Le câble : une infrastructure de boucle locale alternative
Les réseaux câblés constituent une infrastructure de boucle locale alternative à celle de France Télécom propre à permettre un développement concurrentiel et diversifié des services sur réseau filaire (notamment l’internet haut débit). En France, les câblo-opérateurs ont été les premiers à fournir un accès à internet haut débit sur leurs réseaux. Le câble permet en outre de fournir des services de télécommunications classiques.
L'intégration du câble dans le régime juridique des communications électroniques
Infrastructure essentielle pour le développement du haut débit , les réseaux câblés fonctionnaient depuis leur origine sous un régime juridique particulier. La loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle est venue poser le principe d’une mise en conformité des conventions conclues entre les collectivités territoriales et les câblo-opérateurs avec le cadre législatif en vigueur. Elle fixait la date du 1er juillet 2006 comme échéance. La plupart des conventions n’ayant pas été modifiées à cette date, faute d’accord entre les acteurs, la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur a précisé le processus permettant d’aboutir à leur mise en conformité. Le législateur a en particulier confié à l’Arcep la mission d’établir un rapport public permettant de :
- préciser l’état d’avancement de mise en conformité des conventions ;
- distinguer les principales catégories juridiques des conventions ;
- formuler des préconisations propres à assurer leur mise en conformité.
Cette page relate principalement cette histoire.
Mise en conformité des conventions conclues entre les collectivités locales et les câblo-opérateurs
- 19 février 2008 : la commune de Hayange et la communauté de communes de Freyming-Merlebach ont saisi l'Autorité de demandes de médiation de mise en conformité de leur convention câble que Numéricâble a refusé au motif que ces demandes portent sur l'exécution de la convention. Ces collectivités rencontrent des difficultés sur la question de la communication, par Numéricâble, des informations relatives à la connaissance du réseau câblé, en particulier l’emplacement et la disponibilité des infrastructures de réseau. Compte tenu du refus de Numéricâble, la procédure de médiation ne peut donc être engagée par l’Autorité / le communiqué
- 23 juillet 2007 : suite à la demande du législateur, l'Autorité publie son rapport sur la mise en conformité des "conventions câble" / le communiqué
- 22 juin 2007 : l’Autorité met en consultation publique un projet de rapport sur la mise en conformité des conventions câble / le communiqué
- 3 avril 2007 : l'Autorité engage les travaux pour élaborer un rapport sur la mise en conformité des conventions conclues entre les collectivités locales et les câblo-opérateurs avec le cadre législatif en vigueur / le communiqué
Analyse de la situation du câble en France au 15 janvier 2004
Dans son avis au Conseil de la Concurrence du 15 janvier 2004 (saisines d’Iliad et de LDCom sur les offres de TV sur ADSL de France Télécom et TF1-TPS) , l’ART a notamment été amenée à procéder à une analyse de la situation du câble en France à la date de la réponse.
Les réseaux câblés constituent une infrastructure de boucle locale alternative à celle de France Télécom propre à permettre un développement concurrentiel et diversifié des services sur réseau filaire (notamment l’Internet haut débit).
Les chiffres du câble en France
En France, les câblo-opérateurs ont été les premiers à fournir un accès à Internet haut débit sur leurs réseaux (13.464 abonnés Internet par câble en 1998). Depuis, le nombre d’abonnés à l’Internet sur le câble connaît une croissance régulière, mais beaucoup moins forte que celle de l’ADSL (+40% pour le câble en 2003 contre +100% pour l’ADSL). Disponible sur 6,2 des 8,8 millions de prises câblées commercialisables en France, couvrant 650 communes et 15,5 millions d’habitants (soit environ 25% des foyers français), l’offre Internet du câble regroupe fin 2003 environ 350 000 abonnés, que se partagent principalement quatre opérateurs : Noos, France Télécom Câble, NC Numéricâble et UPC France.
Le câble permet en outre de fournir des services de télécommunications classiques. Ainsi, 56.000 personnes sont abonnées à une offre de téléphonie sur le câble en France, mais ce chiffre est en recul depuis deux ans.
Par comparaison internationale, la situation de l’accès à Internet par le câble en France apparaît paradoxale. En effet, dans les pays où le taux de pénétration du câble est important et où le câble a constitué originellement l’unique moyen d’accès au haut débit, on constate que le câble est un moyen privilégié d’accès à Internet. Ainsi, aux Pays-Bas, le taux de pénétration de l’Internet par le câble représente 22% des connexions Internet, l’ADSL 20% ; en Suède, 10% des connexions à Internet s’effectuent par le câble et 33% par ADSL (en septembre 2002). Dans ces pays, la couverture des réseaux câblés est respectivement de 95% et 70% des foyers.
En Allemagne en revanche, où le taux de pénétration du câble est élevé (environ 66% des foyers couverts), mais où Deutsche Telekom détient une part importante de ce réseau (51% du transport de données sur le câble et 25% de la distribution résidentielle de services câblés), l’Internet sur le câble ne s’est pas développé : 6% des connexions Internet s’effectuent par câble et 33% par ADSL en septembre 2002. On trouve une situation assez similaire en France où par comparaison, 4% des connexions à Internet s’effectuent par le câble et 33% par ADSL (fin 2003) avec un taux de couverture du câble de l’ordre de 40% des foyers.
Dès la fin des années 90, le câble est très vite apparu, dans ce qu’il est convenu d’appeler la " bulle Internet ", comme une architecture de boucle locale concurrente de celle de l’opérateur historique. Ainsi, de grands opérateurs se sont lancés dans des acquisitions massives de réseaux câblés : en Europe, France Télécom a investi dans NTL au Royaume-Uni et Casema aux Pays-Bas ; aux Etats-Unis, AT&T s’est lancé dans le rachat de plusieurs câblo-opérateurs pour se reconstituer une boucle locale, cédée en 1984. Ces acquisitions très coûteuses dues aux valorisations boursières importantes des sociétés concernées se sont révélées inefficaces : AT&T après avoir investi plus de 100 milliards de dollars dans le câble et s’être massivement endetté a dû céder ses actifs câbles à Comcast, France Télécom s’est séparé de Casema afin de réduire son endettement. En outre, peut-être par manque de maturité technique, la téléphonie sur le câble ne s’est encore jamais réellement développé.
Les raisons qui ont conduit à l’échec de cette vision du câble comme une boucle locale concurrente de celle des opérateurs historiques de télécommunications ont peut-être évolué. Le " triple play ", entre temps, est devenu une réalité pour de plus en plus de consommateurs, les techniques de téléphonie sur le câble ont évolué et des services de voix sur IP par exemple se développent. Les consommateurs qui effectuaient souvent une séparation entre d’une part les services de télécommunications (téléphone et Internet) fournis par les opérateurs et d’autre part la télévision à valeur ajoutée fournie par les câblo-opérateurs découvrent le " triple play " qui rapproche les deux mondes des télécommunications et de la télévision, et évoluent dans leurs habitudes de consommation. Dans ce contexte, la vision du câble comme réseau de fourniture de services " triple play " reprend du sens.
La position prépondérante de France Télécom dans les réseaux câblés soulève des interrogations
Données complémentaires sur les principaux câblo-opérateurs français :
Composition du capital | Propriété des réseaux | |
NOOS | Suez Lyonnaise des eaux : 52,1 % France Télécom : 27 % Morgan Stanley Dean Witter : 22,9 % | Propriétaire en propre sous régime de concession de service public |
NC Numéricâble | Canal Plus : 100 % | Titulaire de concessions d'exploitation de réseaux locaux. 70 % des prises sont louées à France Télécom (partie issue du Plan Câble) |
France Télécom Câble | France Télécom : 100 % | Propriétaire en propre du réseau |
UPC France | United Pan-Europe communications N.V. : 92 % Intercomm Holdings L.L.C. : 8 % | Propriétaire en propre sous régime de concession |
Outre ces quatre câblo-opérateurs, le marché français compte 49 autres câblo-opérateurs, dont l’implantation est limitée à une région, une agglomération ou une commune. Parmi eux, 10 sont des câblo-opérateurs industriels de droit privé et 39 ont un régime juridique public ou semi-public : régies municipales, société d’économie mixte, syndicat intercommunal à vocation unique, syndicat intercommunal à vocation multiple.
Ce tableau fait effectivement ressortir la position prédominante de France Télécom dans le câble en France : outre 100% de France Télécom Câble, l’opérateur historique détient 70% des prises de NC Numéricâble et en assure la maintenance. Enfin, France Télécom détient 27% de Noos, ce qui en fait le second actionnaire du premier câblo-opérateur français. France Télécom contrôle donc directement ou indirectement plus de 40% du capital des câblos opérateurs et des abonnés.
En France, l’avantage concurrentiel que présentait le câble en étant le premier et l’unique fournisseur d’offre d’accès à Internet haut débit dès 1998 ne s’est pas concrétisé dans la durée, à la différence de la plupart des autres pays, par exemple les Etats-Unis ou le Royaume Unis par exemple où le câble représente aujourd’hui plus de la moitié des accès haut débit.
La position centrale de France Télécom dans le câble français peut probablement expliquer pourquoi la boucle locale câble n’est pas devenue une infrastructure concurrentielle alternative au réseau filaire de l’opérateur historique. Il aurait en effet été inefficace pour France Télécom de financer simultanément et sur les mêmes zones le déploiement du haut débit par deux boucles locales concurrentes entre elles.
Dans la durée, l’absence de pression concurrentielle que pourraient induire les réseaux câblés est certainement préjudiciable à l’ensemble du marché des services à haut débit. Il convient à cet égard de noter que les pays européens présentant les plus forts taux de pénétration du haut débit sont en général ceux où les réseaux câblés ont permis de dynamiser la concurrence (Pays-Bas, Belgique…).
Etude réalisée pour l’ART par le cabinet J.L. Missika Conseil (13 janvier 2004)
L’ART a rappelé à plusieurs reprises que les réseaux câblés occupent une place pleine et entière dans le développement du haut débit en France et constituent une technologie d’accès alternative susceptible de contribuer à dynamiser la concurrence sur la boucle locale dans le secteur des télécommunications.
Afin d'être éclairée sur la situation du câble en France, l'Autorité a fait réaliser une étude par le cabinet JLM Conseil sur l’économie du câble en France.
Cette étude publiée début 2004 a donné lieu à un rapport comprenant une synthèse, l’étude proprement dite (tome 1) ainsi qu’une monographie des principaux opérateurs du câble en France (tome 2).
- Communiqué de presse de publication de l'étude et lien vers l'étude
Les différents réglements de différends sur le câble dont l’ART a été saisie de 1997 à 2001
- 27 janvier 2003 : l'Autorité met à la disposition du public l'étude qu'elle a fait réaliser par le cabinet JLM Conseil sur l'économie du câble en France. L'ART souhaite que ce rapport puisse contribuer à la définition par les pouvoirs publics et les acteurs du marché des évolutions les plus appropriées afin que la France puisse tirer parti de la contribution que la technologie du câble peut apporter au développement de la concurrence entre réseaux . (communiqué / étude)
- 7 septembre 2001 : l'ART prononce des mesures conservatoires dans un différend opposant France Télécom à UPC France. Par cette décision, France Télécom devra ouvrir l'interconnexion à son réseau ce qui permettra aux abonnés d'UPC de bénéficier d'offres de fournisseurs d'accès concurrents. C'est la première fois que l'ART prononce une décision de mesures conservatoires.
- 31 juillet 1998 : l'Autorité adopte une nouvelle décision (Décision 98-678) dans laquelle elle fixe, notamment, un calendrier précis et contraignant pour l'ouverture du service d'accés à Internet sur le réseau câblé de Paris (Communiqué)
- 11 juin 1998 : au vu des délais constatés pour la réalisation des travaux, Paris TV câble saisit à nouveau l'Autorité d'une demande de réglement des différends portant sur la fourniture de l'accès à Internet sur le réseau câblé de Paris.
- 28 avril 1998 : la Cour d'appel de Paris confirme (Arrêts 97 / 17847 et 97 / 17849) les décisions d'arbitrage de l'Autorité (Communiqué) et rejette les recours formés par France Télécom contre ces deux décisions
- 10 juillet 1997 : saisie par Paris TV Câble et la Compagnie générale de Vidéocommunication, l'Autorité rend deux arbitrages (Décisions 97-209 et 97-210 / Communiqué) sur les conditions techniques et tarifaires de l'accès à Internet par le câble
Les grandes dates de la régulation des réseaux câblés
- 15 novembre 2010 : l'ARCEP rend publique sa décision de règlement de différend entre France Télécom et Numéricâble. Cette décision concerne la modernisation d'une partie des réseaux coaxiaux de Numéricâble en déployant, dans les villes concernées par le plan câble, des câbles en fibre optique dans les fourreaux de génie civil propriété de France Télécom, en vertu de contrats de cession conclus avec France Télécom en 1999, 2001 et 2004 / Le communiqué de presse
- 23 juillet 2008 : la loi de Modernisation de l'Economie (LME) est adoptée par le Parlement. Elle précise notamment les modalités de mise en oeuvre par les collectivités du principe d'utilisation partagée des infrastructures de génie civil des DSP du câble / Article 29 quater de la LME
- 19 février 2008 : la commune de Hayange et la communauté de communes de Freyming-Merlebach ont saisi l'Autorité de demandes de médiation de mise en conformité de leur convention câble que Numéricâble a refusé au motif que ces demandes portent sur l'exécution de la convention. Compte tenu du refus de Numéricâble, la procédure de médiation ne peut donc être engagée par l’Autorité / Communiqué de presse
- 23 juillet 2007 : suite à la demande du législateur, l'Autorité publie son rapport sur la mise en conformité des "conventions câble" / le communiqué
- 3 avril 2007 : l'Autorité engage les travaux pour élaborer un rapport sur la mise en conformité des conventions conclues entre les collectivités locales et les câblo-opérateurs avec le cadre législatif en vigueur / le communiqué
- 21 mars 2003 : " l'ART a souligné de longue date que les réseaux câblés étaient une infrastructure essentielle pour le développement du haut débit. Ils doivent être mis en position de contribuer durablement à la dynamique de diversification des services. Or les réseaux câblés sont aujourd'hui soumis à un double régime juridique en tant que réseaux de diffusion de services audiovisuels et en tant que réseaux destinés à fournir des services de télécommunications. Ils sont aujourd'hui pénalisés par la complexité de cette situation et par la persistance de certaines contraintes spécifiques qui sont discutables à la fois d'un point de vue de la neutralité technologique et de l'équité économique. Il apparaît donc nécessaire de simplifier le régime juridique applicable aux réseaux câblés et de l'harmoniser sur celui des réseaux de communication électronique. Sans pour autant que les exigences propres de la régulation des contenus audiovisuels soient niées " (extrait du discours de Paul Champsaur, le 21 mars 2003, au colloque NPA Conseil sur la "TV sur ADSL)
- 24 janvier 2003 : l'Autorité publie une étude commandée au Cabinet JLM Conseil afin d'être éclairée sur l'économie du marché du câble en France (communiqué)
- Octobre 2002 : "L'intégration des réseaux câblés dans le régime juridique des communications électroniques, qui découle de l'esprit et des dispositions des directives, implique un allègement des contraintes qui pèsent aujourd'hui sur les réseaux câblés" note l'Autorité dans sa réponse à la consultation publique du gouvernement relative à l'évolution du droit français des communications électroniques (communiqué / réponse).
- Juillet 2002 : "Les réseaux câblés requièrent clairement des adaptations du cadre actuel" affirme l'ART dans son Rapport sur l'adaptation de la régulation au nouveau contexte du marché des télécommunications . Pour l'Autorité , il est "nécessaire d'aligner le régime juridique applicable aux réseaux câblés sur celui des réseaux de télécommunications".
- 22 février 2002 : "Les réseaux câblés constituent une technologie d'accès alternative susceptible d'ouvrir la concurrence sur la boucle locale (...) La technologie du câble occupe une place pleine et entière dans le développement du haut débit" rappellent Jean-Michel Hubert, président de l'ART et Jacques Douffiagues, membre du Collège dans une interview à Stratégies Télécoms et Multimédia.
- 25 août 1999 : l'Autorité fait réaliser par le cabinet d'avocats Freshfields une étude portant sur le régime de propriété des réseaux téléphoniques et des réseaux câblés lorsque ces derniers sont situés dans des lieux privés. Cette étude propose une méthode d'analyse pour déterminer qui est le propriétaire du réseau téléphonique ou du réseau câblé à l'intérieur des sites privés.
- 19 décembre 1997 : l'Autorité est saisie de deux demandes de règlement des différends par Paris TV Câble et Lyonnaise Communication les opposant à France Télécom en vue de la fourniture du service téléphonique sur le réseau câblé de Paris et d'autres réseaux du Plan Câble