zones de dégroupage. Les évolutions opérationnelles constatées lui ont permis de conclure qu’il n’était pas nécessaire de réguler cette offre dans le cadre de l’offre de référence d’accès à la boucle locale.
Sur la terminaison d’appel, elle vient d’entamer un second cycle d’analyses des marchés, en publiant en avril dernier une première consultation publique sur la régulation de la terminaison d’appel mobile pour les années 2008-2010.
Corrélativement la régulation des marchés de détail et de marchés de gros qui ne sont plus essentiels s’allège.
Lors de son premier cycle d’analyses, l’Autorité avait imposé des obligations sur les marchés de gros, mais aussi sur certains marchés de détail.
Cette régulation des marchés de détail n’a pas vocation à perdurer. A mesure que la régulation sur les marchés de gros est mise en œuvre et devient efficace, la régulation concurrentielle des marchés de détail doit en effet s’alléger pour laisser progressivement place à l’application du seul droit commun de la concurrence, sous la surveillance du Conseil de la concurrence. Ainsi :
- L’Autorité a entamé cette année le processus de dérégulation des marchés de détail de la téléphonie fixe résidentielle, lequel a été rendu possible par la mise en œuvre et le décollage de la VGAST, offre de vente en gros de l’accès au service téléphonique, qui permet désormais aux opérateurs alternatifs de proposer à leurs clients l’abonnement en leur nom propre. De surcroît, ce marché est désormais concurrentiel grâce à la diffusion rapide des offres de voix sur large bande.
- Cette démarche sera étendue aux marchés de détail entreprise de la téléphonie fixe dans le courant de l’année 2008, sous la réserve d’un réexamen de la qualité de service de l’ensemble des offres de gros d’accès de France Télécom.
Dans le cadre de cette dérégulation de certains marchés, l’Autorité s’attache à fournir au Conseil de la concurrence les outils lui permettant d’appliquer efficacement le droit commun de la concurrence. Elle a ainsi mis en place des obligations de séparation comptable plus précises que par le passé afin de s’assurer de l’absence de discrimination ou de subventions croisées de la part de l’opérateur intégré soumis à cette obligation. Elle développe également différents modèles de coûts et les publie sur son site Internet. Au-delà de l’utilisation que peut en faire le Conseil, ces modèles permettent aussi aux acteurs de s’auto discipliner.
Tout cela s’exerce dans le cadre européen qui lui-même est appelé à évoluer
En effet, la Commission a lancé en janvier 2006 le processus de révision du cadre européen. L’expérience de ces dernières années a montré la solidité et l’efficacité des principes qui le fondent. Il n’y a donc pas, du point de vue de l’ARCEP, nécessité de modifier ces principes ou de toucher à l’organisation institutionnelle.
A cet égard, je regrette que le débat actuel, qui part du constat, partagé par l’ARCEP, d’un manque d’harmonisation de la régulation dans les Etats membres, se développe autour d’une fausse bonne idée, l’établissement d’un régulateur européen, et de la résurgence d’un remède problématique, la séparation fonctionnelle.
Lancer un processus de désintégration verticale des opérateurs historiques, dont la séparation fonctionnelle est le premier stade, me paraît constituer un dernier recours dans le cas où le régulateur n’arriverait pas à mettre en oeuvre efficacement les remèdes dont il dispose déjà. Je ne résiste pas à la tentation de faire un peu de publicité pour la lettre de l’Autorité. Son numéro de mars-avril dernier traite de façon approfondie le thème de la séparation fonctionnelle ; Aussi je n’en dirai-je pas plus.
Quant à la création d’un régulateur européen, auquel la Commission transférerait ses pouvoirs en matière de contrôle des décisions d’analyse de marché, elle aurait pour but d’améliorer l’harmonisation des régulations nationales. Or, il me semble que le manque d’harmonisation que nous constatons, procède principalement de deux déficiences :
- La Commission ne joue pas en pratique pleinement et efficacement son rôle de " régulateur européen " : la multitude d’avis individuels produits par la Commission sur les décisions d’analyse de marché des ARN ne suffisent pas, en effet, à construire une politique de régulation et surtout ne donnent pas les signaux forts qu’appellent les grands sujets.
- Les différences de régulation portent essentiellement sur la mise en œuvre " terrain " (l’ " enforcement " pour employer le terme anglais) par les ARN des obligations générales fixées dans les analyses de marché, qui sont peu ou prou, quant à elles, assez homogènes dans les différents Etats : si le GRE peut contribuer à harmoniser les pratiques, il ne peut se substituer à l’impulsion politique que seule la Commission peut donner.
Je prendrai pour illustrer mon propos un exemple déjà ancien et aujourd’hui emblématique de cette " dysharmonie ", celui de la fixation des terminaisons d’appel des réseaux mobiles. Il n’y a aujourd’hui plus de raison objective pour que les niveaux de terminaison d’appel mobiles soient déterminés de façon significativement différente de ceux des terminaisons d’appel fixes. Il me paraît même nécessaire, dans un contexte de convergence et de concurrence directe croissante entre opérateurs du fixe et du mobile que ce déséquilibre concurrentiel disparaisse rapidement.
Or je constate aujourd’hui un arrêt de la baisse des TA dans un certain nombre de grands pays européens, avec des justifications de niveaux élevés que je qualifierai de " surprenantes ".
Il me semble du rôle de la Commission, dans sa capacité de régulateur européen, de mettre un terme à ces désordres, de donner le signal de la convergence à terme des terminaisons d’appel mobile et fixe et d’en encadrer la mise en œuvre technique (règles de pertinence des coûts, méthodes de comptabilisation des coûts, calendrier …), avec le soutien du Groupe des Régulateurs Européens (GRE).
Je crois que seule la Commission possède la légitimité politique et les compétences techniques, avec l’appui des autorités de régulation nationales, pour mener à bien cette harmonisation et l’ARCEP, comme elle l’a fait dans le passé, lui apportera tout son appui et toute son expertise.
Cependant nous avons de nouveaux défis à relever. Le premier concerne une gestion plus économique du spectre.
Dans ses différentes communications, la Commission européenne a insisté sur la nécessité d’adopter une approche plus libéralisée et plus flexible de la gestion des ressources en fréquences, en phase avec le fonctionnement économique du marché, et davantage coordonnée au niveau européen.
Je me suis exprimé à plusieurs reprises sur ce sujet au cours de ces derniers mois. Je suis bien évidemment favorable à une gestion plus flexible et plus économique du spectre et le besoin d’une meilleure harmonisation du spectre en Europe me semble également clair ; les fréquences, comme le montre l’histoire du GSM, constituent le premier outil de politique industrielle dans le secteur des communications sans fil.
Cette évolution ne pourra cependant se faire que graduellement et sans idéologie. En effet, la question d’une régulation plus économique et concurrentielle du spectre hertzien se pose dans un contexte institutionnel complexe puisqu’interviennent, de façon variable selon les pays européens, le pouvoir politique (Gouvernement et Parlement), les différents affectataires de fréquences civils et militaires, ainsi que les régulateurs concernés des contenus audiovisuels (le CSA en France) et des communications électroniques.
Mais, dès à présent, la France et l’Europe doivent tirer parti de l’opportunité exceptionnelle fournie par le passage de la télévision analogique à la télévision numérique, qui va permettre de libérer des ressources dans les bandes UHF, historiquement réservées aux services de radiodiffusion. Le Gouvernement et le Parlement se sont saisis du sujet du dividende numérique, au travers du dispositif mis en place dans la loi sur la télévision du futur et avec la création du Comité Stratégique pour le Numérique. Les travaux techniques menés par l’ANFR, aux niveaux français et européen, semblent confirmer la possibilité d’un accord sur une sous-bande harmonisée pour les services mobiles d’au minimum une soixantaine de MHz dans le haut de la bande UHF (canaux 60 à 69).
Par ailleurs, la Commission Consultative des Radiocommunications vient de créer un groupe de travail chargé d’analyser les besoins en fréquences et les technologies candidates à l’utilisation du dividende numérique et l’ARCEP lancera prochainement une consultation publique sur le sujet.
La question de la faisabilité technique d’un dividende numérique, comportant une sous-bande harmonisée au niveau européen pour les services mobiles me semble ainsi en voie d’être tranchée. Il importe que des décisions rapides permettent d’engager les travaux techniques, notamment les négociations avec les pays frontaliers, pour garantir la disponibilité de ce dividende numérique à l’extinction de la diffusion analogique, le processus de sa libération devant s’inscrire dans le processus général de réaménagement des fréquences nécessaire pour l’arrêt de la diffusion analogique.
Le deuxième sujet que je voudrais évoquer est celui du déploiement du très haut débit sur le marché résidentiel. La construction d’une nouvelle boucle locale filaire représente un enjeu structurant pour les opérateurs et pour notre pays. Les risques de ce projet sont à la hauteur des incertitudes financières et opérationnelles.
L’ARCEP s’est exprimée récemment sur le sujet et je n’y reviendrai donc pas en détail. La mise en place d’un cadre favorisant la mutualisation du génie civil et le partage de la partie terminale des réseaux est un objectif soutenu par tous les acteurs. Il s’agit maintenant de passer du discours à l’acte. Comme pour le haut débit, où leur rôle a été déterminant dans l’extension géographique du dégroupage, les collectivités locales auront un rôle important à jouer pour créer les synergies nécessaires au déploiement du très haut débit, dans un contexte de concurrence raisonnable.
Concernant la mutualisation du génie civil, l’Autorité mettra en consultation publique à l'été une analyse de marché portant sur la situation concurrentielle des fourreaux et sur leur régulation éventuelle. Elle publiera d’ici la fin de l'année, sur la base des travaux du Comité des réseaux d'initiative publique, des points de repères sur les moyens dont disposent les collectivités locales pour favoriser l’équipement en très haut débit de leur territoire.
L’Autorité s’attache également à favoriser la mutualisation effective de la partie terminale des réseaux, afin d’éviter la création de micro-monopoles dans les immeubles. Elle reçoit actuellement des opérateurs leur offre technique et tarifaire d'accès à la partie terminale de leur réseau et va rapidement mettre en consultation publique un document visant à préciser les principales conditions nécessaires pour permettre une mutualisation de la partie terminale dans des conditions techniques et économiques satisfaisantes.
Si, comme je l’espère, ces initiatives contribuent à réduire les risques économiques encourus par les opérateurs, il n’en demeure pas moins essentiel que de nouveaux services, notamment liés aux contenus audiovisuels, permettent d’augmenter leurs revenus. Si, à cet égard, des évolutions positives semblent perceptibles, en particulier au travers de nouvelles formes de consommation audiovisuelle sur Internet, les relations entre les opérateurs et les fournisseurs de contenus ne me semblent pas encore à la hauteur des enjeux.
L’ARCEP est amenée à jouer un rôle accru au bénéfice du consommateur et de l’aménagement du territoire
Dans les deux cas cela suppose davantage de régulation symétrique.
Après plus de 10 ans de régulation, les conditions de concurrence et la structure des marchés évoluent. Même si l’opérateur historique occupe encore une place prépondérante, le secteur ne fonctionne plus en référence à son seul comportement et manifeste un besoin nouveau de régulation : il devient désormais nécessaire de clarifier certaines règles applicables à l’ensemble des acteurs, indépendamment de toute puissance de marché, il s’agit d’augmenter la fluidité des marchés, d’améliorer les processus techniques, de veiller à l’interopérabilité des services, de garantir une information pertinente, pour que le consommateur soit à même de faire jouer la concurrence dans les meilleures conditions, et pour que les collectivités locales soient éclairées dans leur action.
C’est ainsi que l’Autorité a été amenée à proposer au ministre en charge des communications électroniques plusieurs décisions d’ordre réglementaire, adoptées sur le fondement de l’article L. 36-6 du CPCE qui lui octroie un pouvoir réglementaire dérivé. C’est via ce dispositif qu’elle a pu faire avancer cette année les dossiers concernant par exemple la portabilité des numéros, la cession des listes d’annuaire ou les services à valeur ajoutée.
Comme l’illustrent les réflexions que j’ai évoquées à propos du très haut débit, ce type de régulation symétrique pourrait utilement être mis en œuvre sur des marchés oligopolistiques, où la régulation asymétrique prévue par l’analyse des marchés n’est pas opérante, et où des problèmes concurrentiels doivent cependant être prévenus ou corrigés.
En matière de couverture du territoire et de résorption des zones blanches mobile et haut débit, l’ARCEP a poursuivi ses efforts, avec l’ensemble des acteurs, notamment avec les collectivités locales au sein du CRIP, en liaison avec l’action gouvernementale.
En juin 2007, tous les répartiteurs de France Telecom sont équipés en DSL. Toutes les lignes téléphoniques pourraient donc théoriquement recevoir du haut débit. Cependant, en raison de la géographie française, il restera toujours 2 à 3% de lignes trop longues non éligibles à l’ADSL.
France Télécom a pris deux décisions importantes.
Elle a indiqué qu'elle serait rapidement en mesure de fournir des cartes à l’échelle infra communale permettant d’identifier les zones blanches ADSL.
Elle a également annoncé un programme de transformation, en zone peu dense, de sous-répartiteurs en répartiteur, dénommé NRA Zone d’Ombre. Une offre de gros permettant aux opérateurs alternatifs et à France Telecom elle-même d'effectuer ces transformations est inscrite depuis le 11 juin dernier dans l'offre de référence dégroupage. Ce type de déploiement est de nature à faciliter la couverture des villages et bourgs isolés et offre une alternative ADSL à la couverture hertzienne des zones blanches.
Par ailleurs, le déploiement du Wimax constitue l’un des moyens susceptibles de contribuer à la résorption des zones blanches ADSL. Depuis l’attribution des licences il y a maintenant un an, l’Autorité suit attentivement les travaux engagés par les opérateurs et les collectivités ayant obtenu des fréquences. De tout premiers déploiements, même s’ils restent encore d’ampleur limitée, ont déjà été effectués. En outre, la faculté offerte aux titulaires de licences d’effectuer des cessions dans le cadre des marchés secondaires des fréquences - qui fit pour la première fois partie intégrante d’un dispositif d’appel à candidatures à l’occasion de l’attribution des licences Wimax - a d’ores et déjà été utilisée à plusieurs reprises, en particulier dans le cadre de mise à disposition de fréquences par des régions à des départements, et je m’en félicite. L’Autorité va poursuivre dans les prochains mois le suivi des déploiements en cours, dont la première échéance interviendra au 30 juin 2008.
L'Autorité souhaite en outre que les opérateurs déployant des réseaux WiMax tiennent informées les collectivités locales de leurs projets dans les zones blanches du haut débit.
Les collectivités locales disposeront ainsi de toutes les informations nécessaires pour établir un diagnostic de couverture, choisir les solutions appropriées et mieux programmer les interventions publiques visant à la résorption des zones blanches du haut débit.
En matière de téléphonie mobile, l’Autorité a adopté de nouvelles dispositions visant à renforcer la transparence de l’information relative à la couverture. Elle a ainsi pris en février dernier une décision qui impose aux opérateurs mobiles la publication de cartes décrivant de façon détaillée la couverture. Ces nouvelles cartes, appelées à être rendues disponibles à partir du 1er octobre, devront être cohérentes avec les résultats de campagnes de mesures sur le terrain qui seront menées chaque année dans un échantillon de cantons : ainsi, en 2007, la couverture sera auditée dans une première liste de 250 cantons situés dans 11 régions métropolitaines. Le protocole de mesure a été rendu public par l’Autorité, afin de permettre à toute personne ou collectivité qui le souhaiterait de procéder à des études sur le terrain en complément de celles à la charge des opérateurs.
Je rappelle que la fin de l’année 2007 marquera un moment important dans la couverture de la téléphonie mobile, avec l’achèvement du programme de couverture des " zones blanches ", qui aura permis d’apporter la téléphonie mobile dans les centre-bourgs de l’ensemble des communes où aucun des trois opérateurs mobiles n’était présents.
Je voudrais conclure sur la concertation, en particulier avec les associations de consommateurs.
La concertation avec les acteurs a constitué un élément essentiel de l’action de l’ARCEP au cours de ces 10 dernières années. En sus des contacts directs, des groupes de travail ad-hoc et des consultations publiques, les structures de travail permanentes comme les Commissions consultatives (CCR et CCRSCE), le Comité de l’interconnexion et de l’Accès, et le dernier né créé en 2004 le Comité des Réseaux d’Initiative Publique (CRIP), ont joué un rôle essentiel dans l’action de l’Autorité. L’évolution de la régulation qui s’engage nécessite, à mon sens, que les relations avec les associations de consommateurs, certes bien vivantes mais relativement plus informelles et épisodiques, trouvent un cadre plus permanent, à l’image du Comité de l’interconnexion et de l’Accès pour les opérateurs et du CRIP pour les collectivités. L’ARCEP proposera donc la création d’un Comité des Consommateurs qui pourrait tenir sa réunion inaugurale à la rentrée.
Je vous remercie.